Parmi les voix
autorisées de la République des Lettres, celle de Paulin d’Aumale,
tiercelin du couvent de Nazareth, peut sembler inaudible. Ni
théologien de profession, ni philosophe, ni même écrivain
talentueux, il s’exprime à partir de son expérience de confesseur
et de directeur de conscience, et son texte permet une approche
peut-être moins balisée de l’affaire quiétiste. Le lecteur
découvre un texte dépouillé d’éloquence ou d’apparat,
immunisé contre les susceptibilités propres aux hommes de plume
professionnels. Sur le manuscrit, le texte apparaît écrit en un
seul jet, d’un seul tenant, sans aucune rature, dans l’urgence
d’une conviction à transmettre. Le système de l’amour pur se
livre à l’état brut, tel que peuvent le vivre les cœurs les plus
généreux : c’est la version pragmatique, ou moins compassée,
d’un courant spirituel qui toucha les publics les plus variés. À
travers le jeu des questions / réponses, on ne quitte jamais
l’intimité du dialogue qui unit le directeur et la personne qu’il
dirige.