Injustement méconnu
en France, Nicolas de Cues est pourtant un auteur capital de la
tradition métaphysique occidentale. Au moment où l’on retraduit
ses œuvres en français, cette étude présente l’anthropologie
philosophique de ce grand auteur. Loin d’être anéanti par
l’infinité divine, l’homme est salué comme le « dieu humain »
du « monde humain ». Une théologie et une cosmologie infinitistes
s’articulent à cette valorisation de l’homme. Cette œuvre
entend en effet concilier une métaphysique de l’infini à une
affirmation de la singularité humaine au moyen d’une théorie de
la puissance productrice de l’esprit. L’art des conjectures sera
l’activité générale par laquelle, en régime de docte ignorance,
l’esprit produit les notions qui constituent son monde spécifique,
distinct de Dieu et de l’univers. Dans leur tension vers l’infinité
divine les puissances de l’esprit humain utilisent les arts du
quadrivium (arithmétique, géométrie, astronomie, musique) pour
mesurer les êtres créés, organiser la vie commune, figurer le
Principe. Le problème sera alors de réintégrer la multiplicité
des points de vue et des interprétations dans une communauté
universelle unifiée. Héritier de la tradition néoplatonicienne et
de la théologie du Moyen Âge, témoin de la Renaissance florentine,
Nicolas de Cues dresse le cadre de la métaphysique moderne.