Première édition française, traduite de la Patrologie Latine, des œuvres physiques d'Hildegarde de Bingen.
Frappée de lumière, Hildegarde entend la musique sacrée de
la vie : elle pose son regard sur les plantes, les métaux, les rochers,
les animaux, en y voyant à chaque fois une étincelle de paradis. Sous la
plume d'Hildegarde, chaque élément sensible se transfigure, devient
sensible et sensuel, agité d'humeurs malignes ou de langoureuses
caresses.
Science ou art de voir ? On trouve la trace d'antiques
savoirs, mais aussi l'expression d'une « solidarité » avec toutes les
formes, visibles ou invisibles, du vivant.
Table des matières / Extraits
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EXTRAIT
CH. XII: LE BASILIC (De basilisco)
Le basilic naît d'autres espèces de vermines qui ont quelque chose de
diabolique, comme le crapaud. Quand la femelle du crapaud est gravide et
prête à mettre bas, si elle voit alors un œuf de serpent ou de poule,
elle s'en éprend, s'étend sur lui et le couve jusqu'à ce qu'elle mette
bas les petits qu'elle avait normalement conçus; une fois qu'elle les a
mis bas, ils meurent aussitôt. Quand elle voit qu'ils sont morts, elle
s'installe à nouveau sur l'œuf et le couve jusqu'à ce que le petit qui
est en lui commence à vivre. Alors, sous l'effet de l'action diabolique,
une force venue de l'antique serpent, qui se trouve dans l'Antéchrist,
vient la frapper ; ainsi, tout comme le diable résiste aux forces
célestes, de même cet animal lutte-t-il contre les mortels en les tuant.
Une fois que le crapaud a senti qu'il y avait de la vie dans l'œuf, il
est aussitôt frappé d'épouvante et s'enfuit. Le nouveau vivant brise la
coquille de l'œuf et en sort; puis, conformément à sa nature, il émet un
souffle très puissant, avec le feu le plus brûlant et le plus puissant
qui puisse être, à l'exception de celui de l'enfer, semblable à la
foudre et au tonnerre. Une fois sorti de l'œuf, il fend le sol grâce à
la puissance de son souffle, jusqu'à une profondeur de cinq coudées ; il
s'installe là, dans le sol humide, jusqu'à ce qu'il ait atteint sa
maturité. Puis il remonte sur la terre et, par son souffle, tue tout ce
qu'il trouve en vie, car il ne veut ni ne peut supporter quelque chose
de vivant. Quand il voit quelque chose qui vit, il se met en colère et
envoie devant lui son froid et son souffle, tuant la créature sur
laquelle il souffle : celle-ci tombe aussitôt, comme si elle était
frappée par le tonnerre et la foudre.
Si un basilic est mort dans un champ ou une vigne, et que son cadavre y a
pourri, ce lieu devient infécond et stérile; si c'est dans une tour ou
une maison qu'il est mort et a pourri, les habitants sont toujours
malades, les animaux sont souvent frappés de maladie et souvent ils en
meurent.