Accueil -
Collections - Nomina
Nomina
Les siècles les plus nombreux de l’histoire écrite ont demandé aux
livres d’orienter la vie ; la lecture, sous des formes diverses, était
avant tout une expérience interrogeant la façon que nous avons d’être
dans le temps, de connaître et de façonner ce que nous avons à devenir.
Les liens entre éthique et lecture étaient d’autant plus évidents et
nécessaires que la lecture elle-même était une pratique, un exercice de la connaissance de soi et de son devoir face au monde.
Ce dispositif a changé ; jamais le lien entre les livres et la
dimension éthique de la lecture n’a été plus nettement rompu que dans la
période contemporaine. La lecture est sans lendemain ; le jour d’hier,
l’otage du présent. Dans cet ordre comme dans beaucoup d’autres, le
laboratoire et ses procédures, ou l’affirmation violente de l’individu,
prennent le pas sur l’expérience du monde et la connaissance de soi. Le
renversement est complet : le sujet ne parvient plus à formaliser le
lien qui continue pourtant de l’unir à toutes les dimensions de sa
propre vie.
Cette collection, en interrogeant un tel déplacement, en remettant
au jour des textes capitaux de la tradition de la lecture — avec tous
les enseignements, infiniment divers, mais centrés, qu’ils nous
donnent —, veut soumettre à l’examen les pratiques de lecture et
d’écriture que l’époque contemporaine a choisies, et inviter à une
réorientation éthique de l’activité liée aux livres. Il se peut que du
sens apparaisse là où nous croyions avoir intérêt à le voir s’effacer,
et que la conscience des choix effectifs que nous avons faits gagne en
netteté, exigeant de nous l’exercice de la considération. Ce que des périodes plus anciennes nommaient, en une formule unitaire, literae humaniores.
Nomina, omina : les mots sont comme des présages ; venus de loin, et figures d’un avenir sans clôture
Collection dirigée par Christophe Carraud et R. Lenoir