Alexandre Piny (1640-1709), « maître du pur amour » selon Bremond, demeurera jusqu'à la fin de 1690 au couvent de Saint-Jacques, sous-prieur, enseignant, prédicateur. En moins de dix ans, de 1676 à 1685, il écrit huit traités sur le pur amour, comme d'un seul souffle, en urgence, sans rhétorique ni répit. Il donne des conférences à l'Abbaye royale de Maubuisson, et prêche des « retraites » chez les Annonciades de Saint-Eutrope, près Arpajon. Il entretient avec la supérieure et les sœurs la correspondance ici publiée pour la première fois. Pendant la guerre quiétiste de vingt ans, et jusqu'au dernier de ses feux, Piny ne cessera de dire l'impératif d'amour en absolu, au prix de tout enfer au-delà, ici-même, et en tous lieux de l'âme.

Piny se tient en sa pensée d'amour comme la sentinelle de Buzzati au seuil de son désert - veilleur face à un monde déchu d'histoire et d'où vient cependant un jour, en grande violence, et sans recours possible, une telle rage d'aimer qu'elle ne peut s'accomplir qu'en mettant à mort celui qui vient à soi, et qui n'est que cela : soi-même.