Que quelque chose de notre « nature humaine » se trouve étrangement
éclairé par l’analyse phénoménologique des rapports complexes entre
phantasia, imagination et affectivité, telle est l’énigme qui traverse
ce livre comme un fil rouge. Autant la phénoménologie comme telle
s’occupe des phénomènes en leur statut transcendantal, autant la
précision qui leur est apportée par la prise en compte de leur dimension
imaginative et affective, conduit-elle à délimiter, à l’intérieur de la
phénoménologie, le champ de l’anthropologie phénoménologique. Et, à
l’intérieur de ce champ, les psychopathologies sont un véritable
révélateur.
Les analyses phénoménologiques qui en sont proposées ici
conduisent à prendre la mesure, souvent démesurée, de l’homme, et à
affiner en retour les structures que la phénoménologie dégage pour sa
part. Analyses en zigzags ou en spirale qui permettent de voir et de
décrire les rivages d’une terre, mais qui est une terra incognita : la
nôtre.
Voyage long, difficile, aventureux où l’énigme reste entière mais a
changé de visage. Alors qu’il y a quelque chose de non humain dans la
rationalité, et qui a tant séduit la tradition philosophique, dans le
champ qui se découvre ici, l’imagination, dans ses rapports complexes
avec l’affectivité, paraît, en écho à Nietzsche, humaine, trop humaine.
Lieu d’illusions multiples, affectives, mais aussi axiologiques, au plus
loin de toute idéologie et de toute évaluation, toutes deux
ratiocinantes, au plus près d’une reprise lucide des horizons
symboliques de l’institution symbolique dans laquelle nous vivons et qui
nous fait vivre. La question est peut-être finalement : qu’est-ce que
vivre, et vivre humainement ? Vivre, et non pas être ?