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BREMOND Henri  

Histoire littéraire du sentiment religieux en France

depuis la fin des guerres de religion jusqu'à nos jours

2-84137-188-3 - Année : 2006 - 4700 Pages - 253.55 €
Edition intégrale et augmentée sous la direction de François Trémolières
5 volumes reliés sous coffret -
COMMANDE


En entreprenant cette Histoire littéraire du sentiment religieux en France, l’abbé Bremond (1865-1933) pensait la conduire depuis la fin des guerres de Religion jusqu’à nos jours. Il la laissera inachevée, et sans parvenir tout à fait au terme du xviie siècle – qui en avait été le véritable point de départ (Apologie pour Fénelon, 1910). Il n’en a pas moins renouvelé de fond en comble la vision de l’histoire religieuse de ce siècle, la centrant non plus sur Port-Royal, comme la tradition académique depuis Sainte-Beuve, mais sur « l’humanisme dévot » et « l’École française » de spiritualité : François de Sales et Pierre de Bérulle, puis la question de l’amour pur. Il ouvrait ainsi un domaine de recherches, lesquelles d’ailleurs n’allaient pas manquer de nuancer et parfois de contester son entreprise. Cette dernière n’en demeure pas moins sans équivalent, par l’ampleur du panorama, l’originalité de l’écriture, la quantité d’auteurs oubliés ou méconnus qu’elle a invité à découvrir.
Le soin de la présente réédition avait été confié à Émile Goichot, spécialiste incontesté de Bremond, dont la disparition brutale en 2003 a empêché qu’il la mène à bien. La sortie de l’Histoire littéraire du sentiment religieux en France est accompagnée de publications d’É. Goichot : aux Presses universitaires de Strasbourg, son doctorat de 3e cycle (inédit), Les Examens particuliers de M. Tronson. Essai sur la formation du prêtre « classique » (septembre 2005) ; à nos éditions, un choix des études qu’É. Goichot avait consacrées à l’auteur de l’Histoire littéraire, jamais réunies en volume, sous le titre Henri Bremond, historien de la « faim de Dieu ».
Notre édition de l’Histoire littéraire du sentiment religieux, histoire de la spiritualitŽ au XVIIe siècle, regroupe en quatre volumes l’intégralité des onze tomes de l’originale (1916-1933), plus l’Introduction à la philosophie de la prière (1929), conçue par Bremond lui-même comme un supplément. Un cinquième volume comprend l’Index publié à la suite de l’édition originale (1936), une bibliographie bremondienne, une table analytique complète et la traduction des citations. Rédigée par les meilleurs experts : Jacques Le Brun (EPHE), Pierre-Antoine Fabre (EHESS), Patrick Goujon, François Marxer, Dominique Salin (Centre Sèvres), Alain Cantillon, Sophie Houdard (université Paris III), François Trémolières (université Paris X Nanterre), une série d’essais thématiques, associés aux différents tomes, offre une mise au point historiographique et critique.


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SOMMAIRE

Volume I

 

Note de l'éditeur

 

Émile Goichot, Henri Bremond : un historien de la faim de Dieu

Sophie Houdard, Humanisme dévot et «histoire littéraire»

Du projet à l'édition du colosse

La littérature selon la «méthode» de Bremond

L'invention de l'humanisme dévot

Le «goût chrétien», premier stade de l'Échelle mystique

Un xviie siècle «moderne»

Pour en finir avec l'humanisme dévot

 

TOME I

L'Humanisme dévot

Avant-propos

Objet, sources, méthodes et divisions

 

PREMIÈRE PARTIE

SAINT FRANÇOIS DE SALES, LES ORIGINES ET LES TENDANCES DE L'HUMANISME DÉVOT

 

CHAPITRE PREMIER

DE L'HUMANISME CHRÉTIEN À L'HUMANISME DÉVOT

 

I. L'humanisme dévot, être de raison qui représente pour nous les tendances communes, les directions principales de la littérature religieuse pendant la première moitié du xviie siècle

II. Qualités et défauts des humanistes. — Qu'il ne faut pas les juger sur quelques enfantillages. — Particularités de l'humanisme au temps de la Renaissance. — Le lettré du Moyen âge et le lettré d'aujourd'hui. — Térence et Shakespeare. — How beauteous mankind is!

III. Que l'humanisme de la Renaissance est une culture morale et une philosophie. — Glorification plus ou moins enthousiaste de la nature humaine

IV. Chaque humaniste adapte à sa propre conception religieuse l'esprit de l'humanisme. — Humanisme naturaliste et humanisme chrétien. — L'Église et l'humanisme chrétien. — Adversaires de l'humanisme; les Occamistes. — Le cardinal Morone et Salmeron. — Que la plupart des théologiens des xve et xvie siècles sont des humanistes. — Les jésuites et l'humanisme

V. L'humanisme dévot, moins spéculatif, plus pratique et plus populaire que l'humanisme chrétien

 

CHAPITRE II

LOUIS RICHEOME (1544-1625)

 

I. La littérature pieuse en France avant l'Introduction à la vie dévote. — Importance de Richeome parmi les autres précurseurs de François de Sales. — Sa naissance et son éducation. — Jean Maldonat. — L'imago primi sæculi. — Carrière de Richeome

II. Œuvres polémiques. — La Compagnie de Jésus et ses adversaires. — Richeome, les jésuites et le siège de Henri IV

III. Les dauphins du Catéchisme royal. — Caractère littéraire et attrayant des ouvrages spirituels de Richeome. — La Peinture spirituelle,Promenade pittoresque autour d'un couvent. — Le roman de Lazare. — L'esprit d'enfance

IV. Les images religieuses. — Tableaux et estampes de saint André au Quirinal. — Richeome et ses illustrateurs. — Les Tableaux sacrés. — Le cheval d'Abraham. — L'ange d'Élie

V. Plaisir et piété — Esprit d'émerveillement et de joie. — Les merveilles des jardins. — Le glaïeul et le lys. — L'arche de Noé. — Le cœur des bêtes. — Bataille d'abeilles. — La «lézarde» et le singe

VI. Richeome moraliste. — Clairvoyance et bienveillance. — L'humour de Richeome. — Orgueil des théologiens. — Vanité des habits. — Le banquet burlesque

VII. Optimisme chrétien. — Beauté de l'homme. — Le visage et les mains. — Hymne au franc-arbitre. — Excellence du désir de la gloire. — La concupiscence. — Richeome et Bossuet. — L'appareil de l'âme au combat. — L'adieu de l'âme laissant le corps

VIII. Richeome écrivain. — Diversité de ses dons. — Son ars dicendi. — Son amour pour tous les mots de la langue. — Richesse de son lexique. — Fascination du détail. — Richeome et le génie de François de Sales

 

CHAPITRE III

FRANÇOIS DE SALES

 

I. Les rides de Philothée. — Sa gloire est d'avoir vieilli, de paraître vieille. — Hardiesse, nouveauté, importance de l'Introduction à la vie dévote. — François de Sales, la Renaissance et l'humanisme dévot

II. François de Sales humaniste. — Son humanité. — Simplicité et complexité. — Cordialité et faiblesse. — La sensibilité pieuse. — Contemplation des mystères. — Deux processions. — Indépendance de cœur. — Le dédoublement. — Activité et souplesse d'assimilation

III. Les scrupules de sa jeunesse. — Le premier séjour à Paris. — Le gouverneur. — La grande tentation. — La Vierge Noire de Saint‑Étienne‑du‑Grès. — Complications théologiques de la crise. — Conséquences de la victoire. — Adieux au thomisme

IV. Padoue, Annecy, le Chablais. — Mission diplomatique à Paris en 1602 — Son importance dans le développement du saint. — Il prend le ton. — Retour aux classiques. — La cité des saints. — François de Sales et les mystiques parisiens. — Effacement et observation. — L'épanouissement final et les premières lettres de direction

V. L'esprit de François de Sales. — Exigences de sa direction. — Mort de l'amour‑propre. — «Le plus mortifiant de tous les saints». — Si la douceur de son esprit est purement de surface? — Suavité envers le prochain, envers Dieu, envers soi‑même. — Guerre à toutes les formes de l'inquiétude. — Les diversions. — L'esprit de joie

VI. Théologie et philosophie. La pensée salésienne et ses caractères. — Fondement dogmatique et expérimental de son optimisme. — «L'inclination naturelle à aimer Dieu par‑dessus tout». — L'aube de l'amour divin chez un infidèle. — Talisman contre l'obsession pessimiste: la distinction entre les deux parties de l'âme. — François de Sales et les moralistes du grand siècle. — La liberté des âmes. — Unité et solidité du système salésien. — François de Sales et la civilisation catholique

 

CHAPITRE IV

LES MAÎTRES SALÉSIENS. — I. ÉTIENNE BINET

 

I. Influence de François de Sales. — Prompte popularité de son culte. — S'il a été beaucoup lu? — Pluie de livres et courants nouveaux. — Il règne encore. — Ses deux interprètes. — Binet et Camus, les deux maîtres salésiens. — Importance d'Étienne Binet

II. Trivialité précieuse et rhétorique. — Bienheureux les aveugles, bienheureux les sourds! — Prouesses verbales. — La garde‑robe. — La femme. — Grossièretés. — L'éloquence de Binet. — Gemmes et viandes. — Urbanité et mysticisme

III. L'imagination pieuse de Binet. — Figures eucharistiques. — Le drame d'Isaac. — Cléopâtre, Artémise et l'Eucharistie. — Puérilités. — Pâmoisons

IV. Binet continuateur authentique de François de Sales. — La dévotion des malades. — Le dévot fainéant. — La miséricorde de Dieu

V. La politique sacrée. — «Quel est le meilleur gouvernement, le rigoureux ou le doux?». — Les despotes de couvent. — Le style des anges. — La tendresse du pape Grégoire. — Binet et l'humanisme dévot

 

CHAPITRE V

LES MAÎTRES SALÉSIENS. — II. — JEAN‑PIERRE CAMUS

 

I. Le sérieux de Camus. — Son mérite et ses travers. — Le roman de sa jeunesse et l'innocence des premières amours. — Sa vocation. — Ses études théologiques. — Premiers ouvrages. — Belley, Aunay, Rouen, — Dernières années de Camus

II. Camus et ses campagnes contre les moines. — Le P. Sauvage et le Projet de Bourgfontaine. — Si Camus a été janséniste? — Les treize panégyriques de saint Ignace. — Défense des jésuites. — Luttes contre Arnauld. — Le molinisme de Camus

III. Camus et François de Sales. — Les commencements de leur amitié. — Contrastes entre les deux évêques. — Hero‑ worship de Camus. — Intimité croissante. — Formation de Camus par François de Sales. — Du sérieux de cette amitié. — François de Sales n'a pas à en rougir. — L'Esprit du B. François de Sales

IV. Camus et la propagande salésienne. — Ses livres et livrets spirituels. — Le sérieux et l'importance de cette œuvre. — Camus directeur de conscience. — Prière à Dieu pour une âme tentée. — Camus et la Bible. — Le mariage de Zéphire et de Flore. — Les spéculations théologiques de Camus. — Un Nicole moliniste. — L'esprit de système. — Le prétendu quiétisme de Camus. — Joinville et le pur amour. — Le triomphe de Caritée

 

 

seconde partiE

PROGRÈS ET MANIFESTATIONS DIVERSES DE L'HUMANISME DÉVOT

 

CHAPITRE PREMIER

IN HYMNIS ET CANTICIS

 

I. Printemps de la dévotion. — Attardés et égarés. — Le culte des poètes. — Citations poétiques. — Garasse et la poésie française. — Les derniers défenseurs de Ronsard

II. Le sacré et le profane. — L'humanisme dévot et les poètes païens. — Richesses de l'Égypte. — Richeome, Binet et les larcins poétiques de l'antiquité. — Le mythe d'Hermaphrodite et la réunion des églises

III. Les poètes chrétiens. — «Les muses françaises… bientôt toutes chrétiennes». — Martial de Brives et son cantique des créatures

IV. Les cantiques populaires. — Le Parnasse séraphique. — Propagande précieuse et pieuse. — Paul de Barry. — Lazare de Selve. — Les miracles de sainte Fare

V. Les cantiques mystiques. — Le P. Surin et Béranger. — Le dénuement, l'abandon, la quiétude. — Les cantiques de Surin et la controverse du quiétisme. — Les cantiques et l'extase. — Sainte Chantal

 

CHAPITRE II

LES HAUTES ÉTUDES RELIGIEUSES

 

I. Des œuvres dévotes de ce temps‑là qui par leurs mérites d'ordre scientifique ou littéraire appartiennent à la littérature universelle. — De la division du travail qui fera plus tard de la littérature dévote une littérature séparée. — L'humanisme dévot hostile, par définition, à cette séparation des genres. — Ignorance prétendue du clergé français au début du xviie siècle. — Les livres qui se lisaient alors. — Prestige, valeur et rayonnement de la Sorbonne. — L'humanisme dévot et la scolastique. — Il lui apprend le beau langage et il l'attendrit. — François de Sales et une Somme de théologie. — Renaissance théologique et renaissance mystique. — Les œuvres de haute vulgarisation religieuse. — Quelques noms

II. Le programme de la réforme bénédictine. — Travail intellectuel et oraison mentale. — Le «hanap» de la dévotion et le «portail de la retraite des Muses». — Dom Laurent Bénard et ses Parénèses. — Causes morales de la décadence bénédictine. — L'Abbé désarmant les jeunes moines «de lettres et de vertus». — Que l'Abbé doit être savant. — Le prophète Balaam. — Les ignorants jaloux et les dangers prétendus de la science. — Panégyrique de «l'homme docte». — «Jamais un grand savant homme n'est bas de cœur». — Que l'Abbé doit être éloquent

III. L'histoire de l'Église. — Prestige et action de Baronius. — La table chronographique de Gaultier. — Dom Laurent Bénard et l'Église des Pères, — et les moines du moyen âge. — Histoire intime de l'Église. — Le cyclope de Péronne

 

CHAPITRE III

LA VIE DES SAINTS

 

I. Nombre et variété des vies de saints publiées de 1600 à 1670. — Deux groupes très distincts, les vies des saints d'autrefois, celles des contemporains. — La légende et l'esprit critique. — Sainte Brigitte d'Irlande. — Sainte Fare et son biographe. — Sur un épi de blé. — Imagination et fantaisie. — Cortade et les martyrs d'Agen. — Les saints au village. — Professions et métiers. — Influence de ces livres. — La communion des saints

II. Biographie des saints du xviie siècle. — Un genre nouveau. — Résistance des anciens Ordres. — Probité et mérites littéraires des biographes. — Le goût du détail concret et du document. Curiosité psychologique. — Vues synthétiques. — Le P. Amelote. — L'exil des mystiques et la fin de la grande école hagiographique. — Le P. Bouhours

 

CHAPITRE IV

LES ENCYCLOPÉDISTES DÉVOTS

 

I. L'encyclopédisme avant l'Encyclopédie. — La passion de tout connaître. — Moyen âge, Renaissance, première moitié du xviie siècle. — Les écrivains dévots et la vulgarisation encyclopédique. — L'essai des merveilles de Binet. — Modernité et caractère «objectif» de l'ouvrage. — Tableau de la France et de Paris en 1620. — L'encyclopédisme annexé à la rhétorique. — «Richesses d'éloquence» dans les glos-saires et lexiques spéciaux. — Morceaux de bravoure

II. Curiosité et vie dévote. — Nos auteurs passent outre à ces antinomies apparentes et propagent l'esprit de curiosité dans les milieux pieux. — Le P. Lion. — François Chevillard et son Petit‑Tout. — L'Encyclopédie dialoguée. — L'éléphant. — La leçon d'anatomie. — Condren et la pierre philosophale. — De l'humanisme encyclopédique au mysticisme

 

CHAPITRE V

LE ROMAN DÉVOT

 

I. Charles Perrault et Camus. — L'art de conter. — Le départ d'un cadet de Gascogne. — Virgile. — Rigault et Sainte‑Beuve. Il n'est pas vrai que rien des romans de Camus «n'a jamais eu vie»

II. Camus écrit ses romans, avant tout, pour le plaisir du lecteur. — Et pour le sien propre. — Que ceux qui «ne sont bons qu'à l'Église» ne doivent ni ne peuvent écrire de romans. — Camus et les mœurs des divers pays. — Son Espagne. — Son Italie. — Les dames de Gênes. — La contrainte italienne et la liberté française. — Nos provinces: Normandie; Gascogne. — Le prêtre et le parisien. — La chaste Suzanne. — La piété dans les romans de Camus. — Deux parisiennes sous la pluie. — Les ressorts mystiques. — Les citations poétiques

III. Les romans de Camus sont des «méditations historiques». — Il n'invente presque rien. — Un Tallemant ingénu. — La Pieuse Julie et la baronne de Veuilly

IV. Les morales des romans de Camus. — Peintures et critiques des mœurs du temps. — Indulgence foncière de l'évêque-romancier. — Des amourettes. — L'amour naissant. — L'amour honnête. — Palombe. — Théorie platonicienne de l'amour. — Innocence des romans de Camus

 

CHAPITRE VI

LE RIRE ET LES JEUX

 

I. La vertu d'eutrapélie et le rire. — Le Démocrite chrétien. — Étienne Binet et la dévotion en belle humeur. — La consolation et réjouissance pour les malades. — La goutte. — Médecine et médecins. — L'imagination et les maladies. — Cure par le rire. — Symbolismes médicaux

II. Les jeux de la plume. — L'écriture artiste. — Les vers latins. — Les Lusus allegorici du P. Sautel. — Les mouches. — Marche funèbre d'une puce

III. Emblèmes et allégories

 

CHAPITRE VII

RECUEILLEMENT, VIE INTÉRIEURE

 

I. Les médiocres: saugrenus, bavards. — L'humanisme dévot n'est pas responsable de ces misères. — Il a ses défauts pourtant. — L'excès de douceur, «la voie de lait et de roses». — Sucreries dévotes. — Sérieux, dignité dé la littérature dévote avant Port‑Royal

II. Le recueillement des humanistes dévots. — L'ermitage d'amour de Desportes et ses transpositions soi‑disant pieuses. — Trellon et sa «muse guerrière» au désert. — Du goût de la solitude au temps de Louis XIII. — «La retraite d'Alcippe». — Les pèlerinages et le sentiment de la nature sauvage. — Nervèze et la solitude chrétienne. — Les «Entretiens solitaires.» — Dignité, familiarité sainte, optimisme de Brébeuf

III. Du peu de place que tient la contemplation des scènes évangéliques dans la prière de Brébeuf et de ses contemporains. — Et, au contraire, de l'importance que la première génération des humanistes dévots attache à cette contemplation. — Jean de la Cépède et ses théorèmes. — Souvenirs et symbolismes bibliques. — Tableaux animés de la Passion. — Qualité religieuse de la contemplation des mystères

 

CHAPITRE VIII

OPTIMISME CHRÉTIEN

 

I. L'humanisme dévot foncièrement optimiste. — Au confluent des deux optimismes, celui de la Renaissance et celui des mystiques, il fait la synthèse entre l'un et l'autre. — «Tous les biens de cette vie en attendant un autre monde meilleur». — Laurent de Paris et les litanies de l'homme. — L'honnête homme. — Les vertus naturelles. — Le P. Le Moyne et le «portrait du sauvage». — Le P. Hayneufve. — Éloge du temps présent. — Misères de cette époque. — «L'esprit purement et parfaitement chrétien ne s'est pas retiré de notre siècle»

II. Fondements théologiques de cet optimisme. — Les humanistes disciples des grands docteurs du xvie siècle. — Douceur et «précieux ajustements» de la grâce prévenante». — «Le tambour bat, mais la cloche sonne». — Condescendances de la grâce. — Félix culpa. — Le grand nombre des élus. — «Le consolateur des âmes scrupuleuses». — « Soit donc ton exercice d'avoir bonne opinion de moi». — Camus et les hardiesses de l'espérance chrétienne

III. De la dévotion aisée de Le Moyne et du vain tapage que l'on a fait autour de ce livre

 

CHAPITRE IX

VERS LE PUR AMOUR

 

Le beau et le bien. — La Diotime de Platon. — «La beauté jamais ne saoule.» — Panégyrique de l'amour humain par le général des feuillants — Friar Lawrence. — Vrai caractère de cette philosophie. — Loin d'être trop facile, elle nous veut saints. — Que l'humanisme conduit logiquement au mysticisme. — Contre l'amour mercenaire et contre la crainte. — Le culte de Marie‑Madeleine au xviie siècle. — Patronne des humanistes et des mystiques. — Raisons de ce culte. — Littérature magdaléenne. — Marie‑Madeleine et Marie de Valence

 

 

troisièmE PARTIE

YVES DE PARIS ET LA FIN DE L'HUMANISME DÉVOT

 

CHAPITRE PREMIER

L'HUMANISME DÉVOT CONTRE LE JANSÉNISME

 

I. De la Fréquente communion d'Arnauld et de la «révolution» que ce livre a déterminée «dans la manière d'entendre et de pratiquer la piété». — Des causes qui ont pu faciliter le succès de ce livre. — Défiance croissante à l'égard des humanistes dévots. — Accusations équivoques et mal fondées. — L'optimisme chrétien. — La vertu facile. — La morale des humanistes plus exigeante que celle de Port‑Royal.

II. Deux philosophies du christianisme. — Les humanistes dévots et la controverse janséniste. — François Bonal. — Sa manière. — Dangers de cette controverse. — La métaphysique irréelle de Jansénius. — Recours au sens chrétien des «simples» et à l'expérience intime. — Les lumières de la spéculation et celles de la vie. — Anti‑jansénisme des spirituels jansénistes. — Fermer les livres des doctes et ouvrir l'Évangile. — De l'autorité de saint Augustin

III. Modération de Bonal. — Le tempérament janséniste. — «Ils ne trouvent grand que ce qui est immense.» — «Philosophes tragédiens.» — «Une religion de roman.». — La fable de l'âge d'or. — L'exaltation de l'Église primitive aux dépens de la moderne. — «De tout temps, il y a eu peu de parfaits.» — Prétendue décadence du christianisme. — La «pénitence de belle humeur». — Esprit chimérique des réformateurs. — «Une réformation mitigée.» — Développement et non dégénérescence. — Des deux âges de l'Église et des merveilles de sa vieillesse. — Louange du siècle présent

IV. Le roman de la grâce janséniste. — Conséquences de la théologie inhumaine. — La morale relâchée moins dangereuse que le rigorisme. — Jansénistes et libertins

V. Du salut des infidèles. — Une «créance sauvage». — Des enfants morts sans baptême. — Agar et Ismaël. — La «sobre sagesse» et la sensibilité de Bonal. — Sa théologie de la grâce. — Définition du chrétien

 

CHAPITRE II

YVES DE PARIS — L'HOMME ET L'ÉCRIVAIN

 

I. Comment le P. Yves est‑il aujourd'hui si oublié? — Sa place dans l'histoire de l'humanisme. — Sa naissance. — Ses débuts au barreau. — Qu'il n'avait pas l'esprit juridique. — La vocation religieuse. — Ce qui l'attirait chez les capucins, — Liberté et simplicité de l'Ordre. — Les missions dans les campagnes. — L'activité littéraire du P. Yves

II. Que la contemplation vaut mieux que l'action. — Description de la contemplation. — Ses délices. — La promenade du sage. — Lever de soleil. — Dévotion à la lumière. — Les infiniment petits. — Le musée. — Autres objets de la contemplation du P. Yves. — Les voyages. — Différences entre le contemplateur et le curieux. — Que la contemplation est une vertu. — De la contemplation à l'extase

III. Style du P. Yves. — Les rythmes. — Les images

IV. Le mage. — La philosophie chrétienne et l'astrologie. — Le défi aux étoiles. — L'horoscope des empires. — Le Fatum universi et les prédictions du P. Yves

 

CHAPITRE III

YVES DE PARIS — LA DOCTRINE

Caractères généraux de cette doctrine. — Son orthodoxie. — Son apparence profane

§ 1. — Le meilleur des mondes.

I. Ici‑bas «plus de perfections que de défauts». — «Le bien devance toujours le mal». — Les larmes de l'enfant qui vient de naître. — Que notre plaisir est «sans relâche». — Que nous n'avons d'inclination que pour ce dont nous pouvons avoir la jouissance. — Les scrupuleux. — «Beau mariage entre la nécessité et le plaisir.» — Le fou rire, revanche de l'ordre. — Du rire des pauvres

II. Des «lâches pensées de la misère de l'homme». — Les passions, — Que la vertu est aisée. — «Se persuader aisément des perfections» du prochain. — Bonté des demi‑vertus. — Du sentiment de l'honneur. — De la mode. — La fidélité conjugale en France. — Misères de l'Église

III. Que les défauts de la création concourent à son excellence. — Félix culpa. — Facilité de la conversion. — Victoire de l'Amour

§ 2. — Abus et plans de réformes.

La farce du monde. — Tartufe. — Confréries et cabales. — Des vocations forcées. — Décadence de la noblesse. — Des pages. — Académie gratuite pour l'éducation des enfants nobles, mais pauvres. — Mariages d'argent. — Contre les nourrices mercenaires. — La misère publique et les exactions des gouvernants. — Du sort malheu reux des ouvriers. — Projet d'une caisse syndicale de secours aux ouvriers infirmes

§ 3. — Des Sympathies et de l'Union.

I. La loi des sympathies. — Son origine divine. — Sa fin

II. De l'amitié des domestiques pour leurs maîtres. — Que le riche subsiste «par la miséricorde des pauvres». — Du sexe infirme. — Le mariage et «la mort de la liberté». — Harmonies conjugales

III. De l'amitié «remède général à toutes les infirmités de l'âme». — Du mystère des sympathies et de leur origine divine. — Panégyrique de l'amitié

IV. Des anges guérisseurs. — Les anges, et la «bonne fortune», et la conservation des États. — De l'ange gardien

§ 4. — Dieu sensible au cœur.

I. Que «l'homme a un sentiment naturel de Dieu». — Que cette connaissance de Dieu peut se «comparer à l'attouchement». — Les païens idolâtres, prodigues de ce sentiment. — Que ce sentiment est invincible et inaliénable. — De quel droit mettre un «instinct» au‑dessus de la raison raisonnante? — Que cet instinct est intelligence. — Des trois «portions» de l'âme. — Le sentiment de Dieu «apanage de la partie supérieure». — Rapport entre ce sentiment et la connaissance mystique. — La pointe de l'âme

II. Que «les plus grands docteurs ne sont pas les plus connaissants». — Des humbles et des frères lais. — Infirmités de la raison raisonnante. — De la docte ignorance

§ 5. — De la beauté et de l'amour.

I. L'échelle des beautés. — Attrait de la diversité. — Excellence de l'unité. — Que toute beauté est spirituelle. — Révélation de la beauté. — Des premières flammes de l'amour. — Que la beauté corporelle n'est qu'une ombre de la divine. — Panégyrique de l'Amour

II. Mysticisme personnel du P. Yves. — Ses réserves contre l'exagération des faux mystiques. — Du pur amour. — Vers l'extase. — Le P. Yves, les dangers possibles et la fin de l'humanisme dévot

 

CHAPITRE IV

DE L'HUMANISME AU MYSTICISME

 

I. Que le nom que nous lui donnons soit bien ou mal choisi, l'ensemble des tendances que nous avons appelées humanisme dévot, a prédominé dans le monde religieux pendant la première moitié du xviie siècle. — Importance de ce fait qui explique, en partie du moins, la renaissance mystique de cette même période

II. Affinités entre l'humanisme et le mysticisme. — Tendances mystiques de la Renaissance, — Bembo, Despautère et les philosophes. — Déviations du sens mystique. — L'humanisme chrétien et les mystiques de la Contre‑Réforme

III. La dévotion de l'humanisme dévot et la vie mystique. — Anti‑mysticisme de Port‑Royal. — François de Sales

Appendices. Notes critiques sur Camus

§ 1. L'abbé de Baudry et l'«Esprit du Bienheureux François de Sales»

§ 2. La visitation d'Annecy et Jean‑Pierre Camus

Bibliographie

 

 

 

 

 

Tome II

L'invasion mystique

 

CHAPITRE PREMIER

LE XVIe SIÈCLE, LA TRADITION ET LES RÉSERVES DU MYSTICISME FRANÇAIS

 

I. De la prétendue décadence religieuse du xvie siècle. — Que tous les mystiques dont nous allons parler n'appartiennent pas moins au xvie siècle qu'au xviie. — Chartreux et victorins. — Les Ordres nouveaux. — L'Université de Pont‑à‑Mousson. — Les familles saintes. — Que la mode n'était pas encore aux biographies religieuses. — M. Roussel

II. Comment le xvie siècle mystique prépare le xviie et lui passe le flambeau. — Le Sud‑Ouest. — Jeanne de Lestonnac. — Jean de la Barrière et la réforme des feuillants. — Le comtat Venaissin et la Provence. — César de Bus et son cousin Romillon. — César et la jeunesse dorée de Cavaillon. — Le P. Péquet. — Louis Guyot et Antoinette. — Conversion de César de Bus. — Romillon abjure le calvinisme

III. Débuts apostoliques de César de Bus et de Romillon. — La Contre-réforme et les évêques du Comtat et de Provence. — La «Doctrine chrétienne». — Romillon se sépare de César de Bus. — L'Oratoire provençal

IV. Antoinette d'Avignon et son petit cénacle. — Françoise de Bermond. — Ni le mariage, ni la clôture. — Mlle de Mazan et la règle de sainte Angèle. — Commencements de la congrégation des ursulines

V. Les anciens ordres religieux. — Fermeture du couvent de Sainte‑Praxède. — Philippe d'Arpajon et les dominicaines à Saint‑Jean‑le‑Vieux. — Anne de Monclar et la réforme. — Retour à Sainte‑Praxède. — Importance de cette réforme dans l'histoire religieuse du xviiie siècle

VI. Saint‑Remy et les Rampalle. — Une mission du P. Péquet. — Exode des Rampalle à Avignon. — Une famille de mystiques

 

CHAPITRE II

MARIE DE VALENCE, LE P. COTON ET LA TRÊVE DU ROI

 

§ 1. — Marie de Valence.

I. Dans la plupart des grandes entreprises religieuses du xviie siècle, on découvre l'inspiration d'une femme. — Que ce fait ne doit pas surprendre. — Primauté incontestée de la hiérarchie. — Dextérité féminine. — M. Olier. — La mystique et son directeur. — Première phase de leurs rapports. — Seconde phase. — Maternité spirituelle. — La route de Dammartin. — Marie de Valence, le P. Coton et Henri IV. — Le biographe de Marie. — Louis de la Rivière et Marguerite Chambaud. — Enfance et mariage de Marie. — Mathieu de Pouchelon, notaire et guerrier. — La petite maison de Valence. — Le P. Coton. — Marie et les prédicateurs. — Visites du P. Coton. — Il veut faire venir Marie à Paris. — L'ambassade de Richelieu. — Marie de Valence et M. Olier

II. Vie intérieure de Marie. — De sainte Gertrude à sainte Thérèse. — Châteaux, vergers, jeunes dames. — Le jardin enchanté du Sieur de la Buysse. — Les 360 «interrogats» aux créatures. — Les oiseaux merveilleux. — Les deux processions et le haut dessein. — Plus haut que les images. — Marie de Valence et l'assemblée du clergé de 1651. — Une victime de Port‑Royal

III. Que Marie de Valence n'est pas une exception. — Les mystiques de la foule. — «Nous avons ici dedans un jour». — La bergère de Ponçonas. — Barbe de Compiègne et le P. de Condren. — Un complot contre Louis XIII. — Le grand nombre des mystiques. — Les faux prouvent les vrais. — Nicole Tavernier et Mme Acarie. — Le P. Surin et le coche de Rouen. — C'est Dieu qui fait les mystiques

§ 2. — Le Père Coton et la trêve du Roi.

I. Coton nous appartient tout entier. — Famille d'anti‑ligueurs et d'anti‑jésuites. — Le libéralisme du P. Coton. — Sa douceur naturelle. — Rabelais et les écrivains dévots. — Coton et la controverse protestante. — Style truculent. — Responsio mollis frangit iram. — Aménité et urbanité habituelles du P. Coton controversiste

II. Situation très spéciale du P. Coton à la Cour. — Agent et otage des jésuites. — Politique de Henri IV à l'endroit des jésuites. — Sa méfiance profonde. — Évolution de ses sentiments. — Arrivée de Coton à la Cour. — «Attachement de tendresse». — L'édit de Rouen. — Mécontentement de la cour de Rome et du général des jésuites. — Le point de vue français et les «italiens». — Dangers de la politique romaine. — L'acte héroïque du P. Coton

III. Homme de cour, diplomate et mystique. — Le P. Coton et le P. Joseph. — De la religion de Henri IV. — L'épieikeia et la conscience du roi. — Coton devait‑il laisser la partie? — Son apostolat à la Cour. — Le Théologien dans les conversations avec les gens du monde. — L'Intérieure occupation et la Philothée

IV. La Trêve du Roi. — L'Union sacrée et la renaissance mystique

V. Vie intérieure du P. Coton. — Influence italienne. — Coton et François de Sales. — Sermons. — Méditations. — Les deux étendards. — Le portrait de Lucifer. — Les bons anges. — Archanges et archi‑démons. — Particularités du style pieux à cette époque. — Tendresse et noblesse. — L'Holocauste. — Le pur amour facile à tous. — Les formules du pur amour. — Le pur amour au seuil même de l'enfer. — Magnanimité

VI. Coton et les mystiques de son temps. — Sa carrière d'exorciste. — Adriène Dufresne. — «Personne ne m'a porté plus efficacement à Dieu qu'elle». — La vie mystique de Jeanne‑Marie Coton. — Le P. de La Chaise. — Derniers jours du P. Coton. — Les mystiques de la Compagnie de Jésus et le P. Coton

 

CHAPITRE III

BENOÎT DE CANFELD, LE P. JOSEPH ET LA TRADITION SÉRAPHIQUE

 

I. Les Ordres nouveaux. — Capucins, jésuites. — Contrastes et ressemblances. — La méthode franciscaine et les Exercices spirituels. — Les jésuites et la mystique. — Arrivée des capucins en France. — Que la renaissance religieuse leur doit beaucoup

II. Ange de Joyeuse. — Rencontre du Frère Ange et du cardinal de Joyeuse. — Vocation du comte de Bouchage. — Lettres de Henri III. — De la haire à la cuirasse. — Ange de Joyeuse après la Ligue. — Sommations du P. Benoît de Canfeld. — De la cuirasse à la haire

III. Conversion de Benoît de Canfeld. — Ses premières impressions en France. — Ce qu'il pense de la décadence du catholicisme français. — La Règle de perfection. — Du prétendu quiétisme de Canfeld. — La partie réservée de son livre. — Les garants de Canfeld. — Les Moyens courts

IV. Le frontispice allégorique du livre. — Les outils de la vie active.— Spéculation intellectuelle et vie mystique. — Activité suréminente de la vie mystique. — «Annihilation» des activités inférieures. — Union foncière des deux vies. — La Passion. — «Non dimittam te». — Les disciples de Canfeld

V. Le P. Joseph et Richelieu. — Mystique in partibus infidelium. — L'Introduction à la vie spirituelle et la Règle de Canfeld. — Les aigles séraphiques. — Le «chariot triomphant». — Le P. Joseph et Bossuet. — Éloquence. — Génie allégorique du P. Joseph

VI. Le P. Joseph à l'école de saint Ignace. — Modifications apportées à la tradition franciscaine. — La méthode. — De Manrèse au mont Alverne. — L'oraison du P. Joseph et le jeu des facultés intellectuelles. — La crèche et le berceau de Moyse. — Préludes à l'union mystique. — La mystique proposée aux commençants. — «Toutes les clefs ensemble». — «L'étroite férule de la vie active». — Le P. Joseph et les ennemis de la mystique. — Importance particulière de son témoignage. — Le P. Joseph et François de Sales. — L'union mystique. — Quiétude conquérante du P. Joseph. — «Ô bras plus étendus que tous les cieux!»

VII. Le secret du P. Joseph. — L'agent de Richelieu a‑t‑il pu rester le disciple de Canfeld? — Fondation du Calvaire. — Généalogie de deux clans mystiques, les Longueville et les Gondi. — Le Calvaire et la «modernisation» de l'ordre bénédictin. — Saint François et saint Benoît. — Dévouement du P. Joseph aux Filles du Calvaire. — Ce qu'il a écrit pour elles. — Tristesse, désenchantement de certains de ces écrits. — Les chrétiens et les Turcs. — Encore les aigles séraphiques

 

chapitre IV

MADAME ACARIE ET LE CARMEL

 

§ 1. — Madame Acarie.

I. Fluctuations de la gloire des saints. — Difficultés du sujet. — Impossibilité de peindre Mme Acarie. — Son biographe. — Mérites du Dr Duval. — Naissance et éducation de Barbe Avrillot. — Son mariage. — Pierre Acarie. — Premières extases. — Benoît de Canfeld. — Les indiscrétions de Pierre Acarie

II. L'Hôtel Acarie. — La Ligue. — Exil de Pierre Acarie. — Apprentissage de Mme Acarie dans les affaires. — Mme Acarie éducatrice

III La charité et les œuvres. — Les dix mille conversions. — Henri IV. — Les ursulines

IV. «Divina patiens». — Fréquence de ses extases. — Mission et action mystique. — Sa discrétion absolue en ces matières. — Elle n'écrira jamais. — Mme Acarie et François de Sales. — Initiation mystique d'André Duval. — Clairvoyance et autorité spirituelle. — «Liaison» avec Marillac. — Réforme de Montmartre. — Essais de congrégations religieuses. — La congrégation de Sainte‑Geneviève. — Pierre Acarie et «la jolie troyenne». — Choix et formation des futures carmélites. — Importance de Mme Acarie dans l'histoire mystique du xviie siècle

§ 2. — Jean de Quintanadoine de Brétigny et les origines du Carmel français.

I. De l'intérêt particulier qui s'attache à Quintanadoine. — Que Bérulle n'a pas eu dans la fondation du Carmel le rôle prépondérant que certains lui prêtent. — Origine des Quintanadoine. — Jean à Séville, à Rouen. — Second séjour en Espagne (1582‑1586). — Découverte du Carmel. — L'esclave du Carmel. — Le Congo. — Jean projette d'établir le Carmel en France

II. Projets de mariage. — Ministère apostolique. — Les petits écrits spirituels de Quintanadoine. — Dialogues mystiques. — Jean de Quintanadoine et Blaise Pascal. — Les fiançailles. — Troisième séjour en Espagne (1592‑ 1594). — Opposition des carmes. — Retour en France et traduction de la vie de sainte Thérèse. — Influence de ce livre

III. Mme Acarie et sainte Thérèse. — Réunion chez les chartreux. — La fondation est décidée. — La princesse de Longueville. — Le prieuré de Notre‑Dame des Champs. — Marillac. — Bulle de Clément VIII

IV. Les carmélites et les carmes déchaussés. — Des supérieurs canoniques des couvents de femmes et des limites de leur influence. — Raisons qui ont amené les carmes à s'opposer à la fondation. — Le grand voyage d'Espagne (1603‑1604). — Mme Jourdain. — Le retard à Nantes et la défection de René Gauthier. — Les Françaises à Valladolid et la Mère Casilde. — Départ de Bérulle pour l'Espagne. — Anne de Jésus et Anne de Saint‑Barthélemy. — Victoire des Français

V. Le retour. — Les deux carmes du cortège. — La Bidassoa. — Miracles. — Les Espagnoles s'offrent en vain au martyre. — Arrivée à Paris. — Saint‑Denis. — Inauguration du carmel du faubourg Saint-Jacques

VI. Les premières carmélites françaises. — Ce qui manquait encore à leur formation. — Gouvernement d'Anne de Jésus. — Initiation mystique. — Anne de Jésus et le quiétisme. — Prompte diffusion de l'Ordre. — Fondation de Dijon. — Anne de Jésus, Marie d'Hannivel et la baronne de Chantal

VII. Que soit Quintanadoine, soit les supérieurs canoniques de l'Ordre ne sont ici que de second plan. — Rôle de Bérulle. — M. Gallemant et M. Duval. — Les carmélites ont moins reçu de leurs supérieurs qu'elles ne leur ont donné. — Détresse intérieure de Quintanadoine. — Départ d'Anne de Jésus et de quatre espagnoles pour la Flandre. — Leur œuvre était faite. — Prophétie de Mme Acarie. — Quintanadoine et les fondations en Flandre. — Vivacités d'Anne de Jésus. — Carmels de Rouen et de Beaune. — Encore le Congo. — Derniers jours de Quintanadoine

§ 3. — Madeleine de Saint‑Joseph et les deux carmels de Paris.

I. Rencontre de Bérulle et de Mlle de Fontaines‑Maran. — L'entretien de sept heures. — Madeleine de Saint‑Joseph et les destinées du Carmel français. — Les reines et leur suite. — L'apostolat des carmélites. — Séduction particulière du Carmel. — Richelieu et le siège de la Rochelle

II. «La vie de Sœur Catherine de Jésus». — Mérites singuliers de ce livre. — «Le grand des grands», et l'apothéose de la «petitesse». — Vocation de Catherine de Jésus. — Étapes de son ascension mystique. — Dépossession de soi‑même. — Les tentations. — Suprême décence. — Correspondance de Catherine de Jésus avec Bérulle

III. Originalité de Marguerite Acarie. — Aucune auréole. — «Une manière d'agir extrêmement libre». — La carmélite idéale. — L'hôtel Acarie. — Sainteté précoce. — Indépendance. — Marguerite, Quintanadoine et Bérulle. — «Simplifiez votre esprit.» — Le Maître intérieur et les directeurs. — La mort de Bérulle. — Les écrits de Marguerite du Saint‑Sacrement. — «Ne vous redressez point tant.» — Encore le siège de la Rochelle. — Illusion probable de Bérulle. — Lettres de Marguerite pendant le siège. — Philippe-Emmanuel de Gondi. — Prophéties. — Mme de Chantal au parloir de la rue Chapon. — Congé donné aux deux reines. — Les coliques du Miserere. — «Sans mines, sans façons, sans grimaces.» — Les primaires de la mystique et le charme du Carmel

 

Chapitre V

JEAN DE SAINT‑SAMSON

 

I. Les carmes de la place Maubert. — Mathieu Pinault. — L'organiste aveugle. — Jean du Moulin et Mathieu Pinault en route pour Dol. — Enfance et jeunesse de Jean du Moulin. — Ses progrès dans la musique. — Sa retraite. — Jean de Saint‑Samson novice. — La peste de 1607. — Décadence du couvent de Dol

II. Philippe Thibaut. — Projets de réforme. — L'état‑major des spirituels parisiens et l'Union sacrée. — Réforme des carmes de la province de Touraine. — Le prophète Élie et saint Ignace. — Esprit des constitutions nouvelles. — La réforme et la modernisation des anciens Ordres. — Jean de Saint‑Samson et la réforme des carmes. — Prestige. — Épreuves

III. Formation mystique de Jean. — Il a grandi seul. — Enquêtes sur ses «états». — Spiritum nolite extinguere. — Les œuvres de Jean et leur éditeur. — Pourquoi Jean de Saint‑Samson paraît plus obscur que d'autres mystiques. — «Par‑dessus toute espèce sensible». — Le noble «brouillard». — «De la consommation du sujet en son objet». — Ni panthéisme, ni quiétisme. — La «guerre d'amour». — La plus haute extase

IV. Les disciples de Jean de Saint‑Samson. — Dominique de Saint‑Albert. — La «vraie théologie» et celle qu'apprennent les livres. — Léon de Saint‑Jean. — Son importance. — Sa propagande mystique. — «Les divins écrits de saint Denis» . — Tout chrétien «obligé» à l'étude et à la pratique de la théologie mystique. — L'obscurité de saint Denis et celle de saint Paul. — Réponse aux anti‑mystiques

 

CHAPITRE VI

LES GRANDES ABBESSES

 

§ 1. — La Réforme.

I. Le grand nombre des Abbesses réformatrices. — Les «Éloges» de la Mère de Blémur. — Jacqueline de Blémur et Madeleine de Chaugy. — J. de Blémur, son talent, ses vues sur la mystique. — Décadence des abbayes bénédictines. — La Déserte de Lyon. — Abus réels mais que les historiens de la réforme exagèrent peut‑être. — Causes, caractères et limites de ces abus. — Les jeunes Abbesses et Henri IV. — Ruches endormies, mais vivantes. — Florence de Werquignœul et les adieux de l'ancien régime au nouveau

II. Les Abbesses réformatrices. — Leur extrême jeunesse. — Genèse de l'idée de réforme. — Claude de Choiseul et le passage des carmélites. — Abbesses de transition. — La réforme plus facile qu'on ne le croit. — Prestige des réformatrices. — Leur science. — Leur naissance. — Leur «grand air». — Leur beauté; «la belle écossaise»

III. Les inspirateurs et les directeurs de la réforme. — Que tout le pays collabore à ce mouvement. — Influence des Ordres nouveaux

IV. Le retour à l'observance accepté d'enthousiasme, en plus d'un monastère. — Françoise de Foix et la réforme de Saintes. — La part du feu. — La réforme et les réformatrices, jugées du point de vue des «anciennes». — Tracasseries inutiles: Anne d'Aligre et le cahier des menus. — Quelques mégères de la vieille garde. — L'opposition des familles. — Une autre «journée du guichet», et plus belle. — Facilité relative pour la clôture; difficultés pour le retour à l'ancien habit. — La communauté. — Madeleine de Sourdis à Bordeaux. — Blanc contre noir

V. La réforme dans la réforme. — Introduction d'un esprit nouveau. — Influence prépondérante des jésuites. — Diffusion de leurs méthodes spirituelles dans les abbayes bénédictines. — Méditation; retraites. — Laurence de Budos à récole de saint Ignace

§ 2. — Marie de Beauvillier et les mystiques de Montmartre.

I. Marie de Beauvillier louée, de son vivant, à l'égal des plus grandes saintes. — Que, malgré la grandeur de son œuvre, tant et de tels éloges surprennent un peu l'historien. — Une famille de mystiques. — Débuts de Marie de Beauvillier. — L'Abbesse de Beaumont‑les‑Tours. — On donne à Marie l'abbaye de Montmartre. — Colère de l'Abbesse de Beaumont. — La légende scandaleuse de Montmartre. — Ignorabimus.La petite armée des réformatrices. — Marie Alvequin. — Benoît de Canfeld. — Ange de Joyeuse et les autres auxiliaires de la réforme. — Plein et éclatant succès. — Apothéose de Marie de Beauvillier

II. L'abbaye de Montmartre, à cette époque, centre, mais non pas école de mysticisme. — Marie Alvequin et les Augustines Pénitentes. — Dons surnaturels et prestige. — Vénérée du tout‑Paris spirituel. — Les images. — Marie Granger. — Humiliations et détresses. — Les deux côtes soulevées. — Indiscrétion de reine. — Ravissements. — Le Sacré‑Cœur. — Jacqueline de Blémur et la vie mystique. — Geneviève Granger. — Dépouillement spirituel. — La Mère Granger et son élève, Madame Guyon

III. Charlotte Le Sergent. — La cime de l'âme. — Le charbonnier à Saint‑Jean‑en-Grève. — «Géhennes» de l'examen particulier. — La Mère de Blémur et les jésuites. — Désir du Carmel. — La grâce et la méthode. — Aurore mystique. — La «campagne lumineuse» et les templa serena. — Le rideau tiré. — La persécution. — «Frayeur de l'état passif». — Élèves de Charlotte. — Ses lettres. — M. de Bernières. — Catherine de Bar

§ 3. — Marguerite d'Arbouze.

I. Marie de Beauvillier et Marguerite. — L'Abbesse idéale. — Son biographe Ferraige. — Caractère du livre de Ferraige; rapprochements constants entre Marguerite et les bénédictines médiévales. — Ces rapprochements voulus et réalisés par la sainte elle‑même. — Culte de la tradition bénédictine. — La bibliothèque de Marguerite. — Extrême réserve sur la vie mystique. — Le P. Binet. — Les couvents «où les directeurs abondent». — Les trois hommes dans Ferraige. — Ferraige et Claude Fleury. — Simplicité essentielle de notre prose

II. Origine et enfance de Marguerite. — De Saint‑Pierre de Lyon à Montmartre. — La Ville‑l'Évêque. — Jeune prestige de Marguerite. — Bataille de reines. — Marie de Beauvillier sera vaincue. — Factieuse. — En route pour le Val‑de‑Grâce. — Réforme tambour battant. — Transfert de l'abbaye au faubourg Saint‑Jacques

III. Amitié d'Anne d'Autriche. — Les deux jours de la Reine. — Les ardélions. — L'état‑major du mysticisme parisien et le parloir du Val-de‑Grâce. — Le grand directeur. — Marguerite, le P. Binet et les jésuites. — «Esprit œcuménique». — Omniscience. — «Douce envers elle‑même»

IV. Démission de Marguerite. — Elle supprime et l'inamovibilité et la quasi‑hérédité de la crosse abbatiale. — Fondation de la Charité‑sur‑Loire. — Les mystiques en voyage. — Les larmes du départ. — Le cortège. — Les adieux de M. Fiant. — «La dévotion de ce voyage». — Conférences mystiques. — Meliora sunt ubera tua vino. — «Le divin voyage». — Les fleurs dans le carrosse. — L'«Époux blanc et rouge» et «la marguerite». — Les derniers mois. — Les dévotions nouvelles. — Dernier voyage. — Agonie de Ferraige; «Il faut que je la voie une autre fois mourir». — «Comme jadis… Catherine de Sienne qui… mourut d'amour». — L'entêtement de Dom Mauvielle. — «Odor Margaritæ». — Marie de Burges. — Anne d'Autriche, Richelieu et le Val‑de‑Grâce. — «La martyre de la reine». — Le dôme. — Fin de l'histoire du Val‑de‑Grâce

 

CHAPITRE VII

FRANÇOIS DE SALES ET JEANNE DE CHANTAL

 

I. De l'Introduction à la vie dévote au Traité de l'Amour de Dieu. Importance capitale de l'intervention de François de Sales. — Sainte Chantal. — L'épanouissement mystique des deux saints n'est qu'une seule et même histoire. — Premiers pas de Mme de Chantal sur les voies mystiques (de l'hiver de 1601 au printemps de 1604). — Vie religieuse de la baronne avant la mort de M. de Chantal. — Mort tragique du baron. — Scrupules et détresse spirituelle. — Attente d'un directeur. — Les vœux imprudents

II. Premières directions de François de Sales (du printemps de 1604 à 1606). — La rencontre. — Première confession. — Hésitations de François de Sales. — Il consent à diriger la baronne. — Caractères de cette direction. — «Tout par amour et rien par force». — Lenteur et effacement. — Progrès mystique de Mme de Chantal et tâtonnements de François de Sales

III. La direction de sainte Thérèse (de 1606 à 1610). — La baronne et les carmélites de Dijon. — Leçons d'Anne de Jésus et de Marie de la Trinité. — Nouvelles hésitations de François de Sales. — Sa propre initiation mystique

IV. La Visitation. — François de Sales déclare ses projets à la baronne (1607). — La scène des adieux (1610). — Transformation insensible de la Visitation. — Progrès mystique des deux saints. — Les conférences d'Annecy et le Traité de l'Amour de Dieu. — L'oraison des visitandines

V. Le Traité de l'Amour de Dieu et son importance historique. — Que c'est là un ouvrage proprement mystique et qui néanmoins s'adresse à tous. — Originalité, mais extrême prudence du Traité. — Son succès. — Adhésion unanime des spirituels. — La vague mystique qui entraîne tout. — Fin de la première période

Appendice. Notes sur la mystique

A. — L'expérience mystique

B. — Visions et révélations

C. — Les à‑côté de la vie mystique

D. — La connaissance mystique

E. — Le Pur Amour

F. — Le quiétisme

G. — La vie mystique

 

Annexe

L'ÉCHELLE MYSTIQUE

(inédit)

§ i. — Des états mystiques naturels et profanes. Héroïsme et poésie

§ ii. — De la dévotion ou des formes élémentaires et communes du mysticisme chrétien

§ iii. — Le mysticisme proprement dit : l'extase

A. — Définition

B. — Visions et révélations

C. — Les à-côté de la vie mystique

D. — Le contenu doctrinal de l'expérience mystique et la littérature mystique

E. — Le Pur Amour

F. — L'envers de l'extase

G. — Le quiétisme

H. — La vie mystique

François Marxer, L'École française : la théologie entre éblouissement théocentrique et faille christologique

L'École française ou le bonheur des règlements de compte

L'«École française» : objet d'histoire ou lieu de mémoire?

Heurs et malheurs du christocentrisme

Théocentrisme vs anthropocentrisme

Le radicalisme condrénien

 

TOME III

L'École Française

La conquête mystique*

 

PREMIÈRE PARTIE

PIERRE DE BÉRULLE

 

CHAPITRE PREMIER

DE L'HUMANISME CHRÉTIEN À L'HUMANISME DÉVOT

 

I. L'école française. — Véritable école; unanimité de tous ses maîtres. — Pourquoi française? — École de vie intérieure. — Exceptionnelle grandeur de Bérulle. — Bossuet, François de Sales, Madeleine de Saint‑Joseph. — Il ne s'impose pas à première vue. — Raisons qui invitent plutôt à lui résister. — «L'oubli et le mépris auquel il a été après sa mort»

II. Gravité précoce. — Petit garçon et vieux docteur. — La conversion de Mlle de Raconis. — Zèle et gaucherie. — L'entêtement des hommes doux. — Autodidactisme de Bérulle. — Mlle Acarie. — Bérulle et les jésuites. — La retraite de 1600. — Sera‑t‑il jésuite? — «Un parfait oubli de moi‑même et de tous états.» — Enchaîné à Dieu seul. — L'esprit des conseils, plutôt que la voie des conseils. — «Parce que la nature est de Dieu, nous la laisserons sans la ruiner.» — Bérulle et l'humanisme dévot.

 

CHAPITRE II

LA DOCTRINE DE PIERRE DE BÉRULLE ET DE L'ÉCOLE FRANÇAISE

 

I. — Les principes

A.Le théocentrisme. — Religio restaurata. Bérulle et Copernic. — La Révolution théocentrique. — Que, pendant longtemps, le point de vue anthropocentrique avait dominé. — Dieu pour nous. — Saint Augustin, saint François, et les Frères de la Vie commune. —Théocentrisme informulé du moyen âge. — «Il faut premièrement regarder Dieu, et non pas soi‑même.» — Quærite primum. — Bérulle a «renouvelé en l'Église… l'esprit de religion». — Bourgoing et Amelote. — «Il n'est rien de plus rare que la vertu de religion.» — «La civilité de la maison de Dieu.» — L'Oratoire et la vertu de religion. — Religion, respect, awe, mais non pas terreur. — «Le Dieu des chrétiens est grand.» — Un sublime nouveau. — Bérulle et Gibieuf. — «Un souci constant d'exalter Dieu.» — La «mission» de Bérulle en Angleterre, la «mission» de l'Homme‑Dieu, et la génération éternelle du Verbe. — Prestige de l'école française

B.Le Verbe incarné. «La principale application de la religion chrétienne ne va pas à la Trinité, mais à l'Incarnation.» — Bérulle envoyé «pour montrer Jésus-Christ au doigt», et renouveler la dévotion au Verbe incarné. — «Le gros du christianisme… refroidi dans l'ancienne dévotion envers Jésus-Christ.» — Continuellement «occupé de Jésus‑Christ». — Don particulier de «lier» les âmes à Jésus‑Christ. — Le Bienheureux Jean Eudes et Bérulle

§ 1. Verbum caro factum est. — Jésus‑Christ «lui‑même, considéré en son être divinement humain». — Réalisation intense et constante du mystère de l'Incarnation. — Les mystères «passagers», et le mystère perpétuel. — Le «divin composé». — Vie divine et vie humaine du Verbe. — Bérulle n'est pas moins occupé «de la vie terrestre de Jésus» que du «Christ céleste». — Plus disciple de saint Jean que de saint Paul. — Bérulle et la dévotion médiévale. — «Attentif même aux moindres circonstances» des Synoptiques. — Bérulle et les Exercices de saint Ignace. — Composition du lieu; Application des sens. — Bérulle et le Pseudo‑Bonaventure. — Tendresse et gravité. — Bérulle et Lacordaire

§ 2. Le parfait adorateur. — L'Oratoire n'a pas le monopole de la dévotion au Verbe incarné, mais les autres écoles voient surtout le Christ en fonction des hommes, Bérulle en fonction de Dieu. — Les Exercices et la considération du «profit spirituel». — Le Christ «objet et moyen suprême de la religion». — «Grand sacrement de piété.» — «L'Adorateur infini»

§ 3. Les «États» et l' «Intérieur» du Verbe incarné. —‑ Bérulle et le vocabulaire de la dévotion. — Sens nouveaux donnés aux mots ordinaires. — Actions, États, et excellence particulière des États. — Les États et le «fond» des mystères. — Le Christ adorant par état. — Dévotion aux commencements de Jésus. — Le mois de mars. — Les prétendues abstractions de Bérulle. — Les participes présents multipliés et déclinés. — Permanence des mystères, même passagers; « l'état… est toujours présent.» — «L'état inférieur du mystère extérieur.» — La «navrure d'éternité». — Bérulle et la dévotion au Sacré‑Cœur. — Les «états» de l'homme. — Simplification de l'ascèse traditionnelle. — Chaque fidèle s'appropriant certains états de Jésus

§ 4. Christus totus. — «Tous ses jours et tous ses moments sont adorables.» — La dévotion bérullienne a pour objet tout le connu et tout l'inconnu de l'être et de l'histoire du Christ. — Il faisait «comme l'anatomie» de tous les mystères. — «La Fête de Jésus‑Christ.» — Seule fête qui honore tout le «composé adorable de l'Homme‑Dieu». — Esprit liturgique de l'école française

§ 5. Vivo ego, jam non ego, vivit vero in me christus. — La théologie de saint Jean et de saint Paul sur la vie du Christ en nous. — Jésus «capacité divine des âmes». — Nous‑mêmes, «capacité de Dieu». — Jésus «accomplissement de notre être». — Imperfection foncière et quasi‑néant de notre être; «vide qui a besoin d'être rempli». — «La substance de notre être… convertie en une relation pure vers» Dieu. — Mystère de mort et de vie ; désappropriation et anéantissement du moi. — «Ne nous regardons pas nous‑mêmes… car nous sommes morts. » — Prémisses mystiques du bérullisme

§ 6. Jésus en Marie. — Jamais on n'avait lié les âmes à la Vierge «avec un sentiment plus profond de ses droits, fondé sur une conception plus haute de sa dignité». — Élévation sur «l'état de la Très Sainte Vierge avant l'Annonciation». — Les ascensions de la Vierge. — L'Annonciation. — Adieux à l'archange Gabriel, à la dévotion médiévale. — L'état et le nouvel être de la Vierge. — Indissolublement unie aux états du Verbe. — «Pure capacité de Jésus, remplie de Jésus.» — «Parlant de vous, Marie, nous parlons de Jésus.»

§ 7. JÉsus dans les saints. — Honorer les saints «comme une portion» de Jésus. — Dévotion théocentrique. — Ils n'existent pour nous que dans la mesure où ils restent «liés» à la personne du Verbe. — Et liés à lui par ce qu'ils ont de plus personnel. — Élévation de Bérulle «vers sainte Madeleine». — Madeleine et l'ordre de l'amour. — Le P. Coton en consultation. — L'inaliénable «principauté» de Madeleine. — Le banquet chez le pharisien. — Le Calvaire. — Résurrection. — Madeleine «la première» en tout. — Style de Bérulle.

II. — La pratique

L'école de saint Ignace et celle de Bérulle, comparées au point de vue de la méthode. — Que Bérulle, à proprement parler, ne nous propose aucune méthode

A. — Élévation ou adoration lyrique.

Les deux éléments de l'adoration; la part de l'intelligence et celle de la volonté. — Se soumettre «volontiers à tout ce que Dieu est». — Les calomniateurs de l'adoration bérullienne. — Que cette adoration est «un recueil des principales vertus chrétiennes». — Admiration, louange, amour, joie. — Caractère lyrique de cette religion. — Les Ô de Bérulle et de Bossuet

B. — Adhérence.

De l'adoration à l'adhérence. — «Se rendre», «se laisser»; «application», «liaison», «adhérence». — Adhérence à l'être divin en lui‑même, et aux états du Verbe incarné. — «Donnez‑vous tout à l'esprit de Jésus.» — Adhérer à l'inconnu de Jésus. — Cette adhérence, programme complet de vie chrétienne: tirant «l'âme hors de soi-même», elle «l'établit et l'ente en Jésus‑Christ». — Originalité de ces directions; l'ascèse traditionnelle et la bérullienne. — Critique de l'ascèse traditionnelle et des moralistes chrétiens. — Rechercher la vertu «selon l'esprit des philosophes païens». — Rodriguez et Jean Eudes. — Aimer la vertu «plus par relation et hommage à Jésus-Christ que par désir de la même vertu en soi‑même».Vertus «chrétiennes», et vertus «morales». — Professeurs d'énergie, et professeurs d'abaissement. — «Plus on mêle de soi, moins on est avancé dans les œuvres de la grâce.» — Caractère pratique de l'ascèse bérullienne: actes qu'elle commande. a. Désir et demande. — «Ouvrons la bouche de notre cœur.» — J. Eudes et la formule‑type de cette demande. — b. Ratification. — Vouloir ce que le Verbe a voulu pour nous, et à notre place. — «Vous avez fait un très saint usage de mon être.» — g. Exposition. — S'exposer aux «influences», aux «impressions» de l'esprit de Dieu. — Galvanoplastie spirituelle. — «Les vertus divines sont opératives.» — Les mystères et les états de Jésus envoient d'eux‑mêmes leurs rayons. — Les vertus du Christ imprimées en nous, «quoique nous ne nous efforcions point d'en produire des actes». — d. L'état de servitude. — L'ascèse bérullienne exige des actes, mais de moins en moins nombreux; elle tend à établir des états. — Que ces états sont actifs, mais d'une activité particulière. — L'état de servitude, fin suprême de cette ascèse. — Donation parfaite de l'intime de l'âme. — Le Suscipe de saint Ignace. — Que nulle ascèse n'a de prise sur le fond de l'être, et par suite ne peut nous fixer dans un état quelconque. — Orientation nettement mystique de l'ascèse bérullienne. — Conclusion: Bérulle et le bérullisme

 

CHAPITRE III

L'ORATOIRE 7

 

I. La fondation de l'Oratoire, point culminant de la Contre‑réforme en France. — Renouvellement de «l'état de prêtrise». — Il ne s'agissait pas de réformer, mais de sanctifier le clergé. — Une congrégation qui, «par un état perpétuel», honorera «le souverain sacerdoce de Jésus-Christ». — Le prêtre, en tant que prêtre, voué à une perfection au moins aussi haute que le religieux. — Condren et la véritable mission de l'Oratoire. — Témoignage du P. Amelote 7

II. L'Oratoire rend «un hommage particulier» au Verbe incarné. — Il a pour mission de vivre et de répandre la doctrine spirituelle de Bérulle. — Le P. Coton et l'«Ordre qui manquait à l'Église». — Que la fin principale de l'Oratoire n'est pas «l'éducation» du clergé. — L'Oratoire et «la vertu de religion». — «Sans exception, toutes les fonctions du sacerdoce». — La sainte Vierge, l'Église, l'Écriture sainte. — Ferveur liturgique de l'Oratoire 5

III. L'esprit et les constitutions dans les Ordres religieux. — Saint Ignace et Bérulle. — Constitutions sommaires de l'Oratoire. — Netteté du type oratorien. — La distinction oratorienne. — Simplicité et sérieux. — Indépendance: le P. François de Saint‑Pé et la duchesse d'Orléans 4

IV. Les trois facteurs qui ont contribué à fixer le type oratorien. 1) Les Hautes études. — Goût pour les sciences et les belles‑lettres. — Les conciles. — Avantages et inconvénients possibles de ce développement que Bérulle n'avait pas prévu. — Leur humanisme n'a jamais été un humanisme «séparé». — Thomassin et Bouhours. 2) L'anti-jésuitisme. Qui a commencé? — Bérulle et la Compagnie de Jésus; services rendus; premières hostilités. — Ce n'est pas la spiritualité bérullienne qui explique les premières antipathies des jésuites à l'endroit de l'Oratoire. — Ils ont cru que l'Oratoire méditait leur ruine. — Le mémoire des jésuites à Richelieu contre Bérulle. — Violence des premiers conflits. — Les Paroles irréparables. — Les maladresses de Bérulle. — «Iste homo natus est ad pessima». Trop long silence; défense trop impétueuse. — Le Discours sur les grandeurs de Jésus et le branle‑bas des Approbations. — L'offensive contre les jésuites; epicureæ turbæ, avant goût des Provinciales. — La querelle éternisée dans un livre de dévotion, dans la somme officielle du bérullisme. — L'Oratoire et le jansénisme; les ennemis de nos ennemis sont nos amis. — Que le véritable esprit de l'Oratoire résiste invinciblement au jansénisme: Gibieuf, Bourgoing et Saint‑Pé. 3) La tradition bérullienne. — Dévotion particulière de l'Oratoire au Verbe incarné. — Batterel et la tradition oratorienne. — Lejeune. — Malebranche. — Quesnel. — «Nous aimions mieux Jésus‑Christ» 0

 

CHAPITRE IV

BÉRULLE ET VINCENT DE PAUL 0

 

I. Le portrait et la légende de Vincent de Paul. — Son prétendu «gros bon sens». — Aussi complexe, aussi peu «simple» que Fénelon. — Le paysan landais. — «Port grave, front majestueux». — La mimique du paysan. — Extrême délicatesse. — «Entrer dons les sentiments» du prochain. — Vains essais de rusticité. — Son prestige sur les femmes; la Grecque de Tunis; Mme de Gondi; Mlle Le Gras; Mme de Chantal. — Impressionnabilité presque féminine. — «M. Bourdaise, êtes‑vous encore en vie?» — Souplesse de sensibilité: les prières de la messe. — Haute raison; «profondeur de son esprit». — Magnanimité: Vincent de Paul et les protestants: «Qu'on ne défie point les ministres en chaire.» — Les censures. — Réalisation des maximes évangéliques. — Pas moins d'esprit que de cœur. — Le mépris constant et naturel de soi. — La prophétie de saint Vincent Ferrier. — «Il disait trop de mal de lui‑même.» — Les jansénistes aidant, on a fini par le croire sur parole et par le prendre pour un «esprit borné». — Ses Œuvres complètes 0

II. La conversion de Vincent de Paul. — Ce n'est pas sa charité qui a fait de lui un saint, mais sa sainteté qui l'a rendu vraiment charitable. — Détachement quasi naturel des choses d'ici‑bas. — Converti par l'exemple des mystiques bérulliens. — Vincent de Paul et François de Sales. — Le mimétisme chez le paysan landais et la conversion de Vincent de Paul. — Il essaiera de reproduire en lui‑même M. de Bérulle. — «Un des plus saints hommes que j'ai connus.» — Théocentrisme. — Pessimisme augustinien. — «Tous les états» du Verbe incarné. — « L'état inconnu du Fils de Dieu» et «sa modération dans l'agir». — «Honorer l'état de son divin intérieur.» — Vincent de Paul et le lexique bérullien. — Vincent de Paul et la providence particulière de Dieu. — Les œuvres de Dieu «se font d'elles‑mêmes». — Si l'on manque de vie intérieure «on manque de tout». — Vincent de Paul et les mystiques de l'école française 5

 

CHAPITRE V

JÉSUITES BÉRULLIENS 3

 

I. Le Père J.‑B. Saint‑Jure et son autorité dans la Compagnie. — Humaniste dévot. — «Connais qui tu es… Igneus est ollis…» — Les lectures de Saint‑Jure. — «Le Fils d'Aben Zomar est encore dehors.» — Sébastianus Brant et sa «Narragonia». — Ralliement de Saint‑Jure au bérullisme. — Gaston de Renty. — Axiomes bérulliens. — «Singulièrement», saint Jean et saint Paul. — La raison n'est pas la règle de nos actions, en tant que nous sommes chrétiens. — Saint Ignace et Saint‑Jure sur «l'indifférence». — L'exercice de l'union 3

II. Le testament spirituel de Saint‑Jure, — Filioli quos iterum parturio. — Le Concile de Trente, Bérulle et Saint‑Jure. — L'esprit et le corps des mystères. — «L'air spirituel et divin qui est Jésus‑Christ.» — Originalité de Saint‑Jure 1

 

 

DeuxIÈmE PARTIE

CHARLES DE CONDREN

 

CHAPITRE PREMIER

CHARLES DE CONDREN 9

 

I. Le disciple préféré et le biographe de Condren. — Doctrine littéraire d'Amelote; le nombre oratoire. — Amelote et la biographie psychologique; «l'âme» et «le corps» d'une vie. — «L'intérieur» et la «source même». — Ferveur communicative d'Amelote. — «L'incroyable beauté» de son héros. — Témoignages concordants des contemporains: sainte J. de Chantal, Rapin, Bérulle, Richelieu. — «Jamais la religion chrétienne ne parut si belle que dans sa bouche.» — «La plus grande lumière sans contredit de notre siècle et même de plusieurs autres.» — Témoignages de M. Olier 0

II. La famille de Condren. — Sa formation toute militaire. — Rudesse apparente. — Le portrait criblé de flèches. — Le collège d'Harcourt. — La période critique, 1608‑1611: prêtre ou soldat? — Indécision apparente. — L'attente paisible du signal divin. — One stop enough for me. — La croisade contre les Turcs. — L'étude: Condren et Cicéron. — Sciences militaires. — La chasse et l'oraison. — Années de lumière. — La vocation au sacerdoce 7

III. Gamache et Duval. — Argumentations scolastiques. — Curriculum universitaire. — Condren et les possédés. — «Le diable méprisé». — «Tais‑toi et sors.» — Un exorciste de cinq ans. — Nouvelle période d'attente. — Condren essayant sur lui‑même la «grâce» des différents Ordres. — «Jamais en peine sur sa condition». — Brusque décision; pourquoi l'Oratoire? 8

IV. Curriculum vitae depuis l'entrée à l'Oratoire. — Condren et Saint‑Cyran. — Amitié de quinze ans et très confiante des deux côtés. — Note critique sur leurs relations. — Derniers sentiments de Condren à l'endroit de Saint‑Cyran. — Pourquoi n'a‑t‑il rien fait pour démasquer le «novateur»? — L'étrange inactivité de Condren 6

V. Goût du siècle de Louis XIV pour les «démonstrations» de piété. — Grimaces dévotes du jeune abbé de Gondrin. — Modération très originale de Condren. — Prestige réel, mais seulement aux yeux de l'élite. — «Pendant sa vie, il n'a jamais passé pour rien.» — Le franc parler de Condren et ses boutades. — Les «délices» de sa conversation: «En la parole… consistait la force de ses talents.» — De l'enjouement au sublime. — Image très peu ressemblante que l'on se ferait de Condren si l'on ne le jugeait que d'après ses écrits 2

 

CHAPITRE II

VERS LE BÉRULLISME 8

 

Étonnante précocité. — Le ravissement présenté par Amelote. — Invraisemblances apparentes et vraisemblances divines. — «L'âge de douze ans». — Nécessité d'une critique plus rigoureuse. — Quatre phases principales dans le développement de Condren 8

§ 1. Le ravissement. — a) Prélude: Réalisation extrêmement vive de la vérité fondamentale: Dieu est tout, je ne suis rien. — b) L'éblouissement: De l'adoration au sacrifice. — L'adoration-cantique de Bérulle et l'adoration‑sacrifice de Condren. — Sources lointaines de cette doctrine dans l'intelligence de Condren. — c) Le crépuscule: Pauvreté du sacrifice humain. — De l'autel des holocaustes à l'autel du calvaire 1

§ 2. Les années de solitude. — Les leçons du ravissement et le travail constant de ces années. — «L'intérieur du Fils de Dieu lui fut ouvert.» — Orientation de plus en plus nette vers le bérullisme 3

§ 3. La sorbonne. — Notes intimes de Condren, analysées parle P. Amelote. — Théocentrisme encore imparfait. — Tous les éléments du bérullisme, mais non pas encore la synthèse 4

§ 4. Les leçons de Bérulle. — Quelques mots auront suffi. — Le maître et le disciple. — Dans quel sens on pourrait soutenir que Condren fut plus bérullien que Bérulle. — Pleine maîtrise de Condren 7

 

CHAPITRE III

LA DOCTRINE 9

 

§ 1. — Les principes

I. «Cet esprit de pureté qui ne peut souffrir que rien vive que Dieu». — Le devoir essentiel de toute créature; «que Dieu soit en nous comme Dieu plus que nous‑mêmes.» — Que la doctrine de Condren repose sur le fait de la création, non, comme la doctrine de Port‑Royal, sur le dogme de la chute. — Le sacrifice dans la religion naturelle. — Les sacrifices païens et ceux de l'ancienne loi: «Dieu entrant en communion des sacrifices» 0

II. Le sacrifice d'un néant n'est lui aussi que néant. — L'Incarnation seule a rendu possible un sacrifice digne de Dieu. — Felix culpa. — L'unique victime ; l'unique adorateur, devenu notre sacrifice, notre adoration. — Adhérence au sacrifice du Christ. — Bérulle et Condren 3

III. L'anéantissement du moi par adhérence à l'anéantissement du Christ. — Il est en nous tout ce que nous avons de Dieu. — Consignes de mort: se démettre de soi‑même; perdre «tout désir de vivre et d'être». — Par là même, en même temps, et du même coup, s'offrir à l'appropriation divine. — «Que l'âme ne doit rien être, afin que Jésus-Christ soit tout en elle.» — «En s'appliquant aux hommes, il les anéantit dans son application même.» — «Seul vivant et opérant dessous l'écorce de la vieille créature» 7

IV. «Il ne s'agit ni de sentir cela, ni de le comprendre.» — «Prendre la foi… pour la règle de notre vie». — Luther, Calvin et l'obsession d'expérimenter notre régénération. — «Aucune expérience intérieure». — On ne «ressent» pas le divin: «nous ne ressentons que ce qui est nôtre». — Anti‑intellectualisme foncier de cette doctrine; «ne changeons pas» «la volonté en esprit». — Rôle de l'intelligence. — Des concepts aux réalités. — «Il adorait Dieu et ses mystères, comme ils étaient en eux‑mêmes, et non pas comme il les comprenait.» — Impureté foncière de tous les concepts que nous nous formons des choses divines. — «Entrer, en Dieu, dans les choses proposées.» — «Par-dessus ma connaissance et mon affection.» — «J'adore tout ce que Dieu est; je me retire dans l'être inconnu de Dieu.» — Nul quiétisme, nul dilettantisme dans cette doctrine, mais au contraire, un volontarisme aussi décidé que celui de saint Ignace. — «Il faut que cet état soit libre en vous.» 2

§ 2. — Applications

A. Formules d'élévation et d'adhérence. — «Prenez de l'eau bénite». — «L'automate»: «Il faut prononcer de parole les choses, quand notre esprit les refuse par impuissance». «Loquere ut velis». — Formule du vœu de servitude 9

B. L'examen de conscience. — Saint Ignace et l'examen particulier. — Grâce et nature résistant nécessairement chez Condren aux méthodes ignatiennes. — «Ce César et ce Pompée.» — Objet premier de l'ascèse de Condren. — Via, veritas, vita. — S'examiner sur «l'usage» que l'on a fait de Jésus‑Christ et de ses mystères. — Contre l'examen particulier. — Contre l'examen «de nos bonnes œuvres en particulier». — «Psychologies» différentes. — «Ne faites rien avec effort.» — « Être à Dieu, sans élection d'aucun moyen pour l'honorer.» — Fausseté des jugements que nous portons sur nous‑mêmes. — «Fuyez comme un enfer la considération de vous‑même» 1

C. Dévotion à la sainte Trinité. — Dévotion difficile d'abord à imaginer, et peu commune. — «Tout l'inconnu de Dieu». — Choix de ce mystère parce qu'il est «le plus séparé de la créature». —» Rien… du nôtre». — «Jésus‑Christ aime mieux la sainte Trinité que son Église.» 5

D. Dévotion au second avènement du Verbe. — Dévotion théocentrique. — «Adorez le Jugement… quand bien il devrait être de condamnation» pour vous. — Triomphe de l'école française au dernier jour 7

E. La communion fréquente. — Que notre «utilité spirituelle» ne doit pas être «notre première intention». — Comment nous «faisons tort» à Jésus‑Christ en ne communiant pas fréquemment 8

F. Le prêtre à l'autel. — «Nous ne saurions dire assez simplement: Hoc est corpus meum» 0

G. La direction. — Que Jésus‑Christ seul soit écouté. — «Il ne s'attribuait jamais la qualité de directeur.» — Jamais la moindre pression. — Lenteur de Condren 0

H. La mystique. — Que les défaillances des extatiques n'ont rien de céleste. — Que nous recevons toujours plus ou moins «impurement» le don de Dieu 3

I. L'anéantissement posthume, ou «de la manière de faire son testament». — «Vouloir être dans l'oubli de la mort». — «C'est mieux fait de se cacher en Dieu» 4 Conclusion. Les dernières heures de Condren 5

 

CHAPITRE IV

L'INITIATION DE JEAN-JACQUES OLIER 8

 

I. Les vrais héritiers de Condren d'après la légende sulpicienne : Condren, prévoyant la jansénisation prochaine de ses confrères, n'aurait laissé à l'Oratoire «que son corps». — Sainte «indifférence» de Condren. — Ce qu'il a pu reprocher à l'Oratoire: les «communautés» et «l'esprit de corps». — La méthode des grands initiateurs et les entretiens de Condren. — Le P. Desmares, «plein jusqu'à la gorge». — L'Oratoire héritier de Condren. — Que son héritier par excellence est M. Olier 8

II. Origines de Jean‑Jacques Olier. — François de Sales. — Étrange attitude de Mme Olier à l'endroit de Jean‑Jacques. — Étourderies de jeunesse. — Conversion. — De saint Vincent de Paul au P. de Condren 4

III. La grande crise de neurasthénie. — Les saints «ont des nerfs» comme nous, «et peuvent partant avoir des névroses». — Héroïsme de M. Olier pendant la crise. — Que celle‑ci n'a eu de soudain que son extrême violence. — Les entretiens de Condren et la névrose de M. Olier. — Qu'il ne s'agit point d'une crise morale. — Détresse purement physiologique, amenant, par une réaction naturelle, des accès de mégalomanie morbide. — Complications métaphysiques, suite des leçons de Condren. — «Vous diriez qu'il soit devenu hébété.» — «Me sentant retirer de tout moi‑même, de ce qui me faisait subsister.» — Il continue malgré tout sa vie de missionnaire. — Les tentations de désespoir: un second Judas. — «Le mépris universel… la fable de tout Paris.» — Condren lui‑même le délaisse 5

IV. Le paroxysme et les premiers symptômes de guérison. — Vox turturis. — De la contemplation éperdue de lui‑même, il passe à contempler la modestie de la sainte Vierge adolescente. — Les cloches de Chartres. — Ses compagnons ne le reconnaissent plus. — De l'horreur morbide de la superbe aux joies de l'humilité véritable. — Chef incontesté de la petite compagnie formée par Condren 4

V. Plus qu'une guérison. — Travail souterrain d'initiation pendant la crise. — Il retrouve, comprend, et s'assimile sans peine toutes les leçons de Condren. — Que la crise elle‑même l'a aidé à réaliser plus profondément la doctrine oratorienne sur la dépossession du moi. — L'Esprit de Dieu «répandu par tout moi‑même, comme s'il y tenait la place de mon âme». — L'effondrement du malade et l'anéantissement libre, joyeux, épanouissant du mystique. — La crise, lui a de même appris que les goûts sensibles ne sont pas le principal de la dévotion 7

 

CHAPITRE V

L'EXCELLENCE DE M. OLIER 2

 

I. Éminence de M. Olier comparé aux autres maîtres de l'école française. — En lui, l'on entend toute l'école. — Ses dons d'écrivain. — Il a vulgarisé le bérullisme, mais en poète. — Sa Journée chrétienne ou Le génie du bérullisme. — Les «Actes pour le saint office», et les préludes ignatiens. — «Que l'Église dilate ce que vous renfermez en vous seul — Sero te amavi. — Le rythme des élévations de M. Olier et le rythme de la prière ignatienne. — «Actes pour faire avant la conversation — «Que je ne laisse aucun reste de moi dans la compagnie — «Sur l'usage du feu — «De l'esprit de sacrifice en plusieurs occupations de la journée.» 2

II. Le catéchisme chrétien pour la vie intérieure. — Jésus‑Christ «médiateur de religion», et non pas seulement rédempteur. — La psalmodie en latin. — «Un fleuve est un chemin animé — Propagande bérullienne par l'image: M. Olier et les peintres de son temps. — Lettre sur le chant de l'Église. — Le symbolisme des orgues 1

III. Les lettres de direction. — «Que toute propriété soit éteinte — Qu'il faut renoncer à l'appropriation sensible de Dieu. — «Ce qui se mêle d'impur dans le divin — Les délices de la pure foi. — La passion du miroir. — «Dieu est le supplément de tout — Règles pour «l'extérieur du prêtre»; ni la politesse de l'honnête homme, ni les grimaces de sainteté. — À une grande dame attirée vers le jansénisme 5

IV. Le plus conscient des maîtres bérulliens. — Ses vues sur le développement de la vie intérieure et sur les origines de l'école française. — La place qu'il se fixe à lui‑même, dans l'histoire de cette école. — Première période: «état de faiblesse» avec Bérulle et Condren; apogée: avec M. Olier. — Contribution personnelle de M. Olier, au développement de l'école. § 1. la dévotion au saint‑sacrement. — Le dogme eucharistique, confirmation souveraine des principes bérulliens. — Caractère théocentrique de cette dévotion, telle que M. Olier la présente. § 2. La dévotion à l'intérieur de Marie et des saints. — Les deux volumes publiés par M. Faillon sur la Vie intérieure de la très sainte Vierge. — Interprétation bérullienne du dogme de la communion des saints. — § 3. Passage du bérullisme au mysticisme proprement dit. — Lettre sur «le centre de l'âme». — La «sainte oisiveté» — Que l'âme cherche Dieu «comme un bien qu'elle possède». — Le vrai caractère de la connaissance mystique. — Ne pas «s'amuser» aux révélations, aux prophéties. — Apparences quiétistes; M. Olier et Fénelon. — Lettre à une contemplative qui ne goûtait pas sainte Gertrude. — «Les tableaux», l'esprit d'enfance et l'union au Christ intérieur. — Contre le romanesque dans la dévotion 1

 

 

troisièmE PARTIE

L'ÉCOLE FRANÇAISE ET LES DÉVOTIONS CATHOLIQUES

 

CHAPITRE PREMIER

L'«ESPRIT D'ENFANCE» ET LA DÉVOTION DU XVIIe SIÈCLE À L'ENFANT JÉSUS 5

 

I. Difficultés que doit rencontrer l'école française — Son action sur les différentes dévotions catholiques. — Résistance de ces mêmes dévotions 6

II. Progrès de la dévotion à l'Enfant Jésus depuis les premiers siècles jusqu'à Bérulle, et originalité de la dévotion bérullienne. — «Le sens où elle conduit est fort et sévère.» — L'enfance, «l'état le plus vil de la nature humaine, après celui de la mort». — Condren et les quatre bassesses de l'enfance. — Les extravagances de Jean Garat. — Critique de la doctrine bérullienne. — Les attraits de l'enfance 8

III. L'école française et «l'esprit d'enfance». — Nisi efficiamini sicut parvuli. — Esprit d'anéantissement. — Les docteurs de l'esprit d'enfance; M. de Renty; Saint‑Jure; M. Blanlo. — «N'être plus le propriétaire de soi‑même». — Un bérullisme attendri et plus humain. — La simplicité. — Le vœu de M. de Renty. — Que pour devenir populaire, la dévotion à l'Enfant Jésus devait s'écarter quelque peu de l'austérité bérullienne 3

IV. Marguerite de Beaune et son dernier biographe. — Les maladies de Marguerite; les médecins et la prieure de Beaune. — De la Passion à l'Enfance de Jésus. — «Voici ma petite personne». — Catherine de Jésus prototype et inspiratrice de Marguerite. — Parallèle entre les deux voyantes. — Marguerite née pour l'action, l'organisation et la propagande 9

V. Premières visions de Marguerite. — Les «promesses» de l'Enfant Jésus et l'orientation nouvelle que prend la dévotion bérullienne. — La «famille du Saint Enfant Jésus», et les premiers succès de la propagande. — Marguerite, Anne d'Autriche et la naissance du Dauphin. — Nouvelle transformation de la dévotion bérullienne: la royauté de l'Enfant Jésus. — Les deux images de Beaune. — «Le Petit Roi de grâce» et les diamants de la couronne. — La dévotion populaire et le Petit Roi 5

VI. L'école française fait sienne la dévotion de Beaune et tâche d'en sauver les éléments bérulliens. — De Beaune à l'abbaye de Chancelade: le P. Jean Garat. — Tous les mystères du Verbe incarné ramenée au mystère de l'Enfance. — Diffusion de l'esprit d'enfance: de Jean Garat au marquis de Fénelon, et du marquis à M. de Cambrai 3

VII. Beaune et les autres foyers de la dévotion nouvelle. — Dom Martianay et sa cousine, Madeleine de Saint‑Sever. — Les mauristes et la vie des saints d'aujourd'hui. — Excellences de Mme Martianay, née Jeanne d'Embidonnes. — Madeleine expulsée du Carmel de Bordeaux. — Dix années d'exil. — Le retour au couvent. — Tante, prieure et bourreau. — Madeleine et la dévotion à l'Enfant Jésus. — La persécution et les enfantillages qui l'expliquent, sans l'excuser. — Une machine à rendre les oracles. — Réhabilitation et prestige de Madeleine 7

VIII. Bourgogne et Provence. — Marguerite de Beaune supplantée à Aix par Jeanne Perraud. — La Provence, un des fiefs principaux de l'école française. — Triomphe du «Petit Roi de grâce» à Aix et à Marseille. — Que Jeanne Perraud n'a pas pu ne pas connaître la dévotion de Beaune. — Mérites et défauts de Jeanne, mystique et visionnaire tout ensemble. — La grande vision de 1658 : un enfant de trois ans, et chargé des instruments de la Passion. — Genèse naturelle de cette vision: critique de la dévotion de Beaune. — L'instinct qui porte les âmes pieuses à associer aux mystères de l'Enfance les mystères de la Passion. — Jeanne et les artistes provençaux. — Triomphe de la dévotion provençale. — Progrès spirituel et nouvelle orientation de Jeanne. — Vers la dévotion au Sacré‑Cœur. — La vision de Jeanne et les visions postérieures de Marguerite‑Marie. — La «grande plaie» du côté, qui «pénètre tout l'intérieur». — Les premiers tableaux du Sacré‑Cœur. — Déjà tout l'esprit de la dévotion de Paray 4

 

CHAPITRE II

LE PÈRE EUDES ET MARIE DES VALLÉES 4

 

I. Le P. Eudes ressuscité par la critique moderne. — Sa biographie. — Ses œuvres complètes. — Le P. Eudes, premier apôtre, premier docteur de la dévotion au Sacré‑Cœur; «auteur du culte liturgique» du Sacré‑Cœur. — Léon XIII et Pie X. — Retour des eudistes contemporains à la doctrine bérullienne du P. Eudes 4

II. Moins séduisant ou moins fascinant que d'autres saints. — Rusticité ou rudesse? — Mme de Camilly. — Le mariage de «Fanfan». — Outrance, littéralisme et manque d'humour. — Une lettre de consolation. — La vraie tendresse du P. Eudes. — Adieux à une mourante. — Jean‑Jacques de Camilly et la vocation de Fanfan 0

III. L'initiation au bérullisme. — 1641, date critique dans la vie du P. Eudes; rencontre de Marie des Vallées. — Les docteurs et les parvuli. — Difficultés particulières que présente le cas de cette mystique. — Jeunesse de Marie; sa première crise. — Possession ou névrose? — «Fi de la bête à dix cornes!» — Sur le chemin de l'union mystique. — La prière du P. Coton. — Marie renonce à sa volonté propre. — Précisions inutiles et dangereuses. — Marie accepte de ne plus communier. — De l'idée fixe à l'idée force; de l'auto‑suggestion initiale à l'impossibilité absolue de communier. — Erreur des directeurs de Marie. — Le traitement et la guérison 7

IV. La différence entre vrais et faux mystiques. — Génie propre de la Sœur Marie. — Rien de banal. — «Je cherche mes frères qui sont perdus.» — La «divine Esther». — Les «jardins du Saint‑Sacrement». — Le prestige de Marie. — «Appui…, conseillère…, inspiratrice» du P. Eudes. Qu'il ne lui doit ni sa propre doctrine spirituelle, ni le dessein de ses propres fondations. — Elle a été la décision du P. Eudes. «In verbo tuo laxabo rete.» Encouragé par elle, le P. Eudes quitte l'Oratoire 7

 

CHAPITRE III

LE PÈRE EUDES ET LA DÉVOTION AU SACRÉ-CŒUR 3

 

I. Le P. Eudes écrivain et les autres maîtres de l'école française. — Style et composition médiocres. — Prédicateur plutôt qu'écrivain. — Analyse littéraire d'un de ses meilleurs chapitres. — Mérite bien supérieur de ses œuvres latines. — L'Office du divin sacerdoce: Salvete mundi sidera. — L'Office du Cœur de Jésus. — La «messe de feu». — Sa meilleure gloire est d'avoir inauguré le culte public du Sacré‑Cœur 3

II. Genèse de la dévotion eudistique au Cœur de Jésus. — Synthèse de l'école française et de l'humanisme dévot. — Bérullisme foncier du P. Eudes 0

A. De la fête bérullienne de Jésus à la fête du Cœur de Jésus. Les deux fêtes définies d'une manière identique par la Congrégation des Rites. — Jésus‑Christ fêté «en tout ce qu'il est en sa personne divine». — De la personne au cœur. — Le cœur défini par le P. Eudes. — Le Cœur‑personne et le Cœur‑amour; oscillations du P. Eudes entre ces deux conceptions. — Oscillations analogues chez les premiers représentants de l'école de Paray‑le‑Monial. — Le R. P. Bainvel et le passage du cœur à la personne. — La dévotion eudistique nécessaire à l'achèvement de la dévotion de Paray 3

B. De l'intérieur au cœur de Jésus. Le P. Bainvel, et la dévotion à «tout l'intime de Jésus». — Un jésuite bérullien, le P. Grou: «Le cœur de Jésus, c'est son intérieur.» — Un précurseur oublié de la dévotion au Sacré‑Cœur, le P. Timothée de Raynier: six chapitres sur le Sacré‑Cœur en 1662. — «L'intérieur de Jésus‑Christ dans son Cœur divin.» 1

C. De Jésus vivant en nous au Cœur de Jésus, principe de notre vie spirituelle. — Doctrine bérullienne sur la vie de Jésus en nous. — «Le cœur n'est‑il pas le principe de la vie?» 4

D. L'école française et l'école de Paray‑le‑Monial. Qu'il est impossible d'éviter Bérulle. — L'école française plus spéculative, moins «parlante à la foule». — Le théocentrisme de la dévotion eudistique: le Cœur de Jésus, «moyen suprême de la religion». — Anthropocentrisme de la dévotion de Paray: «Voilà ce Cœur qui a tant aimé les hommes.» — L'école française fait plus de place au «Cœur divin», l'école de Paray, au «Cœur de chair». — La dévotion de l'école française nous intériorise davantage. — L'école de Paray regarde surtout les actes, l'école française le foyer de l'amour divin. — Celle‑ci plus contemplative, celle‑là plus agissante. — La dévotion de l'école française orientée plus immédiatement vers la vie mystique. — Marthe et Marie. Optimam partem 5

Appendice

§ 1. Les théologiens et l'école française 1

§ 2. L'école française et l'école de saint Ignace 4

 

 

 

 

Annexe

LES SINGULARITÉS DE M. OLIER

(inédit)

 

I. Olier et Condren. — M. Olier pas toujours maître de sa plume. — Sagesse des ouvrages qu'il destinait au public; exagération morbides que l'on constate parfois dans ses Mémoires. — Qu'il est vain de rendre «l'impétuosité de l'esprit de Dieu» responsable de ces quelques excès. — «Dieu aime l'ordre». — Fautes contre les bienséances, non contre le dogme. — Notre-Seigneur «prostitué» comme l'enfant prodigue «à toutes les impuretés imaginables» 4

II. Ostentation apparente dans ce qu'il décrit de lui-même. — Simplicité des vraiment humbles. — Dernières traces de l'ancienne mégalomanie 8

III. Ses liaisons spirituelles avec un si grand nombre de mystiques. — Encore l'ancienne détresse: il se cherche des appuis, des garants, des suppléants 9

IV. Marie Rousseau et les cabarets au xviie siècle. — Les treize mille pages de ses Mémoires. — Pourquoi inédits? Pourquoi si parcimonieusement cités par les historiens de Saint-Suplice? — Ne ressemblerait-elle pas à Mme Guyon plus qu'on ne veut l'avouer? — Les premiers directeurs de Marie: le petit Père André. — «Lorsqu'une âme est dans des voies extraordinaires, il faut prendre garde de lui manifester ses états». — Le P. Ignace, carme, et «le torrent de notre Père Élie.» — De la vie mystique à l'action extérieure. — La grand mission de Marie; ces hésitations: «ce n'est point affaire de femme.» — La cabaretière de Saint-Sulpice et M. Olier à la foire Saint-Germain. — Derniers scrupules de Marie vaincus par le P. Armand. — Inquiétudes qu'elle commence à nous donner. — Visions et prophéties. — Marie et Condren 0

V. Le P. Bataille, directeur de Marie: il veut qu'elle écrive son journal spirituel. — Psychologie et dangers de cette pratique, d'après le P. Guilloré. — «Petitesse naturelle» qui rend bien des mystiques «incapables de supporter l'éclat» de leurs dons. — Qu'il y a souvent des ces écrits «plus d'onction que n'en retient le cœur dont ils sont sortis.» Omnis scribat mendax. — Réflexes vaniteux déterminés par l'ordre qu'une dévote reçoit d'écrire ses grâces. — Inventions humaines et chimériques greffées sur les communications divines. — Psychologie du directeur émerveillé par la lecture de ces écrits. — Effets désastreux de ce travail sur la mystique elle-même 8

VI. M. Olier prenant pour divines les imaginations les moins raisonnables de Marie Rousseau. — Textes désolants: «Rien de caché pour elle dans les plus grands mystères». — «Ce qu'elle a vu et écrit surpasse tout ce qui est imprimé.» — Le P. Bataille et l'ordre d'écrire ses Mémoires donné à M. Olier. — Les prophéties de Marie Rousseau: le «petit Louis», apôtre et martyr. — «Son petit-fils que j'écoute comme un oracle». — M. Olier et Marie Rousseau; Fénelon et Mme Guyon: parallélisme inéluctable des deux aventures. — Les deux mystiques: leur hystérie; leurs projets. — Triomphes identiques, promis par chacune d'elles à son directeur. — Les Michelins de Mme Guyon et les «quatre piliers» de Marie Rouseau. — Effacement relatif de Mme Guyon; apothéose de Marie. — Les deux enfants miraculeux: Louis Rousseau et Louis, duc de Bourgogne. — Pourquoi nous n'achèverons pas ce parallèle. — Ces deux «unions spirituelles» et leur souveraine innocence. — «Ni sentiment, ni sensibilité quelconque; on ne voit point de corps.» — «Aucun sentiment distinct; aucune pensée particulière; une vue confuse.» — Une illusion, acceptée de bonne foi, n'est pas un obstacle au communication de la grâce. — Réalités divines: symboles humains 2

 

 

 

Volume II

 

 

Alain Cantillon, Détruire et sauver Port-Royal

 

TOME IV

L'École de Port-Royal

La Conquête mystique**

Avant-propos

 

CHAPITRE PREMIER

DU PRÉTENDU «STYLE JANSÉNISTE»

 

I. La première rencontre de Sainte‑Beuve avec Port‑Royal; les deux aspects du jansénisme. — M. Hamon préféré au grand Arnauld. — Une étude plus critique confirme cette première impression. — Déviation précoce: l'esprit d'Arnauld substitué à celui de Saint‑Cyran; le «prêtre» vaincu par le «docteur». — Cinq volumes sur six raconteront la décadence de Port‑Royal. — Enthousiasme bien naturel de Sainte‑Beuve: il ne connaissait pas d'autres chrétiens

II. Les reliures jansénistes. — Sainte‑Beuve et le style janséniste. — Théories anti‑littéraires de Saint‑Cyran. — Les stylistes de Port‑Royal; d'Andilly. — M. Le Maître et les rythmes de la prose. — Nicole contre «l'éloquence d'eau chaude». — Tous gens de lettres

III. S'ils ont créé le style janséniste ce fut malgré eux. — L'ont‑ils créé? — Le témoignage des contemporains. — Les Messieurs de Port‑Royal écrivent comme les autres écrivains religieux de l'époque. — La prose après Balzac. — Le P. Crasset. — Voluptés perdues; Le Maitre et Flaubert. — Qu'il n'y a pas de style janséniste et que, soit pour le style, soit pour le reste, ils furent peut‑être moins originaux qu'on ne l'a cru

 

CHAPITRE II

L'ÉCOLE FRANÇAISE ET LE RIGORISME DE PORT-ROYAL

 

Une tête de Méduse: l'épitaphe d'Arnauld. — Le vrai talisman des jansénistes: leur grand air de religion et d'austérité. — Que l'école française présente la même «rigueur» et que par suite l'originalité de Port-Royal tient du mythe. — L'humanisme dévot et l'école française. — Les exagérations et le «pessimisme» de celle‑ci. — Gibieuf et l'augustinisme de Bérulle. — Morale de la voie étroite. — Le P. Lejeune. — Saint‑Cyran et l'école française. — Le jansénisme dénoncé dès le début par les maîtres de cette école. — Olier et Vincent de Paul. — À quel point ces maîtres diffèrent du jansénisme, malgré quelques ressemblances de surface. — Que leur mysticisme corrige leur pessimisme

 

CHAPITRE III

LA MISÈRE DE M. DE SAINT-CYRAN

 

I. Un malheureux. — Exagération de ses admirateurs et de ses adversaires. — Fascination exercée par lui. — Madame de Chantal. — Ce qui peut expliquer son prestige. — Illuminisme au moins apparent. — Banalité de ses oracles. — «Quand un prophète m'aurait parlé…» — Prodigieusement occupé de soi. — «Nous avons, Dieu merci, des pensées plus hautes». — Son héroïsme prétendu. — Le théâtre et la vie réelle

II. Hérédité psychopathique. — La Question royale. — Récidive «grave de symptôme». — «On n'est pas fait comme cela ou on est extraordinaire». — Les lettres saisies. — L'esprit de Principauté. — Le rival de Richelieu. — Courbe de sa névrose. — Vers l'hébétude. — Les aphasies soudaines. — Les velléités. — Le cabinet d'Allemagne. — Inconstance : il n'achève rien. — Saint‑Cyran à Port‑Royal. — Les autres malades de la famille: obsession du jeune de Hauranne. — Mélancolie douce; rien de sinistre. — Les enfants. — Délire de la persécution. — Les larmes. — Retour à l'enfance. — Mégalomanie morbide; ataxie intellectuelle. — Un génie et un saint manqué

III. Le réformateur. — «Sieyès spirituel en disponibilité». — Beaucoup de bruit pour rien. — Post hoc, ergo propter hoc. — Pourquoi pas le grand Arnauld? — Témoignage de Vincent de Paul. — Leur intimité. — Il l'a vénéré, il n'a pas pris au sérieux ses boutades réformatrices. — Saint‑Cyran à Vincennes. — Le beau cas de conscience pour Vincent de Paul. — Loin de charger le prétendu réformateur, il l'excusera de son mieux. — La déposition de Vincent. — Un cerveau mal fait, mais un saint homme. — Toute complaisance serait ici criminelle. — Second jugement de Vincent de Paul sur Saint‑Cyran. — Comment peut s'expliquer ce revirement? — Auquel des deux jugements faut‑‑il croire? — Le premier résultat d'une longue série d'observations; le second, d'un raisonnement

 

CHAPITRE IV

SAINT-CYRAN CONSPIRATEUR

 

I. Note bibliographique et critique — 1. Les lettres de Jansénius à Saint‑Cyran. — La publication et l'éditeur de ces lettres. — Les suppressions. — Le commentaire du P. Pinthereau. — Impression que donnent ces lettres. 2. Le procès de Vincennes. — Irrégularité du procès. — Principales pièces. — Les témoins à charge. — Dom Jouaud, abbé de Prières. — Son importance dans cette histoire. — Ses relations avec Rapin. — Ce que les jansénistes opposent à son témoignage, lequel d'ailleurs doit faire foi. — La dénonciation de Zamet. — Critique de cette pièce. — Lettres et mémoires qui ont servi au procès. — Interrogatoire de Saint‑Cyran. — La défense. — Apologie pour Laubardemont

II. Qu'on peut sans témérité soupçonner Saint‑Cyran des pires desseins. — La consigne du secret. — Les secrets innocents. — Ce qu'il ne pouvait dire à d'Andilly qu'«à la faveur des ombres des arbres». — Procédés indécents qu'il emploie pour s'assurer le secret. — Que nul ne fut moins secret que lui. — Ses folles imprudences. — La scène devant les murailles de Maubuisson. — Les deux Saint‑Cyran: à l'état normal et pendant les crises. — Le théologien et l'illuminé. — Lequel des deux est le vrai?

III. «La grande affaire», l'ultime secret. — Saint‑Cyran et Jansénius. — Activité des conspirateurs de Louvain et importance de leur rôle. — Pilmot. — Qu'ils ne trament, pour l'instant rien contre l'Église. — Leur désir de rester en communion avec les Universités catholiques. — Leur soumission au Pontife romain. — Qu'ils désiraient gagner le Pape à leur conspiration. — Le Pilmot original, vague projet de contre‑réforme. — L'évolution de Pilmot

IV. § 1. La hiérarchie et la guerre aux réguliers. — «Nous défendons partout l'autorité épiscopale». — Que c'était là une des directions de la contre‑réforme catholique. — Le P. Bourgoing, l'Oratoire et l'esprit hiérarchique. — Les conjurés soutiendront la même doctrine, mais en la prenant sous son aspect négatif et agressif. — L'assaut contre les jésuites. — Que Saint‑Cyran n'avait aucune raison de leur en vouloir. — Ses neveux confiés aux Pères. — Acharnement de Jansénius et bientôt de tout le parti. — § 2. La restauration de l'augustinisme. — Que le premier projet des deux conjurés n'était certainement pas de répandre la fausse doctrine sur la grâce que Jansénius proposera, dans l'Augustinus. — En 1619, ils sont déjà d'accord sur Pilmot et cependant ni l'un ni l'autre n'a la moindre idée des futures cinq propositions. — En 1620, Jansénius «découvre» saint Augustin et les cinq propositions. — Il fait part à Saint‑Cyran de la bonne nouvelle, mais sans entrer à ce sujet dans le moindre détail. — La grande lettre du 5 mars 1621, document capital dans l'histoire du jansénisme. — «Voilà ce que je ne vous ai pas dit jusqu'à maintenant», et il ne le lui dit pas encore. — Caractère de sa découverte, et qu'elle n'a rien de religieux. — Que les deux fondateurs du jansénisme, Jansénius et Arnauld ne sont que des intellectuels. — Saint‑Cyran, confident de tragédie, continue à ne rien savoir de la découverte. — Qu'avaient‑ils donc fait pendant leur retraite de Bayonne? — Saint‑Cyran de moins en moins spéculatif, et plus érudit que théologien. — Excitateur plus que maître. — Qu'il n'a rien appris à Jansénius. — Enfantillages qui les occupaient. — Rendu à lui‑même, Jansénius a pris son essor et fait la fameuse découverte. — Comment Saint‑Cyran adopte l'Augustinus. — Renversement des rôles: Saint-Cyran à la remorque de Jansénius. — Qu'à partir de cette époque, Pilmot et l'Augustinus ne font qu'un

 

CHAPITRE V

RELIGION DE SAINT-CYRAN

 

I. Saint‑Cyran et le rigorisme janséniste. — Vague de ses prétentions réformatrices. — Peu de sérieux que présente son rigorisme. — Il approuve des confesseurs molinistes. — Saint‑Cyran, humaniste dévot. — Ne se mettre «en peine de rien». — Les expériences mystiques de Saint‑Cyran. — Le «renouvellement» de Lancelot. — Saint‑Cyran au confessionnal. — La direction de Port‑Royal. — «La communion tous les dimanches ou même une fois de plus dans la semaine». — Le «renouvellement» à Port‑Royal. — Déformation progressive de la doctrine de Saint‑Cyran

II. Semences d'hérésie dans la pensée confuse de Saint‑Cyran. — La clairvoyance de Condren. — Vers un christianisme purement intérieur. — Individualisme mystique substitué au catholicisme. — Asacramentaire. — Indépendance absolue du chrétien intérieur. — Mais peut‑être est‑il imprudent de lui attribuer, même en puissance, une doctrine quelconque?

III. Le vrai et le meilleur Saint‑Cyran. — Le solitaire, le contemplatif. — Les deux aspects de sa vie intérieure. — Méditation lyrique. — Tumulte et magnificence. — Le flux et le reflux de la grâce. — Intensité religieuse et humanité. — De la «coutume ancienne de suspendre le Saint‑Sacrement». — Saint‑Cyran précurseur du romantisme catholique. — La prière du pauvre. — Vers la contemplation. — Nul quiétisme. — Silence et flexibilité. — Le jansénisme trouvera Saint‑Cyran trop mystique. — Ce qui l'empêche de parvenir au vrai mysticisme. — Les «témoignages de Dieu». — Grandeur et misère de Saint-Cyran

 

CHAPITRE VI

LA MÈRE AGNÈS

 

I. Les deux sœurs. — Agnès nous représente mieux qu'Angélique la vie intérieure de Port‑Royal. — Le tableau de Champaigne. — Il n'est pas janséniste. — Les pêches de Robert d'Andilly. — Sainte‑Beuve et les deux sœurs. — Le Port‑Royal franciscain et salésien des débuts. — Le P. Archange. — Rigorisme précoce d'Angélique. — Le P. Archange et la mère Agnès. — François de Sales à Port‑Royal

II. Agnès fidèle à ses premiers maîtres. — Contre les scrupules. — «Souffrez comme si vous étiez justes». — L'esprit des enfants. — L'humanisme dévot à Port‑Royal. — La direction des novices. — Sainte et saine allégresse. — «Vous m'entendez bien, ma sœur». — Le «baptême du sang». — «Il faut avoir de bons sentiments de Dieu»

III. Le Port‑Royal oratorien. — Zamet et Condren. — Prompte initiation à la spiritualité de l'école française. — Angélique et l'extase qui dépend de nous. — Agnès et Condren. — La «désistance de l'âme». — L'empreinte oratorienne. — Le Chapelet secret. — La légende et l'histoire. — La protestation de la Mère Agnès. — Doctrine foncièrement oratorienne du Chapelet secret. — «Cessez d'être, afin qu'il soit». — «Inapplication». — Que le Chapelet n'est pas un pamphlet contre la communion fréquente et qu'il ne traite pas de la communion. — La rancune d'O. de Bellegarde et sa vengeance. — Un autre Lutrin

IV. Saint-Cyran à Port‑Royal. — Une expérience méthodiste. — La crise. — Le retour au bon sens et à la tradition. — La communion fréquente à Port‑Royal. — Agnès et la communion fréquente. — «Les imparfaits ont droit de communier souvent». — Quiétisme apparent de la Mère Agnès. — Contre l'oraison qui «dépend du raisonnement». — Vers l'union mystique. — Quomodo obscuratum est aurum?

V. Le Port‑Royal angevin. — Henry Arnauld. — Bourrigaut et Marie Constance. — Le théâtre au couvent; une farce anti‑moliniste. — Le grand Arnauld à Angers. — La fin du Vert‑Vert. — Le Port‑Royal pour rire, et les excuses du vrai Port‑Royal. — Agnès essayant de lutter contre l'esprit de secte. — Avantages de l'humiliation. — Le pardon et le silence. — Agnès, sa nièce et la signature du formulaire. — «À Dieu ne plaise que je domine sur la foi d'autrui.» — Port‑Royal pendant l'exil de la Mère Agnès. — La guerre au couvent. — L'agonie de Madeleine Mechtilde. — Les nouvelles Provinciales. — Les derniers jours de la Mère Agnès et la décadence dePort‑Royal

 

CHAPITRE VII

LES SOLITAIRES ET SÉBASTIEN LE NAIN DE TILLEMONT

 

I. Les «Messieurs de Port‑Royal». — Nous reprenons notre bien.— Le Maître et Saci, absous par le P. Rapin. — La pénitence à Port-Royal. — Cella interrupta. — La dévotion. — La joie. — Retraités et gens de lettres. — L'encre à Port‑Royal. — Les distractions. — Préludes sectaires. — Le manque d'humour. — Fatuité dévote. — Leur désert n'est pas catholique. — Ils ignorent la vraie communion des saints. — Cisternas dissipatas

II. Archéologues, revenants et jacobites. — Pas encore jansénistes. — Leur Walter Scott. — Sainte‑Beuve et M. Hamon. — Les confessions de M. de Tillemont. — Le rythme de sa vie intérieure: de l'angoisse à la paix. — Une prière critique. — La religion en fonction de la morale. — Tillemont peint par lui‑même. — Les tentations des pacifiques. — «Tout homme est soldat». — Tentations des hommes d'étude. — Le savant chrétien

III. Devoirs envers le prochain: l'indépendance du chrétien et du savant. — Les parents. — Manifesta teipsum mundo. — M. Le Nain. — Quid tibi et mihi mulier? — Le commerce avec les méchants: libertins ou molinistes? — Trajan et Marc‑Aurèle. — Le scandale de l'histoire. — Commerce avec les justes. — Les médisants à Port‑Royal. — Les domestiques. — Vers le mysticisme. — La piété intérieure et le silence du ciel. — L'élève de Port‑Royal «en droiture et qui n'a pas dévié». — Sancte educatus, sancte vixit. — Le Port‑Royal préjanséniste

 

CHAPITRE VIII

LE GRAND ARNAULD. LE JANSÉNISME ET LE SENTIMENT RELIGIEUX EN FRANCE PENDANT LE SIÈCLE DE LOUIS XIV

 

I. Que la poésie de Port‑Royal n'est pas janséniste. — Ce que serait une poésie, un lyrisme janséniste. — Erreurs théologiques; bizarreries; esprit de secte. — Tout ce que nous admirons chez eux reste catholique

II. Le grand Arnauld. — Un docteur qui n'est que docteur. — Ses jarretières. — Son innocence. — Ses martyrs. — Les «ballots». — Le «testament spirituel». — Tartufe et le pharisaïsme doctoral. — La messe de tous les jours et Vincent de Paul. — «Cela n'appartient qu'à M. Arnauld». — Qu'il nous aide à comprendre ce que n'est pas la religion. «Ce qui s'appelle vraie spiritualité leur est entièrement inconnu». — Arnauld et Bossuet. — Du lyrisme au mysticisme

III. Influence d'Arnauld. — Directement il fait des sectaires. — La fureur doctorale «dévorant le cœur de la charité qui fait vivre l'Église». — Bourdaloue, Jurieu, Malebranche, Quesnel. — Les bureaux de diffamation. — Jansénisme négatif. — Piété catholique des premières générations jansénistes. — Peu à peu l'organe créera la fonction et la secte, l'hérésie. — Le jansénisme du xviiie siècle

IV. Progrès et ravages de l'intellectualisme sectaire. — Un héros national. — Boileau et le grand Arnauld. — La guerre civile. — Prudence et modération des grands spirituels. — La bonne cause a eu ses Arnauld. — Influence fâcheuse de ces polémiques sur la vie intime du catholicisme français. — Les agités. — Le P. Rapin et les modérés. — Le P. Rapin et l'Évangile. — La retraite de M. Le Maître. — Les honnêtes gens et les mystiques. — «Polémiques déprimantes et stérilisantes». — Le jansénisme et la retraite des mystiques

 

CHAPITRE IX

LA PRIÈRE DE PASCAL

La doctrine janséniste a‑t‑elle pénétré la vie intérieure de Pascal? — Complexité particulière du problème. — Jansénius a été le premier maître de Pascal. — Les deux opinions reçues: la prière de Pascal toute janséniste; — toute catholique. — Qu'il y a lieu de chercher une solution moyenne

§ 1 — La joie de Pascal

La vie intérieure de Pascal n'a pas été assombrie par le jansénisme. — Maine de Biran. — «Joie, joie, pleurs de joie». — La doctrine «douce et savoureuse» de Calvin. — La piété janséniste et la certitude, au moins implicite, du salut. — Formules dévotes à l'usage de Port‑Royal. — Joie de «ceux qui, par un heureux sort, se trouvent du petit nombre» des élus. — Je t'aime, comme j'aime «mes élus… Ne t'inquiète donc pas». — Le sens catholique et le sens janséniste du «Je te veux guérir». — «Espérer extraordinairement». — «Non timeo quia amo»

§ 2. — Le «signe» donné à Pascal et la «consolation» sensible

Comment sait‑il qu'il est aimé? — «Ce que je te le dis est un signe», et un signe qui n'est pas donné à tous. — Ce n'est pas une révélation proprement dite, mais une grâce de dévotion sensible. — «Consolation» et «Désolation», d'après les spirituels catholiques. — La «Consolation» et l'ascèse ignatienne. — Développement tardif de la sensibilité religieuse chez Pascal. — La conversion de 1646. — Qu'il y a loin de «sentir Dieu» à l'aimer. — La rechute. — «Horribles attaches» et «mouvements» de ferveur. — L'automne de 1654 et la crise de «désolation». — «S'il avait les mêmes sentiments de Dieu qu'autrefois…»

§ 3. — Le «signe» de «feu»

I. Caractère unique du «ravissement». — Hallucination? expérience mystique? simple ferveur? Pourquoi pas les trois ensemble? — La conversion de sainte Gertrude. — Une conversion méthodiste: Henry Alline. — Celle de Pascal est entre les deux. — Le «Feu» du Mémorial. Dominus Deus tuus ignis consumens. — Les deux moments de l'expérience. — Au ravissement succède une méditation ordinaire. — II. Encore la certitude du salut. — Pour les jansénistes, l'espérance chrétienne «consiste à se regarder comme étant du nombre des élus». — La joie du remords. — Certitude et crainte. — Sens catholique et sens janséniste du «Tu ne me chercherais pas…». — La tristesse de Pascal. — Les mystiques, les humanistes dévots et l'École française contre Pascal

§ 4. — La religion de Pascal

A. Le «Dieu» de Pascal. — Joie tragique. — Un monde maudit. — L'«opposition invincible entre Dieu et nous». — Doctrine contraire de François de Sales. — La peur de Dieu. — Pascal et l'idée de Dieu. «Impossible, inutile, dangereux… de le connaître». — Nous ne devons nous représenter Dieu qu'en fonction de la faute originelle. — Pas d'autre Dieu que «le réparateur de notre misère». — La faute de Pascal «n'est pas de suivre une fausseté, mais de ne pas suivre une autre vérité». — Le Dieu des Pensées et le Dieu de la liturgie catholique

B. Le devoir religieux. — «Marque d'orgueil que de vouloir aller à Dieu directement». — Que c'est là au contraire le devoir religieux par excellence. — «Pourquoi Dieu a établi la prière?»; Réponse de Pascal; réponse des grands spirituels catholiques. — La prière est avant tout «adoration, louange». — «Premièrement regarder Dieu». — L'adorer «par ce qu'il est en soi plutôt que par ce qu'il est au regard de nous». — Dévotion de l'école française à la sainte Trinité. — Théocentrisme lyrique de Bossuet — Que l'Église, dans sa liturgie, entend nous élever à cette religion parfaite

C. «Jésus‑Christ! Jésus‑Christ!». — Joubert et Sainte‑Beuve: les Jansénistes «ôtent au Père pour donner au Fils». — Et cependant la christologie de Pascal diminue le Christ. a) Le Christ de Pascal n'a pas su racheter le monde. — Combien plus grand le Christ de l'humanisme dévot! — O felix culpa! — Le Christ vaincu de Pascal et notre Christ‑Roi. — Le cantique de Fortunat. b) Le Christ de Pascal uniquement pour l'homme, celui de l'Église d'abord pour Dieu. — L'adorateur parfait. g) L'École française et sa dévotion théocentrique au Verbe incarné

D. Le meilleur Pascal. — Que le fond véritable de Pascal n'est pas janséniste. — Contradictions inconscientes que tôt ou tard il eût aperçues. — «Le Pape est premier». — La dernière conversion. — «Le cœur» de Pascal et la «cime de l'âme». — Mysticisme des Pensées — Pascal et la dévotion à la personne du Christ

 

CHAPITRE X

PIERRE NICOLE OU LE JANSÉNISTE MALGRÉ LUI

 

I. Pourquoi l'étudier dès maintenant? — Récapitulation de ce qui a été dit plus haut sur le mouvement janséniste. — Importance capitale de l'intervention d'Arnauld. — Premières ambiguïtés et premières maladresses. — Nicole réparera les maladresses d'Arnauld; grâce à lui, Arnauld n'aura pas à choisir entre la pleine révolte et la pleine soumission

II. Nicole et la distinction entre le fait et le droit. — Habileté et loyauté. — Cette distinction apaise les angoisses intérieures de Port-Royal. — On avait peur que le jansénisme ne fût la vérité. — Tendances molinistes de Nicole. — La cour de Rome et le thomisme. — Les «cinq articles» thomistes de Nicole approuvés par le pape. — Thomisme atténué. — Du prétendu «pouvoir» accepté par les jansénistes et qui n'est qu'«un pouvoir garrotté par des liens invincibles.» — Une véritable grâce, et «surnaturelle» donnée à tous les hommes. — «Les ruines d'un édifice surnaturel sont surnaturelles». — Quam me delectat Theramenes; Nicole et Pascal sur les vertus des «Lacédémoniens». — Curieuse sévérité de Sainte‑Beuve à l'endroit du «psychologiste» Nicole. — La politesse en enfer. — Nicole et l'humanisme dévot

III. Qu'il y a d'autres Pères que saint Augustin, et que saint Augustin à lui seul n'est pas l'Église. — «Comparant autorité à autorité, il semble juste de préférer celle du Pape». — Nicole suspect aux intransigeants du parti. — A‑t‑il joué double jeu, comme on l'en accuse des deux côtés? — Que Nicole a toujours cru à l'orthodoxie foncière d'Arnauld. — À quelles enseignes? — Psychologie de l'entêtement doctoral: «On combat un sentiment parce qu'on l'a combattu». — Arnauld thomiste, mais honteux. — Malentendu persistant entre les deux théologiens du parti. — Timidité et optimisme de Nicole. — Sa responsabilité dans la renaissance du jansénisme, après la «paix de l'Église»

IV. Nicole essayant d'arrêter le développement de la secte. — Des «vues de conscience» qui d'abord lui avaient permis d'intervenir dans la lutte. — Polémiste malgré lui ses regrets. — Il ne se reconnaît pas le droit d'écrire contre les «ministres de l'Église». — Le droit de ne pas médire. — Les lois de la polémique chrétienne. — L'assurance de M. Arnauld. — «Je ne me puis appuyer… sur la vocation de M. Arnauld, puisque j'en doute». — L'utilité de cette lutte, «la chose du monde dont je doute le plus». — Dans quel esprit est‑il permis de s'indigner contre l'injustice? — Nicole et Gerbet. — Nicole n'est pas janséniste

V. Dangers que peuvent présenter les Essais de morale. — Exagérations et déclamations pessimistes. — Indulgence foncière de Nicole. — Qu'il y a plus de «fautes d'obscurcissement» que de «fautes de passion». — La méthode morale de Nicole et l'inoculation du scrupule. — Plus moraliste que religieux. — Sainte‑Beuve, Joubert et la véritable infériorité de Nicole. — «Quand le christianisme est raisonnable, il n'a plus de force». — Nicole n'est pas mystique

 

CHAPITRE XI

PIERRE NICOLE OU L'ANTI-MYSTIQUE

 

§ 1. — Trente ans de campagne contre les mystiques

I. Stupeur croissante causée à Nicole par l'enseignement des mystiques. — Un courant mystique, même à Port‑Royal. — Desmarets de Saint‑Sorlin, les Délices de l'esprit et les Visionnaires. — Le succès de Desmarets révèle à Nicole les étranges progrès de la propagande mystique au xviie siècle. — Mystiques plus importants: J. de Bernières et Guilloré. — Indignation de Nicole. — Le Traité de l'Oraison; rare mérite de cet ouvrage. — Période d'apaisement: Nicole entrevoit la difficulté et le sérieux du problème mystique. — Qu'on ne peut «raisonnablement» condamner l'oraison de quiétude. — Louables efforts, mais inutiles: il ne comprend pas. — Débuts de l'agitation anti‑quiétiste; Mme Guyon Chez Nicole. — L'esprit de l'escalier. — Bossuet, Nicole et la Réfutation des principales erreurs du quiétisme. — Mort de Nicole

II. La trilogie anti‑mystique de Nicole et son importance. — Ne serait‑ce pas uniquement une trilogie anti‑quiétiste? — Attitude de Nicole à l'endroit des mystiques modernes; défiance respectueuse; craignant d'avoir à les condamner, il ne veut pas les étudier. — «Gardons‑nous de prendre absolument pour illusion» l'oraison «extraordinaire» dont ils parlent. — Saint Bernard et saint Jean de la Croix. — Est‑il vrai que les Pères n'aient pas connu l'oraison mystique? — Le vice fondamental de la méthode de Nicole; il ne s'agissait pas de comparer les faux mystiques du xviie siècle aux Pères des premiers temps, mais aux vrais mystiques de l'époque moderne. — Balzac et le serment de Strasbourg. — Les spirituels qu'il a combattus sont‑ils vraiment de faux mystiques? — Bernières, Malaval, d'Estival, Guilloré, Mme Guyon. — Erreurs et imprudences, mais orthodoxie foncière des quatre premiers. — On lui abandonne Mme Guyon. — Lui abandonnerait‑on les autres, qu'il resterait à savoir si les arguments que Nicole fait valoir contre eux, ne vont pas à exterminer tout aussi bien les vrais mystiques

§ 2. — L'anti‑mysticisme de Nicole

I. Analyse de la prière chrétienne

§ 1. Dans toute prière, deux activités collaborent, celle de Dieu et celle de l'homme

§ 2. D'où il faut conclure que l'on est exposé dans la prière commune à des illusions

sans nombre

§ 3. Palinodie

§ 4. Nécessité de l'effort humain (intelligence, volonté) dans la prière. — Apologie de la méditation et de saint Ignace

§ 5. Critique de l'effort humain dans la prière. — L'illuminisme quiétiste de plusieurs jansénistes et le quiétisme prétendu des mystiques orthodoxes

II. Le préjugé anti‑mystique

§ 1. Obsession de la faute originelle

§ 2. Obsession morale

§ 3. Obsession rationaliste

§ 4. Obsession jansénisante ou rousseauiste. — La grâce conçue comme un divin plaisir, comme une délectation victorieuse

III. Le roman mystique d'après nicole

§ 1. Tout le mal est venu des livres

§ 2. La fascination de l'inertie

§ 3. Vapeurs et non pas martyre

§ 4. Le sommeil réparateur

§ 5. Les pensées imperceptibles

Appendice.

L'investissement d'une abbaye bénédictine par le jansénisme ; Notre‑Dame du Val‑de‑Gif.

Patrick Goujon et Dominique Salin, Henri Bremond et la spiritualité ignatienne

Le Père Lallemant et son «école»

Jean-Joseph Surin

Un épisode de l'histoire de la spiritualité

Histoire littéraire

La figure du combat présent

Le débat sur les Exercices

Les jésuites bérulliens et les autres. À propos de l'École française (1921-1922)

«Ascèse ou Prière?» : la découverte de «l'ascéticisme»

La critique du P. Cavallera

Riposte: la «brochure pirate»

La Métaphysique des Saints

La préface aux Exercices: l'article de la Vie spirituelle (1929-1930)

Mystique de l'élection et désappropriation de soi

Bremond après Bremond

Certeau éditeur de Surin

De la «philosophie de la prière» à l'histoire de la spiritualité

 

Tome V

L'École du Père Lallemant

et la tradition mystique

dans la Compagnie de Jésus

La Conquête mystique***

 

CHAPITRE PREMIER

LA DOCTRINE SPIRITUELLE DE LOUIS LALLEMANT

 

I. Lallemant et son école. — Pierre Champion et la tradition de l'école. — Louis Lallemant. — Son curriculum vitæ. — Ses épreuves. — Lallemant et les supérieurs de la Compagnie. — Ses disciples et leurs premières résistances. — «Pas d'autre maître que le Saint‑Esprit». — Lallemant, Balthazar Alvarez et les mystiques dans la Compagnie. — Principaux caractères de l'école

II. A. La seconde conversion. — La troisième année de noviciat chez les jésuites. — Trop de bon sens. — Les deux conversions. — Le salut dépend de la seconde. — Le «bon Père» des Provinciales. — Prétendues infiltrations jansénistes dans la Compagnie. — Les non‑convertis. — Plus en danger que les séculiers. — Le monde au couvent. — Antinomies résolues par saint Ignace. — Les religieux et l'orgueil. — Le palliatif des «bonnes intentions». — Néant du zèle naturel. — «Franchir le pas». — Facilité d'une transformation soudaine et totale. — Caractère nettement mystique de la seconde conversion

B. La critique de l'action. — Les jésuites et l'action. — «Le principal, qui est l'intérieur». — Qu'une vertu solide et pratique ne suffit pas à un Ordre actif et qu'il faut aller jusqu'au mysticisme. — Nulle initiative, «fort peu d'action au dehors». — Dosage de l'action. — L'action «pour la vie intérieure». — Primauté de l'obéissance. — «Par manière de divertissement». — Que l'apostolat n'a pas à souffrir de cette doctrine. — Instrumentum conjunctum cum Deo. — Critique du «moralisme». — L'action et la prière; qu'il n'est pas nécessaire dans l'oraison de tout «rapporter à l'action». — « L'essence» des vertus. — Ne pas mettre le but de toutes les inspirations divines, «en l'action et en la pratique»

C. La garde du cœur. — «Purgation » et «garde» du cœur. — «Ce n'est pas l'examen de conscience». — « En sentinelle». — Difficulté et nécessité de cet exercice. — Entraînement à l'analyse morale. — Pratique de la garde du cœur. — Les sacrements «exercices principaux de la perfection». — « La pureté du cœur, plutôt que l'exercice des vertus». — Alphonse Rodriguez et la doctrine contraire. — L'avocat de Marthe. — La présence de Dieu «moyen pour bien faire… nos actions». — Ascétiques et mystiques. — Ascèse plutôt négative de Lallemant, et qui conduit à «l'union divine»

D. La conduite du Saint‑Esprit. — Principe fondamental et clef de tout le système. — S'abandonner, «se lier» au Saint‑Esprit. — «Dieu l'instruit lui‑même». — « À peu près comme nous avons la lumière du soleil». — Le P. Lallemant et «l'esprit intérieur» des calvinistes. — Et le vœu d'obéissance. — «Prudence humaine» des supérieurs qui traitent cette doctrine d'illusion. — L'obéissance ne dirige que «pour le regard de l'extérieur». — La direction du Saint‑Esprit et les cas de conscience. — Et la vie spirituelle. — Et les divers ministères. — L'oraison est «la principale préparation pour la chaire». — Les dons du Saint‑Esprit. — Lallemant et Newman. — Don d'intelligence ou de réalisation. — Sagesse et science. — Le discernement des esprits. — Revanche des mystiques sur les moralistes. — Casuistique surnaturelle. — Les «lumières subites». — « Assurances certaines» du don mystique. — Contemplation ordinaire et extraordinaire. — «Un lion en peinture… un lion vivant». — « La vraie sagesse». — Contre la timidité des directeurs. — «Plus de vertu et plus tôt» que par les voies communes. — «Sans la contemplation, on n'avancera jamais beaucoup dans la vertu». — « On criera». — La vie mystique et la nécessité de «l'application» à Jésus‑Christ. — Dieu unique souverain de l'intérieur. — «L'intérieur qui est sans bornes». — « Après l'Incarnation, nous ne devons rien admirer»

 

 

 

CHAPITRE II

JEAN RIGOLEUC, JULIEN MAUNOIR ET LES MISSIONS BRETONNES

 

I. La parole vivante du P. Lallemant. — Ses principaux disciples. — École discrète, à peine sensible au dehors, mais très active. — Carrière obscure de Jean Rigoleuc. — «Moins considéré que les autres». — Le vieux serviteur et son mauvais petit cheval. — Vie errante

II. Premières impressions pieuses. — Comment il arrive à «la parfaite composition de son âme». — La seconde conversion. — La «sainte indétermination». Toujours la critique de l'action. — Que la grâce n'est pas sensible. Rigoleuc et Pascal. — «II ne faut pas même le chercher, mais nous persuader qu'il nous a trouvés». — Élévation aux états mystiques. — Les épreuves: pendant six ans, il se croit damné. — Propagande mystique dans les couvents et parmi les jésuites. — Barthélemy de Fumechon et «la vraie spiritualité»

III. La réévangélisation de la Bretagne au xviie siècle. — Caractère particulier de ces missions bretonnes. — Le biographe du P. Maunoir. — La peur du miracle. — Voyage du P. Boschet en Bretagne. — Les missions bretonnes et l'Église primitive. — Les miracles. — «L'Iniquité de la Montagne.» — Génie des deux fondateurs des missions, Le Nobletz et Maunoir. — Renan, les missions bretonnes et la centralisation catholique

IV. Entreprise essentiellement catéchétique. — Les «cartes peintes» de Le Nobletz. — La baguette blanche. — La carte des conseils et le canal de Panama. — La carte du chevalier errant. — La bouline. — Les cahiers de Le Nobletz. — L'Humanisme dévot et Bunyan. — La carte des malades. — M. Nigot et les doléances du Vilain. — Les tableaux vivants et la grande procession. — Les cantiques de Le Nobletz et de Maunoir. — Le Nobletz et les cantiques de l'île d'Ouessant. — Les femmes catéchistes. — Utilité de cette innovation et opposition qu'elle soulève. — Grandeur et faiblesse de Michel Le Nobletz

V. Maunoir, moins original, peut‑être plus grand. — Il organise la légende et le culte de Le Nobletz. — Les supérieurs de Maunoir. — La «Confédération» des missionnaires. — La mission dans la mission. — Les missions bretonnes et la renaissance mystique

 

CHAPITRE III

JEAN RIGOLEUC ET LA BRETAGNE MYSTIQUE

 

I. Le P. Surin et le coche de Rouen. — Les mystiques bretons. — Armelle Nicolas et l'école du P. Lallemant. — «Les voies intérieures ne furent jamais si connues» qu'au xviie siècle. — Difficultés particulières que présentait la «spiritualisation» d'Armelle. — Les premières places; besoin maladif de changement. — Les Le Charpentier du Tertre. — Première initiation. — Les rues teintes de sang. — Tentations et cauchemars. — La compagne d'Armelle. — Persécution. — La scène du bain. — Le manoir de Roguédas. — Armelle et les jésuites de Vannes. — La servante. — Le Seigneur de Roguédas et la Bonne Armelle

II. Développement spirituel. — «Chassée d'elle‑même». — Le centre de l'âme. — Jeanne de la Nativité. — L'esprit devenant plus fort, le corps lui‑même reçoit «moins d'incommodités». — Présence presque habituelle de Dieu. — Les dons naturels. — Divine solution de la controverse quiétiste. — «Dame et maîtresse de toutes choses»

III. Catherine Daniélou et Marie‑Amice Picard. — L'œuvre des retraites. — Les jésuites et l'évolution du sentiment religieux. — Mme du Houx et les progrès du féminisme chrétien. — Le mariage de Jeanne Pinczon. — Mme du Houx envoyée par son évêque à Loudun, pour étudier Jeanne des Anges. — «Elle crut presque toujours que cette religieuse était dans l'illusion». — Mme du Houx et le P. Surin. — Vocation extraordinaire de Mme du Houx. — L'abbaye de La Joie. — Mission dans le diocèse de Tréguier. — La mission de Vannes et l'œuvre des retraites. — Mme du Houx et le P. Huby

 

CHAPITRE IV

LA FORMATION ET LES DÉBUTS DU P SURIN

 

I. Les démons ligués contre Surin, même après sa mort. — Il n'a pas encore de biographe et ses œuvres sont introuvables. — La composition de ses livres. — Éditions subreptices et plus ou moins suspectes. — Le P. Champion. — Le P. Surin au xviiie et au xixe siècles. — Sous le boisseau. — Possession et aliénation mentale du P. Surin. — Que tous ses inédits ne doivent pas être publiés. — La réaction anti-molinosiste; le P. Surin à l'Index. — Défauts et mérites qui expliqueraient la réserve que les jésuites font paraître à l'endroit du P. Surin

II. Famille pieuse et noble. — Égards particuliers qu'on aura plus tard pour le P. Surin. — Ses villégiatures. — Un gentilhomme. — La famille du P. Surin fascinée par le Carmel. — Sa sœur et sa mère carmélites. — Le jeune Surin et Isabelle des Anges. — Panégyrique du Carmel. — Sainte Thérèse et la Compagnie de Jésus. — Noviciat; études; troisième an

III. Marennes et la Saintonge mystique. — La famille de Saujon. — Marthe de Saujon. — De l'attachement aux charges. — Marguerite de Saint‑Xavier. — Vocation mystique de Marie Baron. — «Il semblait que son élément fût le feu». — La boutique des Du Verger. — Le «magnifique» M. Du Verger. — Mort et obsèques triomphales de Marie Baron. — Madeleine Boinet et la succession mystique de Marie Baron. — Sa conversion. — Institutrice. — Vie intérieure de Madeleine Boinet. — La veille du départ pour Loudun

 

CHAPITRE V

LE PÈRE SURIN ET JEANNE DES ANGES

 

I. L'Église et les interventions surnaturelles. — Devoirs et droits des historiens catholiques. — Obscurités de l'histoire de Loudun. — Erreur manifeste des exorcistes de Loudun. — L'ancienne tradition et la pratique moderne de l'Église condamne leur méthode. — Les exorcismes publics et les dangers qu'ils présentent. — Les exorcistes au service de l'État et non de l'Église. — Aveugle confiance donnée au «Père du mensonge». — Excuses des exorcistes. — Nicole Aubry et la conversion des protestants. — Évolution moderne et regrettable de l'exorcisme. — Le rituel négligé. — Bavardages et interrogations curieuses. — Saint Hilarion et saint Jérôme témoins de la tradition. — Le public admis à conférer avec les démons. — Influence désastreuse des livres consacrés à l'histoire des possessions. — Sébastien de Michaelis. — L'affaire de Loudun, calquée sur l'affaire d'Aix. — Loudun et l'opinion. — Les supercheries

II. Le P. Surin à Loudun. — Peines d'esprit et santé chancelante. — Opposition de son supérieur. — Surin s'offre à «être chargé du mal» de Jeanne des Anges. — La règle de saint Ignace. — L'exorciste exorcisé. — L'héroïque sacrifice est accepté. — Maladie du P. Surin

III. Jeanne des Anges. — Une malade qu'il ne convient pas d'assimiler aux saintes authentiques. — Mimétisme spirituel. — Enfance et jeunesse de Jeanne. — «Penchants déréglés». — Personne ne l'aime et elle n'aime personne. — Ses débuts dans la vie religieuse. — Premiers essais de cabotinage spirituel. — Travail parallèle de la grâce. — Elle intrigue pour être envoyée à Loudun. — Premiers succès au parloir. — Prieure. — Le couvent divisé. — «Affections déréglées». — Les commérages du parloir. — L'affaire de Loudun et la demi‑responsabilité de Jeanne. — Christi bonus odor sumus; Dieu jaloux de la réputation des vrais mystiques

IV. Vues du P. Surin sur la possession et sur l'exorcisme. — Possession et vocation mystique. — Transformation de l'idée de possession. — Méthode nouvelle. — La direction spirituelle du possédé, préférée à l'exorcisme. — Jeanne des Anges peu pressée de voir la fin de sa possession. — Lutte contre le P. Surin. — Celui‑ci aura le dessus. — Délicatesse de sa direction. — L'esprit bouffon. — Discours en latin sur la vie intérieure. — Premiers pas dans l'oraison. — Sincérité de Jeanne. — Son héroïsme. — Erreur du P. Surin: il encourage, à son insu, la secrète vanité de Jeanne. — Vers l'idée fixe. — Le petit parloir dans un grenier. — Suggestions mystiques. — Les supérieurs éloignent le P. Surin

V. Il pouvait partir, Jeanne en sait assez long désormais pour le rôle qui lui reste à jouer. — Les stigmates. — Nouvelles absurdités. — La grande guérison de Jeanne et le baume de saint Joseph. — Le voyage triomphal. — Les exhibitions. — Richelieu et la Cour. — Critique de la relation de Jeanne. — Est‑ce là le style des saints? — Prestige spirituel de Jeanne. — Elle se mêle de diriger le P. Surin. — Le «bureau d'adresse». — Troubles persistants. — Expiation suprême. — Mme du Houx et Jeanne des Anges

 

CHAPITRE VI

LE PÈRE SURIN ET LE MORALISME MYSTIQUE

 

I. L'agonie du P. Surin. — Les «deux âmes». — « Dieu occupant un étage et le démon l'autre». — Il se croit damné. — Ses confesseurs et ses supérieurs. — Surin et François de Sales. — «II suffit que Dieu soit Dieu»

II. Il continue son apostolat malgré cette épreuve. — Le sermon chez les carmélites. — Son œuvre littéraire. — La dictée du «Catéchisme». — La main à la plume. — Vers la guérison. — L'esprit d'enfance. — Dernières extravagances. — Le beau soir d'un triste jour. — Surin et le prince de Conti

III. Surin et les adversaires du mysticisme dans la Compagnie. — Un mystique de combat. — Que dans ses ouvrages il fait trop de place à la controverse. — Origines lointaines de cette opposition aux mystiques; la libido sciendi qui fait perdre le sens de Dieu. — «L'effort de l'entendement» et «la voie de l'amour». — Le Saint‑Esprit. — «Dilatation surnaturelle» de l'intelligence. — Les intellectualistes et leurs «formes». — La vraie mission du théologien et les limites de son domaine. — Les raisonneurs et les «visites de Dieu». — De l'inintelligence au persiflage. — Saint Ignace et la «loi intérieure» de charité. — L'obscurité et l'apparente insignifiance des ouvrages mystiques. — Non licet homini loqui. — Dabitur nosse cui dabitur experiri. — Les adversaires du P. Surin et leur excuse. — Nul homme sensé «qui ose blâmer l'usage de la contemplation». — Surin et l'indolence des faux mystiques

IV. Surin et le style jésuite. — Emploi constant des termes les plus «ordinaires». — Dangers du Phébus prétendu mystique. — La pratique des vertus. — La bénignité. — La crainte et «le style de Dieu». — Pratiquer les vertus communes, mais en les dépassant, en leur donnant «le goût général» du pur amour. — «Le motif divin… assujétissant à soi tous les autres motifs». — « L'ordre inférieur» et la perfection de l'amour. — L'envers ascétique de la contemplation. — Dénûment absolu. — Le dénûment et l'initiation mystique. — «Laissez opérer cette grandeur qui vous absorbe»

V. La vie mystique elle‑même tout abnégation. — La contemplation et «l'universelle vérité». — De la métaphysique du pseudo‑Denis à l'ascétisme. — La lettre à la vicomtesse de Roussille. — L'humanisme dévot et l'oraison aisée. — Paradoxe sur les distractions. — Toujours «la notion universelle» et le «goût confus» de Dieu. — Confusion apparente entre méditation et contemplation. — «Ne s'arrêter qu'aux raisons générales». — Du brouillard à la lumière. — Lumen de caligine. — La vie mystique offerte aux plus humbles. — Liberté et joie du mystique. — Surin et Saint‑Cyran. — Le moralisme mystique. — La névrose et le génie du P. Surin

 

CHAPITRE VII

LES HELYOT ET LE PÈRE JEAN CRASSET

 

I. Le portrait de Mme Helyot. — «La plus aimable personne du monde.» — Jean Crasset. — Une femme de qualité et sa maîtresse de lecture. — Mariage de Marie Hérinx. — La famille Helyot. — Ménage mondain. — Conversion de la jeune femme. — Un ballet au Louvre. — Excès de ferveur. — Complaisance de M. Helyot

II. Vocation mystique de Mme Helyot. — De la méditation à la contemplation. — Le P. Crasset et les adversaires des mystiques. — «Elle voyait l'être de Dieu». — « Dieu seul, dans l'anéantissement de toutes les conceptions». — Le coup de sifflet du berger. — Critique des biographies religieuses. — Beaucoup de paroles, peu d'actions. — Contre les autobiographies. — Les années de silence. — L'apostolat. — Les mouches. — Chez les pauvres. — Les bouquetières du vieux Paris. — «Appuyez‑moi de fleurs… parce que je languis d'amour»

III. Le mari d'une sainte. — Un ménage mystique. — M. Helyot imite sa femme et la «surpasse». — « Travesti en gueux». — Inventions charitables de M. Helyot. — Les petits ramoneurs. — À l'enterrement d'un homme de métier. — Encore la contemplation et l'état passif. — Écrits de M. Helyot. — «L'aurore de la grâce» et le cantique du jeune amour. — Les silences de l'amour. — Le pur amour. — M. et Mme Helyot. — Le portrait de Mme Helyot

 

CHAPITRE VIII

LOUISE DU NÉANT ET LE PÈRE FRANÇOIS GUILLORÉ

 

I. Louise du Tronchay et l'école du P. Lallemant. — Histoire ou roman? — Les de Bellère du Tronchay. — Hérédité morbide. — Premières épreuves et première solitude. — Éclosion tardive, mais éclatante. — Les adorateurs de Louise. — Étrangetés de ses parents. — Crise de mondanité. — Rêves héroïques. — Départ pour l'inconnu. — Louise du Néant

II. La communauté de Charonne. — Délire et extravagances. — La Salpêtrière. — Le grand siècle et le traitement des fous. — Les cachots. — Commencement de guérison. — M. Guilloire et la confession d'une prétendue sorcière. — Louise reste à la Salpêtrière, peut‑être en observation. — Fille de salle. — Sa journée. — Elle veut paraître folle. — Le beau monde en visite à la Salpêtrière. — Extases. — La correspondance de Louise. — Liberté et primesaut. — «Il faut vous faire rire». — « Frère l'âne». — Restes d'exaltation. — Les cris. — Madeleine — «Je le tiens aussi bien que vous!»

III. Mort de M. Guilloire. — Le P. Guilloré et M. Briard le remplacent. — Nécessité d'une direction plus ferme et plus suivie. — Guilloré et les illusions de la vie spirituelle. — Son premier jugement sur Louise: une Catherine de Sienne. — Il envoie ses dévotes à l'école de Louise. — Rudesse de sa direction. — Que plus une âme est élevée et plus elle doit être éprouvée. — Les faux mystiques et leur habileté à séduire. — Des directeurs qui se laissent éblouir par leurs pénitents et qui les montrent comme «des pièces de cabinet». — Le mépris, comme moyen de discernement. — Indulgence aux «âmes communes». — Direction «impitoyable». — « Il ne faut point de consolation sur la terre… Périssez». — Critique de cette direction

IV. Louise quitte la Salpêtrière, mais garde ses habits de folle. — Attitude étrange de ses directeurs. — Indépendance et docilité de Louise. — Vie errante dans Paris. — Abris de fortune. — Humiliations et apostolat. — Le plan du P. Guilloré. — Les grands directeurs et la direction. — Louise au pinacle. — Retour à une existence normale

V. Chez les pénitentes du P. Guilloré. — Mlle de Ténery. — Louise à l'hôpital de Loudun. — Via media entre le couvent et le monde. — Louise dans son vrai cadre. — Sa correspondance à cette époque. — L'hôpital de Parthenay. — La journée d'une hospitalière. — Paix et silence. — «Saint‑Paul défend aux filles de prêcher». — Le don des miracles. — Mort de Louise. — La publication de sa vie et de ses lettres

Appendice.

Lallemant et Rodriguez. — Le xviie siècle et les possessions diaboliques

 

 

 

 

TOME VI

Marie de l'incarnation - Turba magna

La Conquête mystique****

Avant-propos

 

PREMIÈRE PARTIE

MARIE DE L'INCARNATION

 

CHAPITRE PREMIER

MADAME MARTIN

 

I. Où placer Marie de l'Incarnation? Deux grandes écoles (Bernières, Lallemant) ont des droits sur elle. — «La Thérèse de la Nouvelle-France» doit être étudiée à part. — Richesse et splendeur de nos documents. — Dom Claude Martin et sa vie par Dom Martène. — Curriculum vitæ de Mme Martin

II. La première de ses grâces: réalisation très vive des vérités de la foi. — Nullement visionnaire. — Les oraisons jaculatoires de Mme Guyard, sa mère. — Crise de «purification». — La grande grâce de 1620 : «porte ouverte» sur la vie mystique. — Dernières préparations. — Son directeur lui défend «de plus méditer». — À la tête d'une grande maison de commerce

III. «La tendance»; pressentiments, attente d'une grâce plus sublime. — «Exubérance» affective; appel à un «état plus épuré». — Possession et privation. — «L'Humanité de Notre‑Seigneur» de moins en moins sensible

IV. Le premier ravissement (1626). — «Vue de la très sainte Trinité». — Critique de cette expérience: elle ne lui a rien «appris». — De la science des théologiens à la connaissance‑contact des mystiques. — Ravissement, non révélation. — On voit que «ce que l'on expérimente est conforme à la foi de l'Église». — « L'âme se trouvait dans la vérité». — « Ces grandes choses ne s'oublient jamais»

V. Le second ravissement (1628). — En quoi il ressemble au premier et en quoi il s'en distingue. — «La grâce présente était pour l'amour et par l'amour.» — Union des plus intimes avec le Verbe incarné. — Elle se croit arrivée au terme; elle n'est pourtant qu'au premier pas de sa course. — De la quiétude aux transports et des transports à la quiétude. — Martyre du silence, et martyre des mots impuissants. — Epithalames. — Les cantiques de «la volonté seule». — Vers un état nouveau «au‑dessus de tout sentiment»

 

CHAPITRE II

La mère et le fils

 

I. Mme de Chantal et Mme Martin; une mère a‑t‑elle le droit d'abandonner son fils pour entrer au couvent? — Abraham et l'ordre de Dieu. — La véritable difficulté de ce cas de conscience: comment savoir que Dieu exige un pareil abandon? — La vocation de Mme Martin. — Fugue du petit Claude. — Le départ pour le couvent

II. Claude bourreau de sa mère. — Le siège du couvent par une bande d'enfants. — «Rendez‑moi ma mère!» — Marie devait‑elle rebrousser chemin? — Angoisse de la mère. — Vocation de Claude

III. Le cas de conscience discuté de nouveau, dix et vingt ans après. — La revanche de Dom Claude. — «Je me suis fait mourir toute vive». — « J'ai eu des sentiments de contrition de vous avoir fait tant de mal.» — La vraie pensée de Mme Martin sur ce cas de conscience. — À la place de son directeur, qu'eussions‑nous décidé?

 

CHAPITRE III

LES TENTATIONS DE DOM CLAUDE ET SON MARIAGE AVEC LA DIVINE SAGESSE

 

I. Claude Martin avant le départ de sa mère pour le Canada (1631‑1639). — La famille de Mme Martin veut se servir de Claude pour empêcher ce départ. — Conversion de Claude. — Il veut entrer dans la Compagnie de Jésus. — Le P. Binet le refuse. — Sourd et faible d'esprit? — Les traits malicieux de Dom Martène. — Essai d'apologie pour le P. Binet: s'il a refusé le fils de Marie de l'Incarnation, il a eu pour cela des raisons au moins plausibles. — Claude quelque peu singulier peut‑être. — Claude ne pense plus à se faire religieux. — En quête d'une situation. — À la veille d'être pris comme secrétaire par Richelieu, il entre chez les bénédictins de Saint‑Maur

II. Épreuves extraordinaires de Dom Claude pendant vingt ans. — Tentations; scrupules. — Il veut quitter l'étude, qui lui paraît trop distrayante. — Tentations plus importunes: «jamais aucun saint (n')en a souffert de plus horribles». — Dom Martène et l'étrange détail de ces tentations. — Martène et Rancé. — Sages conseils de Marie de l'Incarnation: «Ne désistez point de faire la charité à cette bonne dame». — Violents remèdes; le buisson de groseilliers. — La corde soufrée. — Les orties. — Évolution de Dom Claude: des Pères du désert aux mystiques du moyen âge; de ceux‑ci aux mystiques de la Contre‑Réforme. — Il finira par où sa mère avait commencé

III. «Mariage avec la divine Sagesse». — Qui est‑elle? — Amour humain et amour divin. — «Talis conformitas maritat animant Verbo». — Les articles du contrat. — La solennité du mariage. — L'anneau d'or. — Notes intimes de Dom Claude: Suso et Nicole. — Guérison de Dom Claude. — Le prestige de sa sagesse dans la Congrégation de Saint‑Maur

 

CHAPITRE IV

MARIE DE L'INCARNATION, D'APRÈS SES LETTRES ET LES TÉMOINS DE SA VIE

 

I. Le voile levé. — Une vraie femme. — Marie et les scènes de son directeur. — Défaites successives de Dom Raymond. — Premiers projets de départ pour le Canada. — L'aigle et les petits oiseaux. — Marie s'adresse aux missionnaires jésuites. — Nouvelles scènes de Dom Raymond

II. Le style des lettres. — Désir de plaire. — Enjouement et mélancolie: «Rires dans la rue; pleurs à la maison». — Tout l'intéresse, l'attendrit ou l'amuse. — Un aventurier français. — M. de Repantigny, «courtisan» et mystique. — M. d'Argenson. — Marie et Mgr de Laval. — «Mort à tout; s'il ne l'était pas tant, tout irait mieux.» — «Cependant on roule»; défrichons notre jardin. — Dévots et dévotes sauvages. — «Colloques à haute voix» devant les Hurons. — Les dix robes de serge rouge

III. Son visage de tous les jours. — Contradictions et persécutions. — «En butte à tout le monde», et même au «monde saint». — Les «persécuteurs» ont des alliés dans le couvent. — Soupçons injustes; humiliations; froideurs. — Les vraies causes de l'antipathie que lui témoignent certaines de ses religieuses. — «L'huile et le vin.» — L'histoire du petit brasseur: le grand exorde de Dom Claude; la lettre‑pastiche; lecture publique de la lettre et «divertissement» des Sœurs. — L'inspirateur probable de la lettre et son témoignage. — Le portrait par Dom Claude

 

CHAPITRE V

LA VIE INTENSE DES MYSTIQUES D'APRÈS L'EXPÉRIENCE LA DOCTRINE DE MARIE DE L'INCARNATION

 

I. L'agonie et la mort des puissances. — Activité intellectuelle des faux et des vrais mystiques: Antoinette Bourignon et le pseudo‑Denis. — Tendance naturelle de Marie aux jeux de l'esprit. — L'intelligence maîtrisée d'abord par l'amour: «L'âme ne pense point à voir, mais à aimer». — L'intelligence mystiquement «suspendue» bien avant la volonté. — Anéantissement progressif, saillies intermittentes, et suspension de la volonté

II. La vie souterraine des puissances pendant la suspension.

A. Vie intellectuelle. — Le rythme mystique: aspiration, respiration. — «Je ne laissais pas d'être instruite», sans avoir reçu aucune «leçon». — « Je sens pulluler en mon esprit une suite de passages de l'Écriture sainte». — Acquisition mystérieuse de «nouvelles connaissances». — « Le tout est dans la substance de l'esprit.» — Adhésion, non aux images du réel, mais au réel lui‑même. — L'âme a vie dans le Verbe. — Les deux manières de se représenter le Verbe incarné. — Inertie et entretien continu de l'intelligence. — Activité surprenante qui suit la contemplation

B. Vie morale. — Apathie scandaleuse des mystiques. — Malgré la suspension de la volonté, la vie morale n'est aucunement suspendue, et tout au contraire. — «Une espèce de nécessité… de l'imitation de Jésus‑Christ.» — «Pente continuelle» à toutes les vertus. — Adhésion, non à des idées de sainteté, mais à la sainteté même de Dieu. — Marie passe à l'offensive et critique l'ascèse commune. — Fragilité des résolutions ordinaires; celles que prennent les mystiques «demeurent imprimées dans l'âme». — Comment l'expérience mystique supplée aux examens de conscience. — «Dieu me possédait par les maximes» de l'Évangile. — Efficacité morale des grâces mystiques. — Moralistes et mystiques

III. Jeu normal et simultané de toutes les activités, mystiques et non mystiques, de l'âme. — Que la suspension des puissances n'est pas un bien en soi. — Et qu'il vaudrait mieux que l'ordre naturel fût maintenu. — Catherine de Sienne pâmée; la sainte Vierge debout. — Possibilité et réalité d'une union mystique, plus haute, qui ne paralyserait point les facultés. — «Les sens étant occupés…, l'âme en est plus libre.» — «Dieu luit au fond de l'âme.» — Deux âmes, deux vies parallèles. — Tentations et faiblesses des mystiques: video deteriora; meliora sequor. — «Région de paix, qui semble séparée de l'âme même.» — Les activités les plus divertissantes n'empêchant plus la vie mystique. — Promenade; broderie d'art; récréation; chant des psaumes. — Courte psychologie des moralistes, comparée à la psychologie des mystiques. — «Interaction» des deux vies. — Marie de l'Incarnation et l'apologie des mystiques

 

CHAPITRE VI

DOM MARTIN ET DOM MARTÈNE

 

I. Dom Martène, le disciple‑type. — Une réfutation vivante de M. de Rancé. — Première rencontre avec Dom Martin. — Il écrit au jour le jour la vie de son maître. — Les saints modernes de l'ordre bénédictin. — Le siège de Dom Claude et les premières interviews. — Les entretiens de Dom Claude et de Martène reproduits à l'heure même. — Martène s'exile pour suivre Dom Martin: adieux à Saint‑Germain-des‑Prés. — «On avait plus d'amitié pour moi que je ne me l'étais imaginé.» — La Vie publiée malgré les supérieurs de Saint‑Maur

II. Les défauts de cet ouvrage. — En faut‑il regretter les «puérilités»? — La vie réelle à Saint‑Maur: «la hotte sur le dos». — Les récréations. — La cellule ouverte. — «Une loutre.» — La casuistique des saints. — Le cardinal de Retz et le feu à Marmoutier. — Le voleur récompensé. — Rôties au vin d'Espagne et verjus confit. — La cuculle. — Parades d'humilité. — La mère et le fils

III. Que les bénédictins ne font pas vœu d'érudition. — Dom Claude et les grandes éditions patristiques de Saint‑Maur. — Le saint Augustin, les Pères grecs. — Dom Martin critique. — Étude et prière

IV. Dom Claude et le gouvernement de Saint‑Maur. — Crise intérieure. — L'élection de 1687 et l'exclusion donnée par Louis XIV. — Loyalisme monarchique de Martène: tout est pour le mieux. — Ce que les mécontents pouvaient reprocher à Dom Claude. — Contre le luxe des bâtiments. — Les servants de messe. — Dilexi decorem domus tuæ. In pace locus ejus

V. Les derniers jours. — Le Phédon de Martène. — Les entretiens des deux moines et les lectures de Martène. — La dissipation de Martène: «Cela est‑il plus beau que Jésus‑Christ?» — «Hé bien! Dom Edmond…» — Le Viatique. — «Sancte Claudi, ora pro nobis.» — «Je lui donnai encore un baiser.» — Sancti Claudi et Edmunde, o. p. n.

 

 

 

SECONDE PARTIE

TURBA MAGNA

 

CHAPITRE PREMIER

AUTOUR DE JEAN DE BERNIÈRES

 

I. L'ouvrage de M. Souriau sur Bernières nous permet d'abréger beaucoup ce chapitre. — Originalité du groupe: son chef est un laïque. — Succès prodigieux des livres de Bernières. — Médiocrité littéraire du groupe. — Rigorisme. — Orthodoxie foncière

II. Le vrai chef du groupe: le P. Jean‑Chrysostome. — La «Société de la sainte abjection». — Chrysostome, son biographe Boudon, et les louanges du Pur Amour. — «Mourir à tout propre intérêt…, pour spirituel qu'il puisse être.»

III. Henri‑Marie Boudon, grand archidiacre d'Évreux. — Son zèle pour la réforme ecclésiastique. — Haines qui le poursuivent. — Huit ans victime d'une infâme calomnie. — Son évêque, Mgr de Maupas, l'abandonne. — Sérénité de Boudon. — Il continue quand même sa mission réformatrice. — L'acharnement de Maupas

IV. Les écrits de Boudon: cœpit facere. — Ses méditations sur la calomnie, «la contradiction des bons», et «l'abandonnement… des amis». — « Il y a de leur faute à se laisser tromper.» — Bienheureux les calomniés! — «Dieu seul»… — Graves défauts de ses livres. — Que, malgré tout, il se laisse lire. — Belles pages. — Offensive contre les lettrés: inefficacité de leurs livres pieux, qui, souvent, ne se vendent pas. — Éditions innombrables des petits livres de Boudon

V. Le voyage d'Allemagne, 1683. — Pour les punir, Dieu leur a donné «les délices de la vie». — Ferveur de la Bavière. — Des amis partout. — Autres missions; rêves de solitude. — M. Boudon à Saint‑Cyr. — M. Boudon, Mme de La Maisonfort, Bossuet et Fénelon

 

CHAPITRE II

LE MYSTICISME FLAMBOYANT ET LES MYSTIQUES DU SILENCE

 

§ 1. Jeanne de Matel.

I. Jeanne de Matel et le mysticisme flamboyant. — Les vues et les «états». — Oubli des consignes ordinaires de l'humilité. — Le silence de la Mère de Chatel. — La sainte chambrière de Billom. — Le P. Gibalin et l'indiscrétion apparente de Jeanne. — Pourquoi «un morne silence»? — Les Apôtres ont‑ils caché les faveurs de Dieu? — Humilité vraie de Jeanne

II. Un intellectuel converti à la mystique. — Jeanne et «l'éclaircissement des mystères de la foi». — Une théologienne précoce. — Elle sait miraculeusement le latin. — La «Parole substantielle du Père» lui donne l'intelligence des Écritures. — Dedi te in lumen gentium. — Une «extension» de «l'Incarnation». — « Je veux te parler par l'Écriture». — Saint Michel, saint Jérôme, saint Denis. — Qu'il s'agit bien et expressément d'une mission doctrinale; fausse honte et inconséquence des panégyristes de Jeanne

III. Jeanne défendant elle‑même sa mission. — «Ni la lecture, ni l'étude» ne suffiraient à expliquer un tel prodige. — Les écrits de Jeanne «témoignent à eux seuls d'une inspiration». — Jeanne se rencontre avec les théologiens qu'elle n'a pas lus. — «N'as‑tu pas le sens littéral et l'Archive tout entière?» — Sans lectures; sans réflexions personnelles, Est‑ce bien vrai? — Ce que Jeanne a pu apprendre «hors de l'oraison»

IV. L'or et le clinquant d'Ernest Hello. — Digression sur le style prophétique. — Définition insuffisante du génie de Jeanne. — Que Jeanne ressemble à tous les poètes chrétiens. — Qu'il ne faut pas la lire de trop près. — Cataractes de symboles: l'habit blanc, rouge et bleu des religieuses du Verbe incarné. — La Mère portière et le lion de Juda. — Marie et la colombe de l'Arche. — Du sublime au médiocre. — Mièvreries dévotes. — Les cheveux de Madeleine

V. Le vrai génie de Jeanne; spéculation et sensation théologiques. — Orchestration du Credo. — «Je dis.» — Le «sabbat parfait» et la circumincession. — Ses vues sur l'Incarnation. — Une scotiste inspirée: In initio viarum suarum. — «Bien qu'Adam n'eût pas péché, le Verbe se fût incarné.» — «Cette chair a servi à nous rendre palpable le Verbe.» — Vexilla regis. — Rien d'imprévu. — L'illusion de Jeanne

§ 2. — Marguerite Romanet et Catherine Ranquet.

I. Nous ne savons rien de sa vie. — Son «style particulier». — La journée d'une contemplative vers 1650. — «Il me semble de ressusciter.» — «Je le sens tout de myrrhe.» — Son oraison. — Les «dilatations» de l'amour. — Les communions. — Les actes donnée et les actes voulus. — Prières pendant la journée. — Ingénuité et profondeur. — Elle dit ce qu'elle «sent» comme elle le sent

II. Ses notes spirituelles. — «Celle qui a écrit. » — La nuit mystique. — La connaissance mystique «qui est des mêmes vérités qu'elle a appris des hommes». — L'âme «qui roule autour de Dieu». — « Il lui ôte… sa propre pesanteur.» — S'unir « à la vérité qui se cache ». — La plus noble de toutes les vies

III. Commentaire du Cantique. — «Séparez-moi du sang et de la chair.» — Murenulas aureas; «l'ouïe est le sens le plus utile dans la religion». — « Vos yeux sont comme ceux des colombes.» — «Je suis la fleur des champs.» — «La Judée ne portait que des épines.» — L'ombre de Jésus. — Ses «bras étendus en forme d'ailes pour faire une ombre plus étendue». — Le témoignage de Marguerite

IV. Catherine Ranquet. — Le don et le goût d'écrire. — Tentation de superbe. — L'empreinte bérullienne. — Plus occupée de la présence que de l'histoire de Notre-Seigneur. — Effets de connaissance rétroactive. — Plus d'autre mot que: oui, et encore celui-ci n'est-il ni « assez simple, ni assez court». — Contemplation plus facile en dehors de l'exercice de l'oraison. — Oubli apparent de la sainte Vierge. — Folie de la crèche et folie de la croix

§ 3. — Antoinette de Jésus.

I. Naissance d'Antoinette Journel. — Son mariage. — Le soldat pendu. — Le groupe mystique de Compiègne : Condren, le P. Marin et la sœur Barbe. — L'initiation d'Antoinette. — Son indépendance. — L'abbaye de Sainte-Perrine. — Anne de Bonneuil et les deux simplicités. — Prestige d'Antoinette. — Personne ne l'a fait souffrir

II. Le style d'Antoinette. — Une Sévigné cloîtrée. — À une religieuse qui avait pensé mourir. — Le don de n'y toucher pas. — L'éloquence. — Sa direction spirituelle. — Énergie, souplesse, tendresse. — «Moelle de lion.» — L'impuissance des mots: «Le silence est notre langage». — Qu'on ne peut écrire la vie des mystiques

III. Le développement d'Antoinette. — Première phase: Avant la retraite de 1649. — L'école française. — Extrême liberté d'esprit. — Les tentations. — La retraite de 1649. — Rien de nouveau que l'intelligence de ses voies. — «Je l'avais ignoré, mais beaucoup ressenti.» — Antoinette et le panthéisme. — Angoisse intellectuelle. — Le «rideau» tiré. — Les «états» et «l'essentiel» du Verbe incarné.

IV. Les trente dernières années (1649-1678). — Que la vocation particulière d'Antoinette s'adaptait merveilleusement à sa nature et ne doit pas nous surprendre. — En tout, «l'essentiel». — « Mort totale» à tout ce qui n'est pas Dieu. — Devoirs communs de la piété catholique. — Les sacrements et la vie mystique d'Antoinette. — Son credo. — Mystici in tuto. — Obéissance aux directeurs. — Le P. Le Sergent. — Étapes mystiques. — Le retour au «néant» sur l'ordre du P. Marin. — L'amour pur et l'inexprimable

 

CHAPITRE III

FRANCE MYSTIQUE

 

I. Flandre, Picardie, Champagne, Lorraine. — Jeanne Deleloë et Martin Gouffart. — Marguerite Rondelet. — François Mathon. — Marie Dorizy. — Élisabeth de Ransain. — Agnès Dauvaine. — Catherine de Bar. — Marie‑Thérèse Erard

II. Paris. — Madeleine de Neuvillette; — Élisabeth de Baillon

III. Franche‑Comté, Bourgogne. — Anne‑Marguerite Clément. — Marguerite de Saint‑Xavier. — Pierre Chaumonot. — Marguerite‑Marie Alacoque et Claude de la Colombière. — Claude, précepteur des fils de Colbert. — Liaison avec Patru. — Discours académiques. — La Colombière et Bouhours. — Le parfait jésuite. — Que le P. Claude n'est pas à proprement parler mystique. — Vers la fin de sa vie, orienté vers la contemplation. — Les visions de Paray‑le‑Monial. — Claude en Angleterre

Lyonnais, Auvergne. — Jacques Crétenet. — Un autre Bernières. — «Frater» chirurgien. — Mariage. — Madeleine de Saint‑François et sa propagande mystique. — Un chirurgien directeur spirituel. — La persécution. — La sainteté et la doctrine de Crétenet. — Marie Paret

IV. Savoie, Dauphiné. — Françoise Monet. — Louise de Ballon. — Jeanne-Bénigne Gojoz et la Mère Élisabeth de Provane. — Marie Bon. — Benoîte Rencurel. — Lourdes au xviie siècle; N.‑D.‑du‑Laus. — «Quoi! Monsieur, vous ne la voyez pas!»

V. Comtat, Provence. — Julienne Morell. — Esprite Joussaud. — Antoine Yvan et Madeleine Martin. — Agnès d'Aguillenqui. — Catherine du Revest. — Christophe d'Authier de Sisgaud, évêque de Bethléem. — Renée Fedon. — Jeanne Gautier

VI. Languedoc, Guyenne, Périgord. — Germaine d'Armaing. — Marie de Sainte‑Thérèse. — Alain de Solminiac

VII. Les Recueils. — Deux vocations: M. de Pontis et Fleurette de Casassus. — Anne de Beauvais et son professeur de piano

 

CHAPITRE IV

LA PROPAGANDE MYSTIQUE: JEAN DESMARETS ET LES DÉLICES DE L'ESPRIT

 

§ 1. — La conversion de Philédon

I. Le R. P. Poulain et Desmarets: «une vraie connaissance des états d'oraison». — Affabulation des Délices. — Desmarets tour à tour Eusèbe et Philédon. — Les étapes d'une conversion. — La cabane des plaisirs charnels; les Arts; les Sciences. — Le Palais de la Fortune: Desmarets chez le cardinal

II. La mort de Richelieu et la conversion de Desmarets. — Avait‑il perdu la foi? — L'apologétique pascalienne et newmanienne avant Pascal et Newman: certitudes qui se forment «dans les plus hautes parties de l'âme». — « Je veux te prouver par ton goût même qu'il y a un Dieu». — « Je te le ferai connaître au‑dessus de tout raisonnement». — « Tu es seulement fugitif de sa lumière». — Les «appartements de la Logique» et l'anti‑intellectualisme de Philédon. — Croire; goûter; connaître. — Dialectique du goût: Gustate et videte quam suavis est. — Les Délices et le Génie du christianisme 2

III. L'échelle des plaisirs. — Délices de la musique et rançon amère de ces délices. «Nous ne pouvons plus souffrir les médiocres». — De la Poésie. — Raisons mystiques et scrupules religieux qui ont présidé à la croisade menée par Desmarets contre les poètes païens. — La Philosophie morale. — Duel entre l'Amour et la Chasteté. — Infirmités de la morale séparée: ascétisme et mystique. — Suprêmes résistances de Philédon. — Découragement d'Eusèbe. — La conversion de Philédon: «Soudain je me suis senti frappé.» — « Voilà devant vous ce cheval échappé…» 0

§ 2. — Lendemains de conversion.

I. Les années mystiques (1645‑1660). — Sérieux profond des Délices — À peine converti, devint‑il «un dévot effréné» et fanatique? — Longues années de recueillement. — «Les promenades de Richelieu.» — Desmarets admis dans le petit monde des saints. — Directeur laïque. — Aucun indice d'exaltation morbide 8

II. La crise (1660‑1666). — Première croisade: l'Avis du Saint‑Esprit au Roi. — L'armée qu'il veut lever est purement mystique; elle ne compte pas sur «la force des armes temporelles». — Une confrérie de «victimes». — L'Avis et la Société pour les intérêts de Dieu. — La Compagnie du Saint‑Sacrement et la Société. — Desmarets sera chargé de la police secrète. — Son coup d'essai: le bûcher de Simon Morin. — L'offensive contre le diable. — Desmarets se tourne contre Port‑Royal. — Réponse à l'insolente apologie. — Arnauld mis en filature. — Heureux succès de cette chasse: M. de Saci à la Bastille. — Les délices de l'espionnage 3

III. Les dernières années (1666‑1675). — Difficulté de mener de front l'oraison de quiétude et des opérations de police. — Non in commotione Dominus 2

§ 3. — Initiation de Philédon à la vie mystique.

I. L'architecture et les arts décoratifs dans leurs rapports avec la vie intérieure. — «Ce ne sont que festons…» — G. de Scudéry. — Desmarets, architecte et poète de l'architecture. — Les Amours du Compas et de la Règle. — L'architecture dans les Délices. 3

II. Philédon accueilli dans la Cité de l'Intérieur. — Les appartements de la Foi. — La loge de l'Humilité et le Cachot du Néant. — Les balcons de l'Espérance. — Les trente‑trois cavernes de l'Obéissance. — Chambre de la Pureté; Desmarets directeur. — Grotte de la Patience. — Temple de l'Amour divin. — Les missions étrangères et le musée de la marine. 7

III. Les trois salles de la sainte Oraison. — Chambre de la Contemplation, de l'Union. — Suspension des puissances. — La conquête mystique et Jean Desmarets. 1

 

 

Excursus

François Marxer, «Cette curiosité des états mystiques qu'il lui était interdit de vivre »

Claudel, Mounier, Maritain, Du Bos, lecteurs de Bremond

Madeleine Delbrêl: «Dans la première conversion, l'on ne cède que l'usufruit, dans la seconde la propriété de son âme»

Les philosophes entre réformisme et dogmatisme: Emmanuel Mounier, Jacques Maritain, Étienne Gilson

Charles Du Bos: «Pour tant d'entre nous, le donateur de Bérulle, de Condren, du père Lallemant»

«Soutenu par Dieu, et orienté par Lui – qui se servit de mon ami Henri Bremond… »

« Ce cœur large de Bérulle… »

Claudel lecteur de l'Histoire littéraire: «Quoi de plus tragique que la lutte de l'invisible contre tout le visible? »

L'École française: «… pour satisfaire le désir extrême que Dieu a de nous» 4 Philosophie et/ou théologie de la prière: «prière pure» ou «impétrations hardies» ?

Le Dieu de Bremond et le Dieu de Claudel

 

 

Volume III

 

 

Jacques Le Brun, Henri Bremond et la «métaphysique des Saints»

 

 

tome VII

La Métaphysique des saints*

Avant-propos

 

PREMIÈRE PARTIE

les maîtres des maîtres saint François de sales et pierre de Bérulle

 

CHAPITRE PREMIER

FRANÇOIS DE SALES ET LA PRIMAUTÉ DE LA PRIÈRE

 

I. Définitions de la prière. — Complexité de la prière concrète. — «Élévation» et «Demande». — « La prière en soi n'est pas nécessairement demande.» — Le mendiant pur ne prie pas. — L'élévation fonde la demande et la précède. — Les tuum et les nostrum du Pater. — C'est parce qu'elle est d'abord acte de religion que la demande est aussi prière. — «Dieu est naturellement le plus cher.»

II. Le panhédonisme religieux. — La prière fin et la prière moyen. — Deux directions principales de l'anthropocentrisme. — La prière plaisir. — Préjugés sur la piété janséniste. — Pascal et Port‑Royal ralliés à la psychologie panhédoniste des libertins. — «On ne quitte les plaisirs que pour d'autres plus grands.» — Le panhédonisme de Bossuet

III. L'ascéticisme. — M. F. Vincent et la supériorité de l'«ascétisme moral» sur «l'ascétisme de religion». — Loi du progrès chrétien. — François de Sales et les jésuites auraient «identifié… le christianisme au progrès moral». — Parallèle entre le bénédictin et le jésuite. — Louange de Dieu et culture du moi. — La vraie religion ne serait pas autre chose que «la culture de nous‑mêmes»

IV. Le théocentrisme de françois de sales. — «Toutes choses sont créées pour l'oraison.» — Le «culte du moi» constamment subordonné à la prière. — Aimer les vertus d'abord parce que Dieu les aime. — Oubli et dépouillement de soi

 

CHAPITRE II

FRANÇOIS DE SALES ET LA PHILOSOPHIE DE LA PRIÈRE

 

I. La fine pointe. — La distinction traditionnelle entre Animus et Anima. — Genèse de cette distinction dans l'esprit de François de Sales. — Le Saint des Saints

II. La grâce sanctifiante et la passivité initiale. — Le don premier, toujours offert, et qu'il faut s'approprier

III. L'activité humaine dans la prière: acquiescement; adhérence. — L'acte religieux en soi. — Laisser «vouloir et faire à Dieu». — Bossuet et François de Sales. — «Cet acte comprend seul tous les actes.» — L'extase de la volonté

IV. Critique de la volonté. — La volonté humaine «réduite et trépassée en la volonté de Dieu». — Anéantissement volontaire

V. Critique de la sensibilité. Le chantre sourd. — «Sentir n'est pas consentir». — La prière de sainte J. de Chantal. — Le chantre sourd

VI. Directions pratiques. — «Si le cœur ne le voulait, la bouche n'en dirait pas un mot.» — Credidimus charitati

VII. Passivité terminale. L'état de prière. — Une fois «amorcée», l'âme demeure en la «présence divine». — La vraie quiétude. — La statue

 

CHAPITRE III

FRANÇOIS DE SALES ET PIERRE DE BÉRULLE. DE LA «FINE POINTE» AUX «ÉTATS»

 

Condren ou Séguenot? — Une Somme bérullienne de la Prière. — Une maladie nouvelle dans les milieux dévots. — Idées fausses que l'on se forme de l'oraison. — On «s'en imagine des merveilles»

§ 1. De l'activité divine et de l'humaine dans la prière. — L'activité humaine incapable de nous «référer à Dieu». — Seule nous y réfère la grâce. — Une action «si peu nôtre». — «Soumettre» notre esprit à l'Esprit de Dieu. — Les «belles pensées»

§ 2. Les «actes» et les «états». — «II se passe en vous des choses que vous ne connaissez pas.» — Zone secrète de l'âme «où la grâce réside principalement». — Passage de la «fine pointe » aux « états». — Adhérence, par état, et «repos de Dieu». — Identité foncière de la philosophie salésienne et de la bérullienne

 

CHAPITRE IV

J.‑P. CAMUS ET LE PANMYSTICISME SALÉSIEN

 

Camus et la tradition orale de François de Sales

§ 1. L'originalité de la philosophie salésienne. — Proposer de la théologie mystique «le côté le plus… clair, le plus sain»

§ 2. Critique du mysticisme moderne. — Les grands trois, Ruyesbrock, Tauler, Harphius, maniaques de la «passiveté»

§ 3. Réconciliation avec les mystiques modernes. — Rien de ce qu'ils enseignent qu'on ne puisse pratiquer avec la grâce commune»

§ 4. La substitution libératrice. — «Infus» au lieu de «Passif»

§ 5. Critique de l'ascéticisme

§ 6. Facilité de la contemplation. — Le panmysticisme salésien

 

 

 

 

 

 

 

 

DEUXIèmE PARTIE

développements et propagande

 

CHAPITRE PREMIER

LE PÈRE HERCULE (1603‑1656)

 

I. Les papiers de Conrart. — L'oncle maternel de Fléchier. — Hercule et Godeau à Grasse

II. Hercule et l'éloquence de la chaire. — Oraison funèbre de Marguerite de Jésus. — De profundis. — La voix de la prière. — Oraison funèbre de Jeanne de Lorraine. — «Moi qui découvrais son sentiment dans le son de sa voix.»

III. Les opuscules du P. Hercule. — La rhétorique des couvents. — Retraites par correspondance — Direction des religieuses

IV. «La Science de l'oraison. Dialogue fait en Provence, vers la grotte de sainte Magdelaine.» — «Unité de sujet et d'application.» — Détresse d'Olympie — «Oraison d'état.» — «Oraison de pénitence.» — Ironies de Parthénope. — Le pur amour et la critique de la dévotion sensible

 

CHAPITRE II

JEAN‑BAPTISTE NOULLEAU (1604‑1672) ET «L'ESPRIT DU CHRISTIANISME»

 

I. Les épreuves de j.-b. noulleau. — Noulleau et l'Oratoire. — Vilazel et Louis XIII. — Le «Sénat de l'Église». — Noulleau et son évêque. — L'interdiction

II. «L'esprit du christianisme.»

§ 1. Le tout de Dieu. — Adoration d'abord. — «Dévotion singulière à la Sainteté divine.»

§ 2. « Dieu de Jésus‑Christ.»

§ 3. « Omnia et in omnibus Christus.» — Les trois formules de la religion chrétienne — «Sainte superbe» du chrétien

§ 4. La Prière chrétienne. — «Trajet perpétuel de nos âmes à Dieu par Jésus‑Christ.» — «Adhérer à Jésus‑Christ.» — Méditation et prière

§ 5. La «sainte Grandeur» et la «Politique chrétienne». — Le devoir social des grands. — «De la tragédie de ce monde.» — Lois et obligations à part

§ 6. La «Conjuration contre les blasphémateurs». — Le blasphème pendant la première moitié du xviie siècle. — La croisade confiée à la Compagnie du Saint‑Sacrement. — Organisation de la croisade. — Noulleau et le «Catholicisme social»

§ 7. Le pur Amour. — «Toute l'âme et tout l'esprit» du christianisme. — «Affectif» et «effectif». — « L'union sympathique des cœurs.» — Supériorité des vertus «passives»

§ 8. Pur Amour et Pénitence. — L'espérance et l'amour désintéressé. — Que les pécheurs doivent tendre au pur amour

 

 

 

 

 

CHAPITRE III

LE PÈRE PAUL DE LAGNY (?‑1694) ET LE PANMYSTICISME FRANCISCAIN

 

I. De Harphius à Canfeld. — Une somme de la mystique franciscaine. — Ouvrir la carrière mystique à toute âme en état de grâce. — Abondance de «chemins abrégés», de «secrets», de «moyens courts». — « Chemin abrégé» et non «voie large»

II. Trois étapes: vertus morales; théologales; pur amour devenu comme habituel

III. Distinction capitale entre «théologie mystique», ou haute contemplation, et «vie mystique», la première, privilège de quelques‑uns, la seconde proposée et facile à tous

 

CHAPITRE IV

FRANÇOIS DE CLUGNY (1637‑1694) ET LA MYSTIQUE DES PÉCHEURS

 

I. Boucs et corbeaux. — Aigues‑Mortes. — Marguerite de Beaune. — Clugny oratorien. — Dijon. — Les Bénéfices. — Humour, vertu et orthodoxie

II. La mystique des pécheurs.

§ 1. « L'état de pécheur», qui n'est pas «le moins propre… à faire des saints». — L'Enfant prodigue et la Chananée. — À bas le péché, vive «le poids du péché»! — Paradoxe sur les délais de la confession. — Les conversions orgueilleuses et les nouveaux riches de la sainteté

§ 2. L'oraison et l'activité mystique des pécheurs. — Pas de «belles pensées», pas de littérature. — Molière et Clugny. — Il ne permet aux pécheurs que la prière même des saints. — Oraison des innocents et oraison des pécheurs. — Critique des méthodes; de la sensibilité dévote; des activités intellectuelles. — Les pécheurs et l'oraison de silence

 

CHAPITRE V

LE VIGNERON DE MONTMORENCY ET L'ÉCOLE DE L'ORAISON CORDIALE

 

I. Querdu Le Gall et l'Oratoire du cœur. — Le Gall et ses «feuilles» illustrées. — Sur la piste d'une école mystique oubliée. — La Pléiade de l'«Oraison cordiale». — Le Vigneron de Montmorency, et «L'ouverture du Royaume de l'Agneau occis ». — Jean Aumont et ses «docteurs»

II. La doctrine du Vigneron.

§ 1. La cave. — Allégories familières. — La cave et la fine pointe. — Le «palier» de l'intelligence. — Du grenier à la cave. — «Racine fontale», « vase central»

§ 2. L'Alambic. — L'âme «triple‑essentiée» dans les «fourneaux», de l'amour. — Qu'il ne faut renoncer ni aux notions ni aux images

§ 3. Les renards et le jansénisme. — Le «museau pointu» de l'amour-propre. — L'anti‑mysticisme de Port‑Royal

§ 4. Violence et Prière. — Critique de l'ascéticisme. — L'ordre de Dieu renversé.

§ 5. Les activités de prière et «l'amortissement du propre esprit naturel». — Méthode d'initiation à la vie mystique

III. l'École de l'oraison cordiale. — La propagande. — Les autres méthodes. — La composition de lieu ignatienne. — «Des applications» progressives des puissances. — L'école et ses adversaires

IV. Les images. — Celles d'Aumont et leurs symbolismes peu cohérents. — Celles de Le Gall qui se contentent de figurer le recueillement progressif de la prière. — Les «portes». — Les rééditions de 1774 et de 1839

 

CHAPITRE VI

LE PÈRE LOUIS THOMASSIN (1619‑1695) ET LA PRIÈRE PURE

 

I. De Platon à Bérulle. — Aix‑en‑Provence et les Thomassin — Saint‑Magloire et Port‑Royal. — «L'Institution.» — Les «méthodes d'étudier et d'enseigner chrétiennement»

II. Le «Traité de l'office divin».

§ 1. À la recherche de la prière pure. — Thomassin et la Liturgie. — La Fine pointe et la Grâce sanctifiante — Charitas ipsa orat. — «L'oraison mentale», synonyme de «prière pure». — La prière du Désert et les pauses de silence. — Le panhédonisme de Thomassin

§ 2. Critique de l'activité intellectuelle dans la récitation de l'office. — Distinction entre «jubilation» et «psalmodie». — Alleluia et Amen. — «Prière pure» et «contemplation» § 3. Prière, musique et poésie. — La double fonction des mots

§ 4. L'état de prière. — Adhésion habituelle de l'âme. — Attention de l'esprit et attention du cœur. — Que les distractions n'interrompent pas nécessairement la prière

§ 5. L'évolution de la prière depuis les temps primitifs. — Avant les formules. — «L'oraison mentale de Noé.» — Le Pater plus qu'une formule. — Décadence de la prière. — L'excellence du Rosaire. — De la vraie primauté de l'office liturgique. — Panmysticisme de Thomassin: «L'oraison mentale répandue partout.»

 

 

 

tome VIII

La Métaphysique des saints**

 

TroisièmE PARTIE

La grande synthèse — Chardon et Piny

 

CHAPITRE PREMIER

LA CROIX DE JÉSUS

 

§ 1. « La présence de Dieu naturelle en toutes choses par Immensité.»

§ 2. « L'inclination à la Croix. — pondus — produite par la grâce en l'âme de Jésus‑Christ.» — Le poids de la gloire et le poids de la souffrance. — L'excès de confusion préféré à l'excès de gloire. — Chardon styliste. «Huile pour la gloire…, Huile pour la Croix.»

§ 3. L'état de grâce et l'inclination à la Croix. — Pour que le corps mystique ne paraisse point quelque chose de «monstrueux» il faut que «la grâce fasse» chez tous «la même pente» vers la Croix

§ 4. Présence active des trois Personnes divines dans l'âme du juste. — Les deux «Processions» et la «boucle» de l'amour

§ 5. Le «poids» crucifiant des «Missions divines». — Critique des consolations. — Désolation et Pur amour

§ 6. La catharsis «déiformante». — Vers la contemplation pure. — Mort progressive des activités de surface

§ 7. L'ancien Testament et la mystique de la Croix. Élie et Jacob

 

CHAPITRE II

Alexandre Piny ou le maître du pur amour

 

I. Aix‑en‑Provence. — Vie dominicaine du P. Piny. — Les approbateurs de ses livres. — Piny et Alexandrin de la Ciotat

II. La doctrine

§ 1. Idée générale du système. — Le «Pur Amour», acquiescement à la volonté de Dieu. — Vouloir ce que Dieu veut; ne vouloir que ce que Dieu veut; le vouloir parce que Dieu le veut. — Amour de la croix

§ 2. Le premier commandement et la voie du pur amour. — Facilité des actes du pur amour; héroïcité d'une vie de pur amour. — L'Église et le pur amour

§ 3. « Faire» et «Laisser‑faire». «II vaut mieux le laisser‑faire à Dieu que le faire par nous‑mêmes.» — L'objection. — Le champ précis du «laisser‑faire». — «Laisser‑faire», synonyme de «vouloir». Critique du «faire»

§ 4. Le combat spirituel et le «laisser‑faire». — La lutte contre les imperfections. — Bienheureux les imparfaits!

§ 5. Le supplice des tentations et le laisser‑faire. — Refus et acceptation. — Les tentations contre la foi

§ 6. La «laisser‑faire» et l'amour désespéré. — Les mystiques et l'acceptation hypothétique de l'enfer. — Objet positif de l'acceptation. — Les prétendus «raffinements» des mystiques. — La tentation de désespoir guérie par le désintéressement absolu. — «L'oubli d'amour». — L'espérance restaurée. — Enfer et pur amour ne peuvent se regarder en face

§ 7. Activité intense du «laisser‑faire». — Vraie définition du vouloir pinien. — La volonté «purement spirituelle». — Fine pointe et grâce sanctifiante. — Le «faire», amorçant le «laisser‑faire» ou commandé par le «laisser‑faire». — Rien de plus actif que le passif. — La voie héroïque

§ 8. Pur Amour et Prière Pure. — Ascèse et Prière. — Union d'attente et union de volonté. — Critique de l'ascéticisme. — La prière continuelle

§ 9. Le petit monde du P. Piny

 

 

 

 

QuatrièmE PARTIE

L'angoisse de bourdaloue et la genèse de l'ascéticisme

 

CHAPITRE PREMIER

Les commencements de la rÉaction ascÉticiste Dans la compagniE

 

Saint Ignace et la prière. — Aucune ambition doctrinale dans les Exercices. — Ignace novateur à son insu. — Nadal et la liberté de la prière. — Les premiers spirituels de la Compagnie ne se réclament pas des Exercices. — Les Exercices menacés. — Extrême droite et extrême gauche

 

CHAPITRE II

Les «alumbrados» d'espagne et l'Épouvantail de l'illuminismE

 

I. Orientations anti‑mystiques. — L'épouvantail de l'Illuminisme. — Les Alumbrados d'Espagne. — Cano et les chasseurs d'hérésie

II. Un groupe d'illuminés parmi les jésuites d'Espagne. — Le franciscain Texeda, François de Borgia et le jésuite Oviedo. — Le duc de Gandie, jésuite. — La Vigne. — Les prophéties de Texeda. — Les extravagances d'Oviedo et les alarmes d'Ignace. — Ignace et Borgia. — Much ado about nothing. — La panique originelle

III. Causes profondes du conflit. — Intellectualistes et mystiques. — Pour ou contre la vraie prière

 

CHAPITRE III

La condamnation de balthazar alvarez

 

I. Une date critique dans l'histoire de la spiritualité. — Mercurian et la première offensive officielle contre la contemplation. — Cordeses approuvé par Borgia, condamné par Mercurian

II. Balthazar Alvarez et son oraison. — Laqueus contritus est. — Heureuse influence d'Alvarez. — Davila et les premiers coups. — Jean Suarez et le bûcher de Villeverd

III. Le panmysticisme d'Alvarez

IV. Le procès et la sentence. — La «contemplation arrachée» par Mercurian, réhabilitée par Aquaviva

V. Le R. P. Dudon et la «morale de cette histoire». — Indépendance de la prière: Sibi et Deo relinquatur. — La métaphysique implicite de Mercurian et l'ascéticisme

VI. «Stérilité» de la contemplation, excellence de «l'Oraison pratique». — Grande nouveauté de cette oraison. — Critique de l'oraison pratique

 

CHAPITRE IV

D'ALVAREZ à LALLEMANT

 

La lettre d'Aquaviva maintient et consacre la confusion initiale. — Développements de l'ascéticisme. — Alvarez de Paz et Le Gaudier. — Le «discours» supérieur à la contemplation, «quia ad praxim refertur». — Maria pejorem partem elegit. — André Baiole et la grâce sanctifiante, monopole des extatiques. — Lallemant, François de Sales, Bérulle, unanimes contre l'ascéticisme. — La «spiritualité nouvelle» de Surin, déclarée par le général Vitelleschi «peregrina..., non nostra». — La véritable unanimité des spirituels jésuites, et leur unanimité prétendue

 

CHAPITRE V

Le père crasset

 

I. Balthazar Alvarez, Crasset et «la nouvelle voie». — Les chaînes brisées. — Derniers scrupules. — Mourir au «discours». — Françoise de la Mère de Dieu, Gibieuf, Lejeune et Crasset. — La «courtine de ténèbres qu'il ne faut point éclairer»

II. «Une nouvelle forme de méditations». — Les commençants initiés à la vie mystique. — Les oraisons jaculatoires. — La «nouvelle forme» et les pauses de silence. — «Cantiques d'amour». — La «Congrégation des Laquais»

 

CHAPITRE VI

La spiritualité de Bourdaloue

 

I. Le R. P. Dæschler et Bourdaloue méconnu. — Éléments tumultueux d'une doctrine spirituelle, mais non doctrine «parfaitement cohérente». — Le «terrible sermon sur la Prière»

II. Critique du sermon. — L'auditoire coupé en deux. — L'imprudence de Bourdaloue. — «Je me suis senti inspiré». — Le semi-quiétisme français et les infamies du molinosisme. — Nouvelles imprudences: l'appel au bon sens. — «Oraison chimérique, celle dont l'Évangile ne parle pas». — Légèretés. — L'oraison «extraordinaire». — Encore «l'oraison pratique», la «plus parfaite», la seule parfaite. — Confusion perpétuelle entre prière et extase

III. Le vrai Bourdaloue, tendre, impulsif, plus que «raisonnable». — Genèse du «terrible sermon». — L'ascéticisme de Bourdaloue. — La grâce habituelle

IV. Le panhédonisme de Bourdaloue. — Pas de plaisir, pas de prière. — Nécessité de l'amour «senti». — Prime aux tempéraments affectifs. — La «sensibilité» de Madeleine

V. L'échelle des «divins plaisirs». — Le «centuple». — La «paix de Dieu», température normale de Bourdaloue. — Justes noces du devoir et du plaisir. — Les consolations. — «Pour moi…, je suis content de vous»

VI. Le troisième degré du centuple, les consolations extraordinaires. — Confusion entre les délices de la contemplation et la contemplation même. — De l'ascéticisme au panhédonisme. — Philosophie anti‑mystique, vie mystique de Bourdaloue

Éclaircissements

§ 1. — Solvuntur objecta

§ 2. — Précisions

 

Appendice

I. — LA FINE POINTE

II. — CAMUS ET LES À‑COTÉ DE LA MYSTIQUE. VISIONS, EXTASES

III. — PAGES CHOISIES DU P. HERCULE

IV. — PAGES CHOISIES DE NOULLEAU

V. — L P. de CLUGNY ET LA CONFESSION BRUSQUÉE

VI. — Louis BAIL, LE PUR AMOUR ET LES «SUPPOSITIONS IMPOSSIBLES»

VII. — PAGES CHOISIES DU FAISCEAU DE MYRRHE

VIII. — PAGES CHOISIES DE BILLECOCQ

IX. — LES THOMASSIN ET LA PROVENCE

X. — LA VIE MYSTIQUE ET LE DOYEN DE SAINT‑PAUL

 

 

 

 

Introduction

à la philosophie de la prière

 

Avant-Propos

 

PREMIÈRE PARTIE

DÉFINITIONS, DISTINCTIONS ET DISCUSSIONS

 

CHAPITRE PREMIER

LA PRIÈRE

 

CHAPITRE II

ASCÈSE OU PRIÈRE ?

 

I. LE MALAISE

II. PRIÈRE ET MÉTHODE

III. SAINT IGNACE « PROFESSEUR D'ÉNERGIE » ET NON D'ORAISON

IV. ACTIVITÉS D'ASCÈSE. — ACTIVITÉS DE PRIÈRE

V. TENSION ASCÉTIQUE DES EXERCICES

VI. LA MÉDITATION, EXERCICE D'ASCÈSE ORIENTÉ VERS LA PRIÈRE

VII. LE « DISCOURS » ET LA PRIÈRE

VIII. PRIÈRE ET RHÉTORIQUE

IX . RÉALISER ET NON SPÉCULER

X. D'UNE PRIÈRE NOUVELLE QUE SAINT IGNACE AURAIT INVENTÉE

XI. LA « PRIÈRE PRATIQUE « ET LA PSYCHOLOGIE DES « RÉSOLUTIONS »

XII. VERS LA DÉPRÉCIATION DE LA PRIÈRE

XIII. L'ASCÈSE DE LA PRIÈRE

XIV. L'INTERPRÉTATION TRADITIONNELLE DES EXERCICES ET L'HISTOIRE DE la prière

CONCLUSION. L'ASCÉTICISME

 

CHAPITRE III

LE R.P. CAVALLERA ET LA PHILOSOPHIE DE LA PRIÈRE

 

I. LA MÉTHODE CRITIQUE DU P. CAVALLERA

II. LA CRISE

III. ASCÈSE OU PRIÈRE

IV. LA CONSTITUTION APOSTOLIQUE SUMMORUM PONTIFICUM ET LA criTIQUE DES EXERCICES

V. « MALAISE » ET « COUP D'ÉTAT »

VI. ACTIVITÉS DE PRIÈRE ; ACTIVITÉS D'ASCÈSE

VII. DELENDA MEDITATIO !

VIII. « L'ORAISON PRATIQUE »

IX. SUBSTITUTION PERPÉTUELLE DU CONCRET À L'ABSTRAIT

X. UN COUP DE THÉÂTRE

XI. LES TROIS FORMULES MYSTIQUES DU P. CAVALLERA ET LA RETRAITE DE L'ASCÉTICISME

 

 

DEUXIÈME PARTIE

PHILOSOPHIE DE LA PRIÈRE

 

CHAPITRE PREMIER

NICOLE ET LA CRITIQUE DES ACTIVITÉS INTELLECTUELLES DANS LA PRIÈRE

 

I. Prélude

II. En quoi consiste l'essence de la prière chrétienne

III. Éclaircissement plus ample de la manière dont on prend quelquefois les pensées pour les mouvements du cœur

IV. Ce que c'est que l'intention nécessaire pour sanctifier nos intentions

V. De quelle sorte l'imagination nous fait tomber en diverses illusions

VI. De l'utilité des bonnes pensées, et de ce qu'on appelle oraison méthodique

VII. Abus où l'on peut tomber dans la recherche des pensées dont on s'entretient devant dieu dans l'oraison

VIII. Comme il faut pratiquer la méthode de diviser l'oraison en méditations, affections, et résolutions

 

CHAPITRE II

LA PRIèRE ET LA GRACE SANCTIFIANTE

 

DIEU SEUL NOUS ENSEIGNE À PRIER

§ 1. — Nature de la Prière

§ 2. — L'objet de la Prière

§ 3. — Qualités de la Prière

§ 4. — Dispositions

Marthe et Marie

 

CHAPITRE III

L'ADHERENCE UNITIVE ET LES ACTIVITÉS D'ASCÈSE

 

i. — Textes choisis du P. H. Quarré

§ 1. — Que c'est que dispositions, et comme elles sont nécessaires en la pratique de vertus

§ 2. — Diverses pratiques dont on se peut servir pour acquérir les vertus chrétiennes

§ 3. — Comme l'adhérence de notre âme à Jésus est un très parfait moyen pour entrer en la possession de toutes les vertus chrétiennes

§ 4. — Des moyens par lesquels on peut arriver à l'adhérence de notre âme avec Dieu, et des empêchements qui s'y rencontrent

ii. — Textes choisis du P. Guilloré

I. — Dans toutes les impuissances de l'âme, de quelque côté qu'elles soient, et dans toutes privations, il faut se revêtir des opérations de Jésus-Christ

II. — Tout chrétien à obligation d'être animé de l'esprit de Jésus-Christ en toutes ses actions

III. — Les distractions favorisent quelquefois la contemplation

 

CHAPITRE IV

DIRECTIONS OU AVIS DU P. BOURGOING

 

À LA REINE DES CIEUX

PRÉFACE

PREMIER AVIS: L'ORAISON EST UN DON DE DIEU

SECOND AVIS : LA FIN DE L'ORAISON

TROISIÈME avis : PRATIQUE DE L'ORAISON

QUATRIÈME avis : NÉCESSITÉ DE L'ORAISON

CINQUIÈME avis : PURETÉ D'INTENTION

SIXIÈME avis : DISPOSITIONS INTÉRIEURES

SEPTIÈME avis : ATTENTION

HUITIÈME avis : HUMILITÉ

NEUVIÈME avis : RÉVÉRENCE

DIXIÈME avis : DEGRÉS DE PAUVRETÉ

ONZIÈME avis : AFFECTIONS

DOUZIÈME avis : ORAISON PAR VOIE DE REGARD ET D'HONNEUR

TREIZIÈME avis : PRIER EN L'ESPRIT, EN LA PERSONNE ET AU NOM DE JÉSUS

QUATORZIÈME avis : LA DEMANDE

QUINZIÈME avis : REGARDS VERS JÉSUS EN L'ORAISON

SEIZIÈME avis : DIVERSES SORTES D'ORAISON

DIX-SEPTIÈME avis : L'ORAISON DE COMBAT ET DE PEINE

DIX-HUITIÈME avis : PRÉPARATION

DIX-NEUVIÈME avis : LA MÉDITATION

VINGTIÈME avis : LA MATIÈRE

VINGT ET UNIÈME avis : AFFECTIONS

VINGT-DEUXIÈME avis : REVUE SUR LES DÉFAUTS

VINGT-TROISIÈME avis : DIFFICULTÉS

CONCLUSION : SPIRITUS ORIS NOSTRI CHRISTUS

APPENDICE

I. — Le P. Massoulié et la critique de l'activité intellectuelle dans l'oraison

II. — La Mère Agnès et les prières impuissantes

III. — La Métaphysique des Saints


 

 

 

Volume IV

 

Pierre-Antoine Fabre, Le temps de prier

 

 

tome IX

La Vie chrétienne sous l'Ancien Régime

 

Avant-propos

 

CHAPITRE PREMIER

LA DÉVOTION AU BAPTÊME

 

I. En quel sens on peut parler d'une «dévotion au baptême». — La dévotion au baptême, l'École Française et la Métaphysique des Saints. — François de Saint‑Pé

II. La «consécration» baptismale. — Hugues Quarré. — «Un nouvel être et une nouvelle vie.» — Le pneuma et la psyché

III. La promesse du baptême, vœu d'adhérence: Consentio tibi, Christe. — Résistances de l'école ascéticiste. — Réponses de Saint‑Pé. — Les deux sortes d'adhérence ou d'union. — «Animer son baptême.»

IV. L'ascèse mystique impliquée dans la dévotion au baptême. — Adhérer ou imiter. — Doctrine d'anéantissement. — Duguet et le Portrait d'un chrétien enseveli en Jésus‑Christ

V. Figures et symboles. — Ferebatur super aquas. — Le déluge et le passage de la mer rouge. — Bossuet et la poésie de l'ancienne liturgie baptismale

VI. Simplicité du «baptême essentiel». — La critique des exorcismes. — Duguet et la défense des exorcismes. — Si, après le «baptême essentiel», le démon n'est plus dans le cœur, il reste fortifié aux alentours. — La partie de l'esprit non soumise à l'Esprit. — Le démon et ses droits sur l'imagination; «le pays du mensonge est le sien». — Les exorcismes sauvés

VII.Pratiques de la dévotion au baptême. — Le chrémeau et les petits «habits du baptême». — L'anniversaire du baptême. — La «pâque annotine». — Edme Calabre et les Fonts baptismaux. — Lazare Bocquillot et Fénelon. — Agonie de la dévotion au baptême

Excursus: Les litanies de l'office du baptême

 

CHAPITRE II

L'EUCHARISTIE

 

§ 1. La communion fréquente

I. Le moyen âge et la communion très rare. — La Contre‑Réforme rétablit l'usage de la communion fréquente. — Dès le début du xviie siècle, la cause est gagnée

II. Antoine Arnauld, la Fréquente communion et le mythe de l'Infréquente. — Véritable objet du livre: confondre les casuistes qui ne veulent «point mettre de distance entre le crime commis et la communion». — Que tout le xviie siècle donnera raison à Arnauld. — La vraie doctrine d'Arnauld sur la communion fréquente

III. Saint‑Cyran et la communion fréquente. — Port‑Royal. — Nicole; Quesnel; Treuvey; Floriot; les catéchismes jansénistes. — Boileau; Duguet. — La tradition unanime du premier siècle janséniste sur la communion fréquente abandonnée parle jansénisme du xviiie siècle

IV. Les jésuites et la communion fréquente. — Saint Ignace et Madridius, — Propagande extrémiste: la communion quotidienne conseillée à tous. — Résistance de sainte Thérèse et des jésuites. — «Beaucoup d'abus en France et plus encore en Espagne». — Le préarnaldisme du P. Salazar. — Le théocentrisme de Salazar: «La première et la principale fin est de donner gloire à Jésus‑Christ.» — «La pureté de conscience ne suffit pas pour communier» tous les jours. — Que la communion soit avant tout «un acte de religion». — «Délai… faute de révérence.» — La communion de tous les huit jours

V. Les jésuites français et la campagne contre «la fréquentation démesurée». — Caussin et Suffren. — Leur axiome à tous: «Il vaut mieux se bien communier et plus rarement que moins bien et plus fréquemment.» — Les règles de Suffren. — Saint‑Jure et Lejeune. — Outrances et contradictions du P. Crasset. — La lettre du P. Daniel sur la fréquente communion. — Identité foncière entre cette lettre et le livre d'Arnauld. — Oscillations et embarras de Bourdaloue. — Avant tout l'honneur de Dieu. — Accorder à tous les chrétiens en état de grâce le «même accès à la table du Sauveur… à Dieu ne plaise que je tombe jamais dans une telle prévarication!» — L'humanité de Bourdaloue et la dialectique pure d'Arnauld

VI. La doctrine des spirituels qui ne relèvent ni de Port‑Royal ni de la Compagnie de Jésus. — François de Sales: «Pour communier tous les huit jours…, aucune affection au péché véniel.» — Rigueur décroissante dans l'interprétation des règles salésiennes; J. P. Camus. — Soyer et Barré. — La direction de Bossuet. — Vers la communion quotidienne dans les couvents. — L'évolution s'achève avec Fénelon: plus de différence entre les couvents et le monde: «Pourvu que le laïque vive en bon laïque, il peut et doit communier tous les jours.» «Aux âmes saintes, appartient le pain quotidien.»

§ 2. Le Saint Sacrifice

I. La messe dans la littérature du xviie siècle. — Ligne de partage des eaux: dans la première moitié, la messe considérée comme un des «exercices» de la vie dévote; dans la seconde, comme l'acte religieux par excellence, la «synthèse dans tout le culte». — Religion et Dévotion. — L'accent mis de plus en plus sur le sacrifice

II. Amelote, Duguet et la théologie du Sacrifice. — Il n'est pour eux de vrai sacrifice que liturgique. — «L'hostie immolée en public». — Le sacrifice «partie essentielle du culte public». — Les figures du sacrifice du Christ: Caïn et Abel; Noé. — «Ce qui manquait au sacrifice de la Croix sur le Calvaire». — Jésus‑Christ prêtre dès son incarnation, mais d'un «sacerdoce intérieur». — Le sacrifice du Calvaire, «vrai sacrifice dans l'usage intérieur que le Sauveur en a fait», n'est pas à proprement parler sacrifice liturgique. — Jésus‑Christ a suppléé à ce défaut par l'institution de l'Eucharistie. — Conformité essentielle entre l'Autel et la Croix. — Diffusion de la théologie sacrificielle

III. Conclusions pratiques. — L'assistance à la messe. — Les sept méthodes de Suffren et la méthode de Letourneux. — «La messe est le sacrifice commun du prêtre et des fidèles.» — L'Église ne veut pas que le prêtre se sépare de l'Assemblée. — Qu'on «s'occupe l'esprit et le cœur des paroles et des actions qui composent la liturgie»

IV. Invraisemblable résistance opposée à la méthode liturgique. — On craint ou on feint de craindre que les fidèles s'imaginent «qu'ils sont prêtres au même sens que le prêtre». — Le sacrement de l'Ordre en péril! — La messe pour tous ou la messe pour ceux‑là seuls qui savent le latin. — Croisade pour le «Secret des Mystères». — Vallemont et Dom Guéranger. — Répliques de Letourneux. — Si l'Église célèbre la messe en latin, ce n'est pas du tout qu'elle veuille par là en «cacher les mystères aux peuples». — Ainsi pour la récitation submissa voce du Canon. — Excentricités sans importance de quelques réformateurs

V. La bataille pour et contre les traductions de l'Ordinaire de la messe. — Le missel de Voisin condamné par l'Assemblée du Clergé en 1660, et par un Bref d'Alexandre VII. — Comment la bonne foi du pape a été surprise par Mazarin. — Contre‑vérités dans la lettre de l'Assemblée au Pape: la traduction de l'Ordinaire en français n'était pas une «nouveauté». — Du xive siècle à 1660, le nombre de ces traductions va croissant. — «On n'a eu en France aucun égard à ce Bref» et les Assemblées de 1665 et de 1670 désavouent par leur silence l'Assemblée de 1660. — Le prétendu «Secret des Mystères» et le scandale des protestants. — Les traductions de l'Ordinaire répandues à deux cent mille exemplaires. — Pouvait‑on refuser aux catholiques ce que l'on accordait aux protestants? — La guerre contre les traductions recommence au lendemain de la Bulle Unigenitus. — Violence et démence

VI. Les «livres de messe». — Traduction de paraphrases. — Le P. Judde, Antoine Montagnon et les «Courtes prières» de Pellisson. — La paraphrase de Sanadon. — Le mouvement liturgique d'aujourd'hui et la victoire des traductions

§ 3. L'Adoration réparatrice

I. Développement nouveau et logique. — Adoration et réparation. — La vocation de victime. — Mechtilde du Saint‑Sacrement et l'Institut de l'Adoration perpétuelle. — L'amende honorable d'Anne d'Autriche. — Les innocents expient pour les coupables

II. L'horloge mechtildienne et l'expiation des sacrilèges commis à toutes les heures du jour. — Minuit et la diane infernale. — Les premières messes et le «commerce des hosties». — Les «belles messes». — Détresse des églises rurales. — Les confréries diaboliques

III. Litanies et Offices de la Réparation. — Vorat canis Sanctum Dei. — L'adoration perpétuelle dans les paroisses. — Iconographie de l'adoration réparatrice

Excursus: Le Poème eucharistique de M. de Saci. — La première communion. — La question de la fréquente communion pendant le xviiie siècle. — Le sermon de Bourdaloue sur la messe. — Le prêtre et la messe de tous les jours. — La Belle messe. — Le désir de voir l'hostie. — Christophe d'Authier de Sisgaud, évêque de Bethléem et le chapelet du Saint‑Sacrement. — La communion des quinze mardis et des quinze samedis. — Les visites du Saint‑Sacrement. — Les saluts. — Messes sèches

 

CHAPITRE III

LA DÉVOTION À LA SAINTE VIERGE PENDANT LA SECONDE MOITIÉ DU XVIIe SIÈCLE — DÉCLIN OU PROGRÈS?

 

Charles Flachaire et la Dévotion à Marie pendant la première moitié du xviie siècle. — Qu'il n'est peut‑être pas vrai qu'à une première renaissance de cette dévotion ait succédé un fâcheux déclin

I. Le renouveau. — Les deux tendances renouvelantes: la dévotion médiévale, restaurée par l'humanisme dévot; la dévotion bérullienne. — Paul de Barry et les «abus» que dénoncera la ixe Provinciale. — «Extravagances», dont la seconde moitié du xviie siècle ne donnera plus le spectacle

II. Le conflit entre les deux dévotions et la campagne contre «les Dévots indiscrets». — Pascal et Wendrock. — Le scandale des protestants. — Adam de Widenfelt et les Monita salutaria. — Qu'il n'y a pas eu de conspiration janséniste contre la dévotion à Marie. — «Ne point confondre le culte qui est dû à la sainte Vierge avec le culte qui est dû à Dieu.» — Jugements téméraires du P. Crasset. — Gilbert de Choiseul et l'apologie de Widenfelt. — On se sert «du prétexte de la religion pour calomnier les gens de bien». — Le P. Crasset et la critique des faux dévots. — Des deux côtés, même doctrine; dénonciation des mêmes abus. — Pellisson et les Monita

III. De la campagne contre les dévots indiscrets à l'apostolat marial de Grignion de Montfort. — Nicole et les dévotions populaires. — Newman et les déformations inévitables du culte marial. — Grignion de Montfort et les faux dévots. — Excellence de la dévotion populaire. — Les deux tendances réconciliées dans la propagande mariale de Grignion de Montfort

Excursus: Marie d'Agreda. — Duguet et la dévotion à Marie. — La mère douloureuse et la critique du «spasimo». — Pratiques dévotes

 

CHAPITRE IV

LA MYSTIQUE DU MARIAGE

 

I. Réaction vigoureuse contre l'ancienne tendance à humilier le mariage. — De François de Sales à Fénelon: «honorable en tout». — Les fidèles initiés à la mystique du mariage. — L'instruction dialoguée de 1683; Paule et Pauline. — Les cérémonies du mariage

II. Mystique paulinienne et bérullienne du mariage. — Le oui du mariage et l'adhérence au oui de l'Incarnation. — Anéantissement et esprit d'enfance

III. «Péchés contre la sainteté du mariage.» — Mariage et Pénitence

IV. Étude comparée des «prières pour la femme enceinte»

V. Les autres «croix» du mariage. — Lenteur et mauvaise grâce à réaliser la sainteté du sacrement. — Le pessimisme de Paule. — La consolation des mal mariés: à les voir si malheureux beaucoup se réfugieront dans les couvents. — Prière de la mal mariée. — Fénelon et les tribulationes hujusmodi de saint Paul

 

CHAPITRE V

L'ART DE MOURIR

 

I. Mme de Sévigné et la peur de la mort. — Les conversions in extremis. — Mourir en honnête homme et mourir en chrétien. — La curiosité publique et les agonies douteuses

II. L'abbé Boileau et les derniers combats de la duchesse de Luynes. — À la limite du désespoir. — Justice et miséricorde. — Illusions intéressées sur la «mort du juste». — La «faute» de la duchesse et l'imbroglio pathétique. — Retour définitif à la confiance

III. La conjuration du silence et le devoir des médecins. — La Bruyère. — Théotime et les spécialistes du lit de mort. — Bourdaloue auprès des mourants. — La rhétorique des «exhortations aux malades». — Érasme et l'Art de bien mourir. — Les Préparations à la mort

IV. La pensée de la mort: Spinoza, Saint‑Évremont et Nicole. — Les exercices de la mort. — L'«Extrême‑Onction spirituelle». — Paraphrase des prières rituelles: les yeux, les narines…

V. Le P. Faber et la critique des «Exercices de la mort». — Le vrai sens, tout religieux et très sain que la plupart des spirituels attachent à ces pratiques. — Exprimer et fixer le moi profond. — Testaments spirituels. — L'exercice de la mort et le pur amour. — L'oubli de soi et la confiance. — De l'acceptation au désir de la mort. — Quesnel et le Bonheur de la mort chrétienne

Excursus: «Catherine, fille morte de la peste à Nivelle»

Appendice : Camus et la «Fréquente communion»

 

 

 

 

TOMEX

La Prière et les prières sous l'Ancien Régime

 

CHAPITRE PREMIER

CRITIQUE DE LA PRIÈRE DITE VOCALE

 

I. Le problème de la prière vocale au xviie siècle. — Tendance moderne à déprécier les formules; M. Vincent et «la disgrâce de n'être qu'une prière vocale». — Origines de cette tendance: diffusion foudroyante de la prière dite «mentale». — François de Sales a‑t‑il méprisé la prière vocale? — Que pour lui, et pour toute la tradition, il n'y a pas de prière vocale qui ne soit mentale

II. L'étude de la prière vocale tient peu de place dans la littérature spirituelle de cette époque. — Que la peur du psittacisme tourne à la phobie. — Guilloré et les illusions des prières vocales. — Bonnes pour les «trop bouchés» ou «trop grossiers». — Trois désastres. — Les alarmes de Guilloré et la prière liturgique. — Encore la «disgrâce»

III. Arnauld et une critique plus philosophique des formules. — Facilité des actes de contrition; difficultés de la contrition elle‑même. — La psychologie janséniste de l'amour. — Les actes expriment bien des pensées, mais leur niveau est de n'exprimer que des pensées. — Les outrances d'Arnauld modérées par Nicole. — Dynamisme foncier des formules. — Qu'on ne saurait trop recommander la prière vocale

IV. Les formules et l'angoisse des spirituels. — La prière vocale vengée par Duguet. — «Qu'il me soit fait selon votre parole» non selon la mienne. — Jésus‑Christ est «tout l'esprit», et la vérité de nos formules

 

CHAPITRE II

L'ANNÉE CHRÉTIENNE DE LETOURNEUX ET LA PROPAGANDE LITURGIQUE

 

I. La Liturgie sous l'ancien régime. — Trois mouvements qui intéressent l'histoire proprement religieuse: études critiques; réformes; propagande. — Les réformateurs et leur préoccupation foncièrement religieuse. — Urbain VIII et les quatre jésuites. — Les nouveaux Offices: sainte Marie l'Égyptienne

II. Nicolas Letourneux et l'Académie française. — Persécuté et calomnié. — L'Année chrétienne à l'Index. — Si l'Année chrétienne est une œuvre janséniste. — Letourneux et le réquisitoire passionné du P. de Colonia. — Letourneux est‑il presbytérien? — Ou socinien? — Le trouble du Christ; Letourneux et Bossuet. — Orthodoxie foncière de l'Année chrétienne

III. De Letourneux à Dom Guéranger. — Un même dessein: initier les fidèles aux choses de la Liturgie. — In populo gravi laudabo te

IV. Succès prodigieux de l'Année chrétienne, peu à peu délaissée par les catholiques. — Et remplacée par celle du P. Croiset. — Les trois Années: Letourneux; Croiset; Guéranger. — Que le livre du P. Croiset n'est pas un manuel d'initiation liturgique, mais un recueil de «méditations». — Deux dimanches de Croiset

 

chapitre iii

hymni gallicani

 

L'hymnaire gallican refuge de notre poésie religieuse pendant plus d'un siècle. —

Raison d'étudier cette poésie oubliée

§ 1.— La scola gallicane et l'évolution de l'hymne liturgique

Originalité de la scola. — Méprise et injustice de Dom Guéranger. — Boileau et Santeul

I. Différences entre l'hymnaire gallican et celui de la Renaissance. — Restaurer, à la manière d'Urbain VIII, et non détruire. — Un exemple de ces restaurations gallicanes: le Primo dierum de saint Grégoire et le Die dierum principe de Coffin

II. Exégèse lyrique des Livres saints. — Ils ne prient et ils ne chantent que bibliquement

III. Didactisme catéchétique de l'hymne gallicane. Letourneux et l'hymne apologétique de Pâques. — Coffin et les hymnes fériales. — Le symbolisme statique et spectaculaire des anciennes hymnes; dynamique des nouvelles

IV. Caractère populaire de nos hymnes

V. La formule acceptée par toute la scola. — Les trois grands: Santeul, Besnault, Coffin

VI. La scola gallicane et la résurrection des proses. — La longue disgrâce des proses. — L'hymne et la prose

§ 2.— Le lyrisme liturgique de la scola gallicane Prière et poésie. — Les trois ferments lyriques

A. Le lyrisme triomphal

a) Le triptyque santolien de la Purification: Templi sacratos… Fumant Sabæis… Stupete gentes… Vaines critiques du Stupete. — Bossuet et le caractère proprement religieux du lyrisme triomphal

b) La marche des saints. — Saint Pierre, saint Paul et les saints de France. — Le triomphe des Communs. — Les Apôtres: tonant, coruscant, perpluunt. — Le cortège des Docteurs. — Rancé et la Trappe. — Les Veuves. — Le tryptique santolien de la Toussaint. — Jam vos pascit Amor…

B. Le lyrisme dramatique

Du récit évangélique à l'hymne. — Gourdan et Béthanie. — Defessus ad Martham Deus. — Le triptyque de Besnault pour la Circoncision. — Hors du temps et de l'espace: Intrat; Stillat; graditur. — La danse de Salomé

C. Le lyrisme mystique: prière et poésie

Gourdan et les Proses de «l'Intérieur de Jésus». — Constant retour à l'intérieur: Intimus; Inserit, Cordis penetratio. — Tendresse confiante des hymnes gallicanes: Opus tamen sumus tuum. — Dévotion à Marie: les hymnes de Claude Santeul pour l'Expectatio Partus: Nascere! nascere! — La Sainte Tunique. — Tendance à ne plus assez distinguer la prière liturgique de la prière privée

Conclusion

Léonce Couture et l'excellence de l'hymnaire gallican. — O Christe, dum fixus… O quando lucescet… Moraris heu… Que le rite romain aurait pu s'accommoder et de la prière et de la poésie française. — On préféra tout détruire. — Rupture funeste entre le classicisme dévot et le romantisme catholique

Excursus: § 1. O luce qui mortalibus..». — § 2. Santeul et Coffin, ou les deux péchés originels de l'hymnaire gallican. — § 3. «Tombelaine» dans le bréviaire de Huet. — § 4. Les hymnes rimées du P. Clairé. — § 5. Les pièces liturgiques traduites en vers français. § 6. Le «lutrin» de Santeul

 

chapitre iv

les moules liturgiques. — I. les litanies

 

I. La litanie et la prière. — Développement de la prière litanistique. — Végétation litanistique de l'ancien régime

II. La formule nouvelle: Madariaga et Jacques de Jésus. — «Litanies des saints anges mentionnés dans l'Écriture». — Les «Litanies tirées de l'Écriture Sainte», 1673. — Caractéristique; excellence et succès de ce recueil. — Litanies du «Père éternel». — Les saints Anges. — Fénelon et la prière litanistique. — Edme Calabre. — Les désordres de la Régence et les litanies du P. Maugras. — Gourdan et les litanies du Sacré‑Cœur. Ferveur litanistique du siècle «gallican et janséniste»

Excursus: § 1. Les litanies de la Providence. — § 2. L'Anglicanisme et les Litanies. — Psychologie et critique de la prière litanistique

 

chapitre v

le moule liturgique. — iI. les offices de dÉvotion

 

Cristallisation liturgique des dévotions nouvelles: L'Office de l'Enfance. — Les «petits Offices» pour chaque jour de la semaine: Suffren et l'Exercice spirituel. — Les grands Offices de dévotion. — Le Bon Pasteur. — La Pénitence. — Pour la Conversion des Juifs: Nobis micans, cæcus sibi. — Office du Triomphe de la Foi

 

chapitre vi.

les formes fixes et quasi-liturgiques de la priÈre privÉe

 

I. Différences entre la prière liturgique, et la prière privée. — Comment celle‑ci tend à se rapprocher de celle‑là. — Naissance et développements extraordinaires des liturgies privées. — La littérature des «prières de dévotion» fâcheusement négligée, soit par les historiens, soit par les philosophes de la prière

II. Le Thrésor de Jean de Ferrières, 1583. — Le Calendrier historial de l'humanisme dévot. — Traduction de plusieurs prières d'Érasme. — Particularisation croissante des formules. — «Avant d'étudier sa leçon.» — «Pour la Paix de l'Église.» — Esprit œcuménique et désintéressé de ces formules. — Les lacunes du Thrésor et la réédition de 1686

III. Le recueil de Godeau, 1646. — Godeau et les courants spirituels de son temps. — Nombre de formules bérulliennes. — Prière «d'un Officier de finance»

IV. Multiplication croissante des recueils. — Les Avis de Suffren. — Plus de distinction entre religieux et laïcs. — L'Exercice spirituel de 1664. — Perfection et Pur Amour. — Échelles et Degrés. — L'Exercice du matin

V. L'Exercice spirituel révisé en 1682, par les «habiles». — L'Académie française et les prières françaises de dévotion. — Les Prières propres de Pellisson. — Le rythme de la prière française. — Dévotion et Atticisme

VI. Le recueil de Sanadon 1702 et les formules du xviiie siècle

Excursus: Le Bouquet d'Eden. — Huysmans et les «Oraisons» du xviie siècle

 

chapitre vii

les formules de priÈres, l'activitÉ des «puissances» et la vie de l'Âme

 

I. Déjà si attaché aux formules soit liturgiques, soit quasi‑liturgiques, l'Ancien Régime a aussi beaucoup de goût pour les formules plus étendues qui l'aident à pratiquer l'oraison dite mentale. — La prière écrite de Boivin l'aîné. — Difficultés de l'oraison méthodique. — Deux solutions: regarder l'oraison comme un exercice d'ascèse, se résigner, comme à une croix, à l'impossibilité où l'on se trouve de discourir, — Mlle de Maintenon, Bourdaloue et l'oraison écrite. — Autre solution: les méditations toutes faites

II. Les formules d'oraison, — Lois du genre. — Jacques de Jésus. — A la manière de saint Augustin. L'Élévation oratorienne sur la Passion. — Via media entre la prière dite vocale et l'oraison discursive

III. Les paraphrases de l'Écriture Sainte et les formules d'oraison. — Pierre de Cadenet. — Les effusions de Dom Morel. — Le maître des méditations bibliques, M. Duguet. — L'Agonie au jardin. — Application des sens et contemplation ignatienne. — Le Christ au tombeau. — Le christianisme mystique de Fénelon, bourgeois de Duguet

IV. Lecture et prière. — Bienfait des formules d'oraison. — Que l'effort intellectuel dont elles dispensent n'est pas la prière même

Excursus: I. De l'emploi littéraire et pédagogique des formules de prières, en dehors de recueils semi‑liturgiques — II. Diffusion de la formule oratorienne: O Jesu vivens in Maria. — III. Jacques de Jésus et la contemplation imaginative ou romancée des mystères. — IV. Les méthodes «faciles». — VI. Les retraites

Appendice

I. Notes pour la Défense et l'Illustration de la prière vocale

II. Les gestes de la prière

 

 

 

TOME XI

Le Procès des mystiques

 

Première partie

Anticipations et préludes

 

Chapitre premier

Isabelle Bellinzaga, Achille Gagliardi et la charte de l'amour

 

L'oraison n'est pas un hachisch vaguement céleste, ni le pur amour une volupté. L'amour dépouillant et crucifiant

I. Le Breve Compendio. La « dame Milanaise » et le jésuite. Les travaux du P. Viller. Isabelle auxiliaire de saint Charles Borromée et affiliée à la Compagnie. Son ascendant sur Gagliardi

II. Sur Vipera et d'autres jésuites. L'enquête demandée par le général Aquaviva. Les divisions des jésuites milanais. Rumeurs de réforme. Inquiétudes à Rome. Soumission. Isabelle meurt en 1624

III. Le Breve Compendio né d'une longue collaboration inconsciente. Nous attribuerons cette œuvre commune au seul Achille Gagliardi

IV. L'édition du « gentilhomme gascon ». Le Bref discours de l'abnégation intérieure du jeune Bérulle n'est que la traduction du Breve Compendio. La traduction du P. Binet : Abrégé de la perfection chrétienne. Le commentaire de Camus. La « propriété ». Les trois degrés de pauvreté. Le dernier degré : renoncement à la vertu. Dieu dépouille l'âme de l'acte de conformité ou d'amour, enfin de sa volonté même. Conformité avec l'enseignement de saint François de Sales. Un moyen court. L'erreur du R. P. Pottier. L'accusation de guyonisme

 

Chapitre II

Les illuminés de Séville (1623)

 

L'Édit de Séville dans le Mercure français, en 1624. Un siècle plus tôt, l'Édit d'Alcaraz. Alumbrados, dejamiento. L'esprit d'Erasme en Espagne. Nous n'entendons qu'une cloche, le tocsin. Les mystères de l'Inquisition. Un ascétisme morbide ? L'obsession de l'oraison mentale. Illuminisme et quiétisme. « Que certains, par une grâce particulière, peuvent tout se permettre sans jamais pécher »

 

Chapitre III

Les premières paniques (1632)

 

I. Les Abominations du P. Ripault

II. Trois catégories d'abominables : les Illuminés, les Adamites, les « Spirituels à la mode » ou faux dévots. Cherchez la dévote. Le mauvais prêtre

III. Les Adamites, secte de débauchés. Encore les femmes

IV. Les plus infâmes, les Illuminés. Amplification de l'Édit de Séville

V. La police du P. Joseph. La prison pour Laurent de Troyes. Deux capucins en rupture de ban. Succès mondains du P. Laurent. Délations et emprisonnement. Une révision s'impose pour l'historien. Le grand Arnauld à la défense

VI. Ripault n'est pas « anti-mystique ». Séparer le bon grain de l'ivraie. Sa Divine naissance, greffe du bérullisme sur la mystique franciscaine. La « paix » des contemplatifs. Débuts d'une phobie

 

Chapitre IV

Les illuminés de Picardie

 

Pierre Guérin, Claude et Antoine Buquet. Deux foyers principaux : Roye et Montdidier.

1. Les Guérinets. La Fondation des Filles de la Croix. « Filles dévotes » et « guérinettes ». Premières dénonciations (1627). L'intervention de Vincent de Paul. Nouvelle campagne calomnieuse (1629). Troisième campagne (1634) et emprisonnement. Encore l'ombre du P. Joseph. Encore l'accusation de quiétisme. Toujours le fantôme de l'Édit de Séville. Une fin heureuse

2. Madeleine de Flers.

I. Mère Madeleine et Mère Antoinette, deux quiétistes à Maubuisson ? Dom Bénin s'attaque au jansénisme. Le récit de la sœur Candide

II. Marie des Anges et l'impossible réforme de Maubuisson. Hostilité à l'humanisme dévot : aux jésuites et aux capucins. Une épidémie de mysticité : Dom Quinet. Les visites de Saint-Cyran

III. « Spirituelles » contre « Port-Royalistes ». Les Spirituelles (et les Capucins) obtiennent la venue de Madeleine de Flers

IV. Beaux débuts de Madeleine. Elle enseigne la « nudité parfaite ». Duplicité de Candide. « O amour, on te résiste ! Tout le monde résiste à Dieu ! ». Une détraquée ? « On n'entrait dans la parfaite nudité que par un péché volontaire de corps et d'esprit »

V. Le diable entre en scène. Le Credo de la secte. Le mot de Saint-Cyran : « Voilà qui sort du fond de l'enfer. » Mise en examen et départ de Madeleine. À nouveau SaintCyran. Un récit à sa gloire, achevé seulement en 1685

VI. Le témoignage de l'abbé du Ferrier, directeur des augustines de Montdidier (1639). Retour de Madeleine à Montdidier. Condren s'abstient de l'accuser. Illuminée si l'on veut, mais au sens bénin

 

 

 

Chapitre V

Nouvelle panique : les diableries de Louviers

 

I. La Piété affligée du R. P. Esprit du Bosroger. En 1643 à Louviers, une répétition de Loudun (1635), mais qui ne semble avoir affecté qu'une minorité de la communauté. L'infamie posthume du P. Picard

II. L'accusatrice : Madeleine Bavent, une folle et une sotte, mais assez madrée. Le P. Picard, « un malheureux séducteur qui s'était acquis l'estime d'être fort spirituel ». Le P. Boullé brûlé vif à Rouen, en 1647, avec le cadavre de Mathurin Picard. Virulence du préjugé anti-mystique. Canfeld en corrupteur

III. La Mère Françoise de la Croix, supérieure de l'établissement des hospitalières de Louviers à Paris, accusée à son tour de sorcellerie et de magie. Son acquittement en 1653

 

Chapitre VI

Les jésuites et la diffusion du quiétisme au temps de Louis XIII

 

De la publication de l'Édit de Séville à la majorité du jeune Louis XIV, tout au long de la « Conquête », une défiance diffuse, endémique envers la propagande mystique. L'exemple des spirituels de la Compagnie de Jésus

I. Le P. Lejeune, grand spirituel, guère suspect d'ascéticisme, n'en craignait pas moins le péril quiétiste. La légende noire de Labadie

II. « Caractère du faux spirituel » selon le P. Nicolas Du Sault. Polémique contre le jansénisme

III. « Caractère de l'illuminé ». Encore une fois le souvenir de l'Édit de Séville

IV. L'ouvrage de Du Sault apparaît à sa date (1655) comme marginal et anachronique

 

Chapitre VII

Les premiers assauts contre le pur amour

 

Pascal d'accord avec Fénelon contre Bossuet : l'allusion des Provinciales à Sirmond, l'adversaire de Camus

I. Antoine Sirmond (1592-1643), champion de l'ascéticisme au sein de la Compagnie. Son anthropocentrisme ascétique opposé au théocentrisme mystique de l'évêque de Belley. Moins une doctrine qu'un amalgame qui ne tient que dans l'offensive

II. La défense du pur amour contre les attaques de l'amour-propre, de Camus (1640). Son éloge de l'Abrégé de la perfection de Gagliardi. Un résumé de la philosophie salésienne et bérulienne, qui n'est autre que la philosophie évangélique de la prière

III. La Caritée, de Joinville à Camus. Sa représentation par Abraham de Bosse. Les attaques de Sirmond

IV. Critique camusienne de l'amour-propre : il est un « amour défectueux », au lieu que l'amour de nous-mêmes tend, de son mouvement naturel, à plus haut que nous. Le combat de Caritée : poursuivre la crainte de l'enfer et le désir du ciel pour autant qu'ils sont « intéressés »

V. La courte parabole de Joinville est devenue une copieuse adaptation, salésienne et bérulienne, du traité de Gagliardi. Camus connaît ses auteurs, y compris Ignace et les Constitutions. Les menaces de censure

VI. Sirmond et Richelieu. L'oratorien Séguenot enfermé à la Bastille. Saint-Cyran emprisonné à Vincennes. L'amalgame, chez Sirmond, entre mysticisme et jansénisme. Il lit la Caritée comme une machine de guerre contre les jésuites. La riposte de Camus : les Animadversions et les Notes sur un livre… Mort de Richelieu (1642)

VII. Le résumé de Sirmond par Pascal, dans la Xe des Provinciales. Comment une œuvre si médiocre a-t-elle trouvé des défenseurs ? Son usage de la casuistique. Sa distinction entre amour affectif et amour effectif (d'obligation) nous dispense en fait de vouloir aimer Dieu. Cette conception de l'amour effectif est réduite par Arnauld à un jeu de mots

VIII. La distinction entre précepte de rigueur et précepte de douceur. L'amour véritable peut-il se commander ? Sirmond peut être-plus subtil que ne le pensent les théologiens de Port-Royal

IX. Un stoïcien qui s'ignore. Sa Défense de la vertu (1641) repose moins sur un principe dogmatique que sur ce qu'il considère comme une vérité de fait : l'amour, hélas, paraît au-dessus des forces humaines. Réplique admirable de Camus, dont les directions peuvent certes apparaître chimériques mais ne le devraient pas à un chrétien

X. Les défenseurs de Sirmond : le P. Daniel, le P. Annat. Leur opposer la littérature de dévotion, Rodriguez, Saint-Jure, mais aussi des théologiens considérables de leur ordre : Suarez, Bellarmin, Becan. Le véritable combat de la Caritée : Sirmond n'est que le porte-parole, et pas le plus adroit, de l'ascéticisme gagnant la Compagnie, opposé à l'influence salésienne. La défense de Sirmond par Caussin, au sujet de l'attrition. Celle de l'amour effectif par Daniel. Si Ignace a fixé les jésuites dans l'ordre mystique de la charité, un autre maître : l'expérience intime des âmes, les a fixés dans l'ordre des réalités concrètes et du possible. Véritable importance de Sirmond : il a révélé leur secret tragique, leur sourde inquiétude d'une perte de la foi, d'une atrophie désespérée du sentiment religieux.

XI. Sa signification n'est donc pas limitée à l'épisode janséniste. La lecture de Jansénius par le P. Harent : un radicalisme du pur amour. Sirmond partage la même conception d'un amour impossible, mais il en tire la conclusion contraire : Dieu n'a pu nous faire un devoir strict de l'aimer

Épilogue. Fénelon a eu raison de rappeler la victoire de Camus sur Sirmond. L'Épître sur l'amour de Dieu de Boileau. Les attaques de Bossuet. Pourtant Boileau et Bossuet sirmondisent sans le savoir. Fénelon oppose Bossuet à Bossuet : son Histoire de France donnée en thèmes à Monseigneur le Dauphin. « Ayez toujours l'intention de faire purement la volonté de Dieu par amour, quand même vous n'entendriez ni punition, ni récompense. »

Excursus

§ 1. – Ricochets indéfinis de l'affaire Sirmond. L'Abrégé de la Théologie ou des principales vérités de la religion d'Amelote. Les sermons de Bourdaloue sur l'amour de Dieu. De la connaissance et de l'amour de Dieu de François Lamy. Explication des qualités et des caractères que saint Paul donne à la charité de Duguet

§ 2. – Un frère aîné de Carité. Le P. Du Sault

§ 3. – Problème de l'attrition dans la littérature spirituelle de l'Ancien Régime. Saint François de Sales. Jacques Boonen. Abra de Raconis. Gilbert de Choiseul-Praslin. Jean de Neercassel. Bossuet. Boileau. Bourdaloue. Le P. Jean Jégou. Le P. Judde. Nicole. Fénelon. Malebranche. Le P. d'Avrigny. Le P. de La Borde. M. Mérault.

Conclusions

Excursus. Le bombe Chéron

 

 

Deuxième partie

De la quiétude

 

Chapitre premier

Le problème de la quiétude

 

Comment ne pas déplorer le changement de sens du mot quiétude ? L'oraison de quiétude, centre de gravité de la haute littérature spirituelle du xviie siècle, et cible des antimystiques. Une philosophie éternelle

I. Définition négative de la quiétude. « Un désistement ou une cessation d'un ouvrage », l'arrêt d'une activité. Non discursivité. « Un état de suspension et ligature des puissances ou facultés intellectuelles ». Quiescens dicitur qui non discurrit. La fille française, voire cartésienne de Tauler et Jean de la Croix. Expérience de la « nuit ». Une prière où l'on ne peut pas méditer. Des spirituels plus humbles que leurs devanciers. Leur prière ne peut en aucun cas être confondue avec les illusions ou les folies des Illuminés

II. L'expérience fondamentale.

I. Avant d'être doctrine ou spéculation, une expérience. Les leçons du confessionnal. De l'acédie à l'impuissance. Conséquence des pratiques méthodiques issues de la Contre-Réforme. Importance de l'introspection. Le paroxysme discursif de la méditation méthodique est alors mis en question, et même le discours en tant que discours. Cette méditation discursive est à la fois un immense progrès et une faillite manifeste. La doctrine de Jean de la Croix est fondée sur la critique la plus impitoyable que l'on ait jamais tentée du discours

II. Entre mille exemples, le cas de Jeanne Absolu, sœur de Fontevrault. « Modèle de perfection religieuse » selon Auvray, son biographe (1640). Suspectée dans une pratique pourtant ordinaire, elle est examinée par Duval, Ripault, Jacquinot, qui ne trouvent rien à redire. Ses libres manières, son bon sens et le pathétique enjoué de sa quiétude.

III. Banalité foncière de son aventure spirituelle. À preuve celle, similaire, de Charlotte Le Sergent, bénédictine. La reconnaissance de son expérience par la communauté. « Une vérité » non de spéculation mais de fait

III. Le scandale ou le paradoxe de la quiétude

La quiétude ne sévit que pendant les heures où l'on s'entraîne le plus énergiquement à discourir. Elle n'est déconcertante que si on la tient pour une véritable prière, et excellente. Ce n'est pas que ses adversaires qui redoutent en elle le vide, l'idiotie. Précautions de ceux qui la défendent : Fénelon, Guilloré, la doctrine des « actes confus » et inaperçus. Ces précautions ne font que souligner le paradoxe. Le « petit tunnel » du P. Poulain

IV. Activité de la quiétude. Le paradoxe devient scandale ou absurdité si l'on se laisse hypnotiser par le côté négatif de la quiétude. Mais le je ne sais quoi est le contraire du néant.Les distinctions de Fénelon, Guilloré, Rogoleuc, Crasset. « Une oisiveté agissante ». Ses commentateurs modernes : le P. de la Taille, J. Baruzi. Elle libère un être jusque-là engourdi. La mystique suppose une psychologie particulière. On s'interdit de la comprendre si l'on n'admet pas deux modes, deux foyers d'activité

V. Passiveté de la quiétude. Camus préfère le terme d'infusion que l'on peut traduire par don. Ce que nous recevons nous modifie. Témoignages unanimes de nos auteurs sur la passiveté. Elle ne peut pas être jouée, elle ne résulte pas d'une discipline, de recettes, de méthodes. Il y a une pratique méditative du repos : elle est concentration plutôt que suspension. « Nous faisons nous-même ce retirement de l'esprit », écrit François de Sales, au lieu que le recueillement mystique « Dieu le fait en nous ». Un langage qui affectionne les tournures passives

 

Chapitre II

Dieu et l'homme dans la quiétude

 

I. L'opération divine dans la quiétude. Considérée sous son aspect positif, le seul important, la quiétude c'est Dieu qui se donne. La grâce n'a pas pour objet immédiat de vider l'âme, mais de la remplir. Fénelon : « Un empêchement n'est pas une grâce, s'il n'est qu'un simple empêchement pour des actes qui sont eux-mêmes très bons. » La description par François de Sales de cette opération : « suavité », intime présence dans le fond de l'être. Élisabeth de l'Enfant-Jésus. Quelques nuances apportées aux analyses de Baruzi, Delacroix, le P. Barré, le R. P. Hugueny. P. de la Taille : « La plénitude est dans le vide et le vide la remplit. » La quiétude n'est négation qu'en apparence

 

II. De l'activité humaine dans la quiétude. Approximations de cette activité singulière, qui est proprement indéfinissable

I. L'âme comparée à une harpe. Distinguer l'acquiescement verbal du commencement de quiétude qui le précède. Le « laisser faire »

II. Les deux parties de l'âme. Le Nuage… et M. Bergson. Peut-être vaudrait-il mieux substituer à la notion de substance celle de personne ou, en terme scotiste, d'haeccéité. Cette terminologie a l'avantage de rendre son unité foncière au sujet de la quiétude

III. En quel sens peut-on établir que l'expérience mystique est, comme toute activité spirituelle, connaissance et amour ? Les Conférences mystiques du P. Épiphane. La glose du P. de la Taille. Si une activité de ce genre peut surprendre des psychologues d'arrière-garde, elle n'a pas lieu de scandaliser des théologiens, à qui le dogme de la grâce sanctifiante devrait être familier. Toute connaissance de foi, tout amour et même celui des commençants sont infus et passifs. La spécificité des mystiques serait que la charité leur soit « consciemment infuse »

III. Des éclairs discursifs dans l'oraison de quiétude. Le souci de bien distinguer la méditation de la contemplation n'implique pas que l'on rejette la première. La quiétude pure est un mythe

I. La quiétude suppose l'antériorité du discours. La méditation bien conduite dispose à la contemplation. Malaval. Passages imperceptibles de l'une à l'autre. L'activité discursive n'est presque jamais suspendue. Nous savons, du reste, que les deux connaissances peuvent s'exercer parallèlement

II. La contemplation n'est pas un état fixe, immuable ; elle a ses hauts et ses bas. Elle enrichit la connaissance discursive. Discours et quiétude s'entre-illuminent, au point qu'on a peine à ne pas les confondre

III. Il est remarquable que les mystiques de l'Antiquité et du Moyen Âge ont accordé beaucoup plus de prix à ces éclairs discursifs que les modernes. Mystiques de la lumière et mystiques de la nuit. Les modernes envoûtés par le caliginisme du pseudo-Denis. Le préjugé de Dom Butler. Monumentum intelligentiae : les illuminations fugitives et soudaines selon saint Augustin ; selon saint Grégoire. Les « fentes étroites » par où passent les lumières célestes. L'illumination féconde ensuite le travail rationnel. Saint Bernard. Mais ces fulgurations discursives, même chez ceux qui les exaltent, ne sont rien à côté de l'ardente nuit qui règne dans les profondeurs de l'âme. Les modernes prolongent donc et expliquent la tradition de la théologie mystique

IV. Le P. Épiphane distingue la pensée « simple, directe, momentanée », qui ne dérange pas la quiétude, des « considérations réfléchies, raisonnées ». Même distinction pour les images. Nos auteurs ne sont donc pas les anti-intellectuels farouches que l'on a raillés

 

Chapitre III

Les noms de la quiétude

 

I. Les noms de la quiétude. Le mot ancien d'introversion. « Perception à reculons » et « introversion ». Oraison de silence. Oraison d'abandon ou de remise. Laisser-faire. Oraison de simple regard ou de simple vue. Le terme de contemplation, le plus répandu, a lui aussi le malheur d'évoquer presque fatalement l'idée d'une activité. P. Crasset : « Il est vrai qu'on la doit plutôt appeler union que contemplation. » Elle est suspension, non spectacle : « admiration délectable » d'une « vérité lumineuse » (Augustin), mais qui s'éclipse. Saint Bernard n'en retient que la joie, et saint Thomas la définit « une simple vue intellectuelle, accompagnée d'admiration ». L'admiration est « une certaine crainte, causée par la saisie d'une certaine chose qui dépasse nos puissances discursives ». La saisie du réel par l'âme profonde, ou de « l'Autre », dépassant l'entendement, résiste à tous les essais de définition. François de Sales, Jean de la Croix. Pourquoi avoir évité le terme d'intuition. Intuition du savant, inspiration du poète. « Toucher » plutôt que « vision ». « Infusion » ou insertion du divin, ou du réel

II. Quiétude et obéissance. Amour et connaissance ne s'opposent que si l'on réduit la seconde à la machine discursive. L'infirmité foncière du discours est qu'il ne nous donne que des représentations conceptuelles des réalités que pourtant nous aspirons à posséder. La gloire de l'amour est au contraire de saisir directement le réel, de nous unir à lui : une connaissance dont l'objet n'est pas conçu mais possédé, ou mieux encore possédant. L'intelligence, selon la formule du P. Rousselot, est « le sens du divin ». La quiétude peut être définie « saisie immédiate de Dieu »

III. Quiétude et amour. Faut-il en conclure qu'en dehors de la quiétude il est impossible d'aimer Dieu ? Pour résoudre la difficulté, certains proposent de distinguer deux amours, mystique et discursif, ou deux volontés. L'amour discursif est à la portée de tout le monde, il convient à tous les didactismes et moralismes. Mais la distinction n'est guère solide : une volonté d'aimer Dieu conditionnée au discours, bien qu'orientée vers l'amour, en réalité n'aime pas encore. Mais cela ne veut pas dire que tout acte de charité nous fasse passer de l'ordre discursif à l'ordre mystique

 

Chapitre IV

La trace de Dieu dans la quiétude

 

I. La trace de Dieu dans la quiétude. L'oraison de quiétude commence d'ordinaire et parfois se poursuit sans que le contemplatif en prenne claire conscience. Comment la distinguer d'autres états ? La raison ressemble ici à un homme qui serait obligé d'assister en coulisse au spectacle d'une tragédie. Les contemplatifs s'expliquent comme ils peuvent, aux bons directeurs de discerner le caractère d'une expérience qui ne paraît extraordinaire ou dangereuse qu'aux maniaques du discours. Souvent ils témoignent d'une détresse de la conscience. La pauvreté noétique et affective, l'humilité décrites par Dom J. Chapman. More conscious of his absence than his presence. Rien par suite, absolument rien qui puisse faire du quiétisme une école d'illuminisme

II. Quiétude et angoisse. « L'horrible nuit ! » « Ce douloureux sentiment de moi-même. » L'épreuve d'un néant métaphysique exalte la conscience morale jusqu'à l'exaspération

III. Éclairs de quiétude dans la prière commune. Camus : « Plus de gens contemplent, quoique sans le penser, qu'il n'y en a qui méditent. » Il n'est pas de véritable prière à qui les grâces mystiques soient tout à fait refusées. C'est que les prières sont plus du Christ que de nous. Comparaison avec une opération chirurgicale : passivité de qui la subit, mais l'a d'abord acceptée ; activité à deux, la chair et le chirurgien. La substance de l'âme ne dit pas : je veux, mais son élan même veut la divinisation, la fait sienne dans la nuit. Ce n'est pas une image, des attributs, mais une personne que l'on aime. L'amour est aveugle. La différence essentielle entre la prière commune et la prière proprement mystique est de durée, non pas de nature. Fondée sur le double dogme de la présence active de Dieu en nous et de la grâce sanctifiante, cette philosophie proclame l'unité foncière de la vie spirituelle et des dons divins qui y président. De la prière vocale aux états sublimes

Conclusion : Maine de Biran et la quiétude

Avant d'assister au procès de la quiétude, il était indispensable de déterminer aussi clairement que possible l'enjeu de ce débat mémorable. En guise de récapitulation, une page du Journal de Maine de Biran, lecteur de Fénelon, qui nous fait sentir l'actualité éternelle de la quiétude : « Alors nous avons la présence de Dieu et nous sentons ce que tous les raisonnements des hommes ne nous apprendraient pas. » Cultiver en nous l'introversion, la grâce de quiétude

 

Excursus : des quiétudes profanes

Si la distinction entre contemplation et méditation a un sens, elle vaut aussi pour Platon. Quel est le propre alors de la contemplation chrétienne ? La contemplation philosophique a aussi Dieu pour objet, mais son orientation est spéculative, au lieu qu'elle est pratique pour la mystique. Cependant, si la spéculation pure ne sort pas du discours, il faudra dénier qu'une contemplation véritable soit possible à qui n'a pas reçu de grâce proprement mystique. Or le mécanisme de cette inhibition progressive, bien qu'il soit sanctionné dans l'oraison de quiétude par des grâces que nul effort humain ne peut remplacer, n'a rien en soi de proprement surnaturel. D'ailleurs Dieu n'est pas la seule réalité qui se donne ainsi à nous, qui soit capable de nous « ravir ». Pas de vie de l'esprit sans quiétude. Ainsi, selon H. Delacroix, de la « nébulosité initiale du lyrique et du musical ». Observations en ce sens de Diderot, Wordsworth, Maurice de Guérin. Au cœur de toutes les émotions vives, une introspection rigoureuse discernerait nécessairement de tels éclairs de quiétude. Rapprochement avec l'amour profane. Le récit de W. H. Hudson, Un flâneur en Patagonie. Non pas opposer, mais distinguer quiétudes profane et mystique. Le « je ne sais quoi » du poème. Le témoignage d'Augustin : la parole est inférieure à ce qu'elle exprime. Diderot : « Combien de choses senties et qui ne sont pas nommées. » L'« éclair de génie » que produit le sentiment n'est pas « la chose qu'il sent »

 

 

François Trémolières, Situation de Bremond

Histoire de la spiritualité et sciences des religions

La formation de Bremond: sa période jésuite

La Terreur noire

La «vague mystique»

Une histoire, et littéraire

En finir avec la théologie?

 

 

Volume V

Table des matières

Index alphabétique et analytique, par Charles Grolleau (1936)

Bibliographie (par François Trémolières)

I. Écrits de Bremond

I.1 Livres et brochures. Préfaces, traductions

I.2 Études et articles

I.3 Lettres et écrits intimes publiés post mortem

I.4 Fonds manuscrits

II. Études bremondiennes

II.1 Livres et thèses consacrés à Bremond

II.2 Articles et études, autres ouvrages

Table des illustrations

Traduction des citations (par François Marxer)





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