Les neuf Dialogues posthumes sur le quiétisme (1699) reflètent
sur une tonalité ironique l’épisode central de la querelle mystique qui
marqua l’Église française à la fin du dix-septième siècle, et qui fut
dominée par deux prélats et une dame laïque : Bossuet, Fénelon et Madame
Guyon. Ils en constituent l’un des documents les plus divertissants,
sinon les plus objectifs. Leur ressemblance aux Lettres provinciales de
Pascal se signale par le fait qu’ils marquent une évolution chez leurs
participants dans le sens d’une réitération univoque de la position
perçue et avancée comme orthodoxe ; mais à la différence de leurs
célèbres précurseurs, ils se déroulent dans les coulisses du débat, et
non pas à l’avant-scène de l’actualité polémique. Jean de La Bruyère,
selon une opinion très largement partagée, en aurait rédigé les sept
premiers entretiens peu avant sa mort ; et Louis-Ellies du Pin les
aurait augmentés de deux dialogues supplémentaires. Mais l’addition
posthume qui constitue l’une des particularités les plus curieuses de ce
document prend la forme d’une très ample annotation textuelle qui,
reproduite dans son intégralité dans cette édition, et jointe aux
interventions fictives, offrent une sorte de florilège satirique de
l’enseignement quiétiste et des controverses qu’il suscita.